Pas si essentiels, le compte de banque et la richesse, pour les jeunes d'aujourd'hui? Ça dépend de la langue dans laquelle on pose la question.

Une majorité des Québécois de 18 à 30 ans (54,5 %) accordent peu ou pas d'importance à l'argent, selon le sondage Segma - La Presse -Groupe Gesca. Mais chez les anglophones et les allophones, cette proportion baisse à 36 %.

Le président de Segma-Unimarketing, Raynald Harvey, tente une explication. «Les francophones semblent encore pris avec une certaine perception négative de l'argent, dit-il. Il y a une différence fondamentalement culturelle.» Il l'attribue notamment aux origines catholiques des francophones «Le fait de gagner de l'argent, de devenir riche, était perçu de manière négative.»

Pourtant, si seulement 43 % des francophones disent accorder de l'importance à l'argent, il n'en reste pas moins que, pour eux, le revenu idéal est le même que chez les anglophones, soit environ 70 000 $.

Entre rêve et réalité

Le fait que plus de la moitié des jeunes Québécois accordent peu d'importance à l'argent (parmi ce groupe, un répondant sur six n'y accorde aucune importance) est significatif.

La Presse a pris contact avec les services d'orientation de certains collèges, là où passent les jeunes qui entrent dans la tranche des jeunes adultes, pour savoir ce qu'il en est réellement.

«Par rapport à ce que j'entends et à ce que je perçois, les chiffres ne sont pas loin de la réalité», dit Denise Racine, conseillère d'orientation au cégep... douard-Montpetit.

«Nous avons des jeunes qui sont carriéristes et qui nous disent par exemple qu'ils veulent aller en médecine pour faire de l'argent, mais ce n'est vraiment pas la masse», précise-t-elle.

Selon Mme Racine, qui travaille avec les jeunes depuis une qui zaine d'années, l'importance accordée à la richesse a un peu diminué dans les choix professionnels des jeunes, au profit des valeurs de plaisir, de satisfaction et de valorisation dans le travail.

Selon Mélanie Gratton, conseillère en information scolaire et professionnelle au Collège de Rosemont, l'argent reste néanmoins une variable importante dans les choix des jeunes.

Selon les résultats du sondage, les jeunes qui gagnent moins de 10 000 $ (souvent des étudiants) évaluent leur revenu idéal à près de 75 000 $, alors qu'il n'est que de 57 200 $ pour ceux qui gagnent entre 20 000 $ et 30 000 $.

Raynald Harvey qualifie les premiers de «rêveurs», les seconds de «réalistes».

«Parfois, les jeunes visent un salaire sans savoir que ce salaire est fonction de certaines responsabilités», dit Mélanie Gratton. Ils se rendent alors compte qu'il n'y a pas seulement le salaire, mais aussi le poste désiré qui compte.

 

MÉTHODOLOGIE

Le sondage a été réalisé du 5 au 19 août par voie d'entrevues téléphoniques à partir du centre d'appels de Segma recherche à Saguenay. L'échantillon a été tiré aléatoirement parmi les échanges téléphoniques de la population québécoise. Seules les personnes âgées de 18 à 30 ans ont été retenues pour participer à l'enquête. Au total, 608 entrevues ont été réalisées. Les résultats d'ensemble sous-tendent une marge d'erreur maximale de plus ou moins 4,0 % et ce, 19 fois sur 20.