Officiellement en faillite depuis le 9 octobre, l'entreprise qui a hérité de la controversée réfection du toit de l'hôtel de ville de Montréal, LM Sauvé, avait rendez-vous hier avec une trentaine de créanciers à qui elle doit 4,4 millions.

Une bonne et une mauvaise nouvelle les attendaient. En récupérant les sommes dues par ses anciens clients et en mettant la main sur les profits attendus de la réfection du toit de l'hôtel de ville, ont-ils appris, LM Sauvé pourrait renflouer ses coffres et disposer de liquidités pouvant s'élever, dans le meilleur des cas, à 5 millions de dollars.

La mauvaise nouvelle, c'est qu'il est peu probable que les créanciers touchent un seul sou de cette manne. «Le travail du syndic, c'est de recouvrer les sommes pour le bénéfice du créancier garanti (LM Sauvé) et éventuellement de la masse des créanciers si un surplus se dégage, a expliqué Dev Coossa, syndic de faillite. Mais il n'y a pas de surplus envisagé.»

Convoqués à une assemblée au huitième étage d'un immeuble de la Place Ville-Marie, les quelque 30 petits créanciers ont reçu la nouvelle avec résignation. Au syndic qui demandait au groupe s'il restait des points à éclaircir, une seule voix a répliqué: «On veut encaisser!»

LM Sauvé, une entreprise familiale active dans le domaine de la maçonnerie depuis plus de trois générations, est la propriété de l'homme d'affaires Paul Sauvé. En juin dernier, il a fait les manchettes quand il a révélé à La Presse qu'un membre de la mafia lui a demandé 40 000$ qui devaient être remis à deux élus du parti du maire Tremblay. Cet argent, a-t-il expliqué, lui donnerait l'assurance que le chantier de réfection de l'hôtel de ville, obtenu par LM Sauvé pour une somme de 10,6 millions, pourrait continuer.

Depuis avril 2009, l'entreprise est sous la protection de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Au début du mois d'octobre, incapable de finaliser une proposition avec ses créanciers, l'entreprise a déclaré faillite et a dû remettre tous ses biens à un syndic, Villeneuve Venne Coossa. Les travaux de l'hôtel de ville, eux, ont été repris en main par la compagnie de caution de LM Sauvé, L'Unique assurances générales.

C'est notamment auprès de cet assureur que le syndic espère récupérer quelque 2 millions de profits associés au contrat de l'hôtel de ville. «Nous allons tenter d'obtenir des redditions de compte de l'Unique et des clients de LM Sauvé dont les chantiers étaient actifs», a expliqué Me Coossa.

Paul Sauvé, lui, se dit tout de même sûr de pouvoir offrir à ses créanciers la moitié de ce qu'il leur doit. «Il n'y a pas eu d'offre formelle, il y a eu la lueur d'une offre», a-t-il résumé. Il réclame notamment depuis plus de deux ans 900 000$ pour la réfection de l'église St. James, une des causes de la tourmente que vit son entreprise. «Ç'a fait un trou, une tempête parfaite avec nos deux chantiers qui coûtaient très cher, le parlement à Ottawa et l'hôtel de ville de Montréal», a-t-il expliqué.

Malgré la faillite, son entreprise continue tout de même ses activités, essentiellement à l'extérieur du Québec. «On travaille, on continue de travailler. C'est une entreprise qui a été très rentable dans les trois dernières années, ses filiales possèdent le plus important parc d'équipement en maçonnerie au Canada. Mais avec la réforme qui s'en vient au Québec, les enquêtes, on est quasiment contents de ne pas avoir de projets au Québec. On attend que la poussière retombe.»