La consignation est devenue une véritable épine au pied des épiciers québécois. Selon eux, le gouvernement doit y mettre fin en privilégiant la collecte sélective.

Les épiciers se disent sensibles à la situation de ceux qui collectent bouteilles et canettes, mais ils affirment que ce sont eux qui vivent avec les problèmes engendrés par ce phénomène: contenants mal lavés, insectes, insalubrité, frais d'entretien.

«Nous avons joué notre rôle de bons citoyens durant des années. Nous croyons que cette responsabilité est maintenant dépassée», dit Florent Gravel, président-directeur général de l'Association des détaillants en alimentation du Québec (ADAQ).

L'instauration de la consigne sur les canettes remonte à l'époque où les embouteilleurs ont voulu passer du verre à l'aluminium. Les contenants de plastique se sont ensuite ajoutés.

«Le gouvernement ne voulait pas que cela traîne partout. À ce moment-là, il n'y avait pas de collecte sélective. Nous avons consenti à jouer notre rôle de bons citoyens en acceptant le retour des canettes moyennant la consigne de cinq cents», rappelle M. Gravel.

Avec le temps, de plus en plus de gens venaient porter leurs contenants, pas toujours propres, que le personnel devait manipuler. Les clients qui arrivaient avec un sac rempli de canettes ralentissaient également le service au comptoir.

«Pour faire face à cette réalité, nous avons acquis des machines. Mais ça coûte cher, poursuit M. Gravel. Nous devons accorder des contrats pour l'entretien et la réparation de ces appareils. Les gens qui rapportent des contenants ne les lavent pas. On se retrouve avec du jus, des fourmis, des coquerelles. Et nous sommes surveillés par les inspecteurs de la salubrité. Le gouvernement nous demande d'être propres, mais on doit prendre les déchets de tout le monde!»

L'achat d'un seul appareil coûte entre 10 000 et 15 000$. Les revenus tirés de la consignation ne permettent pas d'éponger les frais de gestion, selon l'ADAQ.

L'autre réalité qui irrite les épiciers est le fait que d'importants concurrents ne gèrent pas la consigne. Ils ragent de voir de grandes chaînes vendre des boissons gazeuses à bon marché sans s'embarrasser du retour des canettes.

Au printemps dernier, la commission de l'Assemblée nationale sur les transports et l'environnement a mené une consultation sur la gestion des matières résiduelles. L'ADAQ y a présenté un mémoire dans lequel elle propose que les municipalités soient mieux outillées pour augmenter la collecte sélective. Ses arguments semblent avoir été entendus, car la Commission a produit un rapport dans lequel elle recommande au ministère du Développement durable et de l'Environnement d'abolir la consigne.

Un des arguments en faveur de la collecte sélective est la baisse du taux de récupération des canettes, selon les parlementaires. «Nous avons été unanimes en ce sens, dit le président de la commission et député libéral Lawrence Bergman. En ce moment, la collecte sélective connaît un grand succès dans les habitations unifamiliales et les édifices de moins de huit logements. Il faut que cela devienne aussi le cas dans les grands immeubles, les bars, les restaurants, les hôtels.»

Autrement dit, on suggère d'étendre la distribution de conteneurs à roulettes avec couvercle, dans lesquels les gens placeront toutes leurs matières recyclables.

Le ministère de l'Environnement prendra une décision dans les prochains mois.