Dans le salon de la résidence de Saint-Nicolas, les photos de famille entourent les visiteurs. Il y a des enfants et des petits-enfants, des adolescents portant mortier et diplôme, des bouts de chou en costume d'Halloween, de petits violonistes avec un air sérieux. Et un petit cadre vide avec un gros point d'interrogation: la mère biologique de Diane Poitras.

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Depuis 20 ans, Diane Poitras se bat pour connaître d'où elle vient. C'est sa quête, son rêve, sa lutte qu'elle mène sans relâche parce qu'elle sait que, quelque part, dans un classeur d'archives du Centre jeunesse de Montréal, se trouve la réponse. Mais la loi l'empêche d'y avoir accès.

Diane Poitras, 62 ans, avait quatre mois en 1949 quand elle a été adoptée par un couple de Gaspésiens. Elle insiste : elle a eu une enfance heureuse et des parents aimants, dont une mère qui l'a encouragée à retrouver ses origines. C'est ce qu'elle a fait à l'âge de 43 ans, quand elle a appris quelques bribes de son histoire.

Dans le dossier que lui a remis le Centre jeunesse, sa mère biologique est décrite comme ayant une « physionomie agréable », « sympathique, intelligente ». Et juste après, une mention fascinante : « Nationalité : polonaise. [...] Votre mère serait arrivée d'Allemagne comme réfugiée. Elle était enceinte. »

Polonaise ! Diane Poitras rit encore en se souvenant de la découverte. « Je n'ai jamais soupçonné une minute que j'étais polonaise ! »

Emballée par la découverte, Diane Poitras entreprend les démarches de retrouvailles. Sa mère biologique est restée à Montréal, où elle s'est mariée avec un autre compatriote polonais anglophone, avec qui elle a eu deux fils.

Rencontrée par une travailleuse sociale à la demande de Mme Poitras, la dame polonaise a gardé pour elle deux des photos que sa fille biologique lui a fait parvenir. Mais elle a refusé tout contact avec elle. Ce refus, Diane Poitras en garde toujours une boule dans la gorge.

En 2001, a appris Diane Poitras, sa mère biologique est décédée, emportant tous ses secrets avec elle.

Dans d'autres provinces canadiennes, l'identité de la mère biologique recherchée est révélée deux ans après sa mort. Mais pas au Québec. Et c'est ce que Diane Poitras veut faire changer. « Mon identité et le nom de mon père ne doivent pas appartenir seulement à ma mère. Et encore moins à l'État. Je n'accepterai jamais de venir de nulle part. »

Elle a porté sa cause auprès de tous les gens d'influence qu'elle a pu rencontrer - de la romancière Arlette Cousture au premier ministre Jean Charest, en passant par Maman Dion et les associations polonaises. En 2010, elle s'est présentée en commission parlementaire à Québec pour expliquer à la ministre de la Justice de l'époque, Kathleen Weil, pourquoi elle devait changer les dispositions sur l'adoption pour permettre aux personnes adoptées comme elle d'avoir accès à leurs origines - elle saura au moment du dépôt du projet de loi, en 2012, si Québec accédera à sa requête.

Que désire Diane Poitras ? Elle a longtemps médité sur notre question. Voulait-elle « rencontrer [ses] demi-frères » ? Ou encore « faire changer la loi sur l'adoption » ? Elle a choisi de « connaître le nom de [sa] mère ». « Son nom, c'est la clé, dit-elle. Je ne recherche pas ma mère, je recherche mon identité. »

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