Connaissez-vous le martinisme ?

Non, je ne vous parle pas du courant philosophique du XIXe siècle se réclamant des enseignements de Martinez de Pasqually et de Louis-Claude de Saint-Martin, selon lesquels l’initié qui a reçu l’inspiration divine devient une sorte de dieu, sous forme humaine. Je vous parle du nouveau martinisme, courant philosophique du XXIe siècle, se réclamant des enseignements de Martin St-Louis, selon lesquels l’initié qui a reçu l’inspiration du coach devient une sorte de sage, sous forme humaine.

Surtout, ne confondez pas les martinismes avec les perronismes. Les perronismes sont des lapsus prononcés par l’ex-entraîneur du Canadien de Montréal et des Nordiques de Québec Jean Perron. Rappelez-vous : « Ça se vend comme des p’tits ponchos. C’est la pointe de l’asperge. Vous m’enlevez l’eau de la bouche. » C’est absurde et drôle. Tandis que les martinismes sont des réflexions émises par l’entraîneur actuel du Canadien de Montréal, Martin St-Louis. Il ne s’agit pas de non-sens, mais de sens profond. Constatez-le vous-même avec ce premier martinisme :

« Je suis un gros croyant, spécialement avec les jeunes joueurs. Je regarde leur plafond. Je m’en fous de leur plancher. Surtout quand ils sont jeunes. Montre-moi ton plafond et on va s’occuper ensemble de ton plancher. »

Vous n’êtes pas sûr de comprendre ? C’est normal. Les propos d’un prophète paraissent toujours nébuleux à la première écoute. Il en est ainsi de St-Louis, comme de Confucius et de Nostradamus. C’est pour nous pousser à creuser, à approfondir.

« Montre-moi ton plafond et on va s’occuper ensemble de ton plancher. » De prime abord, ça ressemble à un slogan de chez RONA, mais c’est beaucoup plus inspirant que ça. Montre-moi ton plafond, montre-moi jusqu’où tu peux aller, et on va s’occuper ensemble de ton plancher, je vais t’aider avec là où tu es.

Deuxième citation tirée des Pensées de Martin :

« Je ne coache pas beaucoup les joueurs avec la rondelle, je coache les quatre autres joueurs. La rondelle, c’est le présent, les quatre autres joueurs, c’est le futur. »

Oh là, on tombe dans la métaphysique. L’important, ce n’est pas où est la rondelle, l’important, c’est où sera la rondelle. Un coach n’est pas là pour dire ce que tu dois faire avec la rondelle, tout le monde sait ce qu’il doit faire avec la rondelle, il doit la mettre dedans. Un coach est là pour te dire comment obtenir la rondelle. Pour que ton futur devienne ton présent. Vous saisissez ? Êtes-vous prêt pour le prochain niveau ?

« C’est pas toute les joueurs pareils. Mais moi, je veux qu’ils amènent leur game en dedans de notre game. Tsé, tu peux pas juste jouer ta game. Faut tu jouzes la game. Fait que t’amène ta game à la game. Je sais pas si tu comprends ? »

Je vous l’avais dit qu’on tombait dans le deep. Amener sa game dans la game. Amener son individualité dans la collectivité. Tu peux pas seulement penser à toi, il faut que tu penses à toi par rapport aux autres. Le prophète ne veut pas une équipe de robots qui jouent tous de la même manière. Il veut une équipe d’individus qui jouent différemment, mais en se complétant. Que la somme des différences fasse une différence pour gagner. C’est un projet de société.

Il y a plus d’idées porteuses dans un point de presse de Martin St-Louis que dans l’ensemble d’une campagne électorale.

À propos de son gardien de 32 ans, Jake Allen, St-Louis a dit ceci : « C’est bon d’avoir une personne qui est prête à planter des arbres en sachant qu’elle ne s’assoira jamais à l’ombre. »

En réparant les erreurs de ses jeunes défenseurs, le vétéran cerbère leur permet de grandir, mais il ne sera plus là, quand ils auront poussé au point de pouvoir protéger de leurs branches leur gardien des rayons des attaquants adverses. Allen sème, mais un autre récoltera. J’espère que St-Louis, lui, sera encore là pour récolter le magnifique champ d’honneur qu’il est en train de semer.

La haute direction du Canadien a vraiment bien choisi son homme. Sachant que la reconstruction du club allait être une période longue et difficile, avec son lot de bas et quelques hauts, le CH a décidé de miser non seulement sur un coach de hockey, mais sur un coach de vie, aussi, enseignant autant aux joueurs qu’aux amateurs.

Perd ou gagne, Martin St-Louis arrive toujours au micro, après un match, avec un discours posé aux élans philosophiques. On est fâché contre lui parce qu’il fait jouer Wideman sur l’attaque à cinq, et il nous parle de plafond, de plancher, de l’ombre, des arbres, du présent et du futur. On se calme. On relativise. On comprend que progresser, ce n’est pas juste une question de points.

Un dernier martinisme pour la route :

« Il n’y a pas une vie qui mérite d’être vécue si tu ne peux pas la partager avec les gens que tu aimes. »

Profond, que je vous disais.

Cela dit, j’espère quand même qu’il va faire jouer Guhle sur l’avantage numérique, ce soir.

Bon match ! Et surtout, bon point de presse du coach !