Je vous ai dit récemment mon peu d’envie de reparler de la COVID-19 et de cette satanée pandémie. Je fais exception aujourd’hui pour célébrer une nouvelle réjouissante : le prix Nobel de médecine a été attribué conjointement aux codéveloppeurs de la technologie qui a préparé la voie aux vaccins contre la COVID-19.

« L’Assemblée Nobel de l’Institut Karolinska a décidé aujourd’hui de décerner conjointement le prix Nobel de médecine à Katalin Kariko et Drew Weissman pour leurs découvertes concernant les modifications des bases nucléiques qui ont permis le développement de vaccins ARNm efficaces contre la COVID-19. »

Dès 2005, ces deux chercheurs de l’Université de Pennsylvanie ont publié leurs découvertes sur la technologie ARN messager dans la revue Immunity (après des refus de Nature et Science), découvertes présentées par le comité Nobel comme « un changement de paradigme dans notre compréhension de la façon dont les cellules reconnaissent et répondent à différentes formes d’ARNm ».

C’est à partir de cette technologie ARNm que des équipes de scientifiques ont développé « en un temps record » des vaccins utilisant la technologie ARNm développée par les chercheurs Kariko et Weissman pour commencer à inoculer le vaccin. Dès décembre 2020 (Moderna et Pfizer-BioNTech), « des milliards de personnes » ont pu être vaccinées et des « millions de vies ont été sauvées et des complications ont été évitées pour bien plus de personnes encore ».

Je cite une dernière fois le comité Nobel : « À travers leurs découvertes fondamentales sur l’importance des modifications de base dans l’ARNm, les lauréats du Nobel de médecine ont contribué de façon critique à ce développement transformateur pendant une des plus grandes crises de santé de notre temps. »

Quelques observations, ici…

D’abord, il faut le dire, et le redire : le développement de vaccins en un temps record, aux premiers temps de la COVID-19, est un triomphe de la science, de la connaissance et de l’expertise.

En six mois, des scientifiques ont pu développer les premiers vaccins anti-COVID-19, vaccins qui ont fini par protéger les individus et permettre aux sociétés de retrouver un semblant de vie normale.

Ensuite, ces vaccins qui ont bâti sur les découvertes des chercheurs Kariko et Weissman sont un puissant rappel de la façon dont fonctionne la science. Des chercheurs font des découvertes, les publient dans des journaux scientifiques à révision par leurs pairs. Les résultats et la méthodologie sont expliqués, pour analyse par des pairs.

Et des années plus tard, d’autres chercheurs utilisent ces découvertes pour améliorer une technologie vaccinale, pour combattre un mal nouveau. Ils publient eux aussi leurs résultats dans des revues scientifiques à révision par les pairs.

Rappel : la science ne se « fait » pas sur YouTube. La science n’est pas « crédible » juste parce qu’un professeur portant un sarrau blanc « semble » convaincant sur YouTube ou sur des plateaux de télévision avec ses certitudes en béton armé.

Oui, je pense ici à Didier Raoult, le chercheur français qui a considérablement pollué les réflexions sur la pandémie avec ses théories fumeuses. Très populaire sur YouTube, très convaincant sur les plateaux de télévision français, le DRaoult était en effet un scientifique reconnu avant la pandémie.

Mais ses singeries à propos de « l’efficacité » de l’hydroxychloroquine, il ne les a jamais publiées dans des revues crédibles. Comme d’autres agitateurs de la pandémie, Raoult s’est rendu intéressant partout où la science ne se fait pas…

PHOTO CHRISTOPHE SIMON, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le Dr Didier Raoult, en 2020

Ça aurait dû lever des drapeaux rouges partout, sauf que non : même de brillants esprits se sont fait rouler dans la farine. Alors non, on n’avait pas à « l’écouter », Stéphan (Bureau), et encore moins à lui donner des tribunes complaisantes.

Rappel : méfions-nous des scientifiques qui ont des certitudes, mais qui n’ont aucune publication dans des revues scientifiques prestigieuses pour appuyer ces « certitudes ». Comme Raoult.

Un dernier mot sur ce pays qui est notre voisin, les États-Unis d’Amérique. On y retrouve toutes sortes de virus inquiétants ces jours-ci, comme le trumpisme, un pathogène qui menace la santé démocratique bien au-delà des frontières de notre voisin.

Mais le Nobel de médecine 2023 est un autre rappel important : aucun autre pays ne « produit » autant de science. Les USA sont de loin le pays le plus primé aux prix Nobel, en science. Ce pays, pour tous ses défauts, est un géant de la science et de la connaissance.

Le Nobel 2023 de médecine en est une autre preuve.