Bien qu'elle soit athée et ne croie pas aux miracles, Jacalyn Duffin a joué un rôle-clé dans la canonisation de Marie-Marguerite d'Youville, célèbre fondatrice des soeurs de la Charité.

Cela s'est passé à la fin des années 80, lorsqu'un collègue a demandé à cette hématologue et historienne de la médecine rattachée à l'Université Queen's, en Ontario, de donner son avis sur une série d'échantillons de la moelle épinière d'une femme atteinte de leucémie.

La patiente était atteinte d'une forme très agressive de la maladie. «J'ai conclu en regardant les premiers échantillons qu'elle devait être morte mais, à ma grande surprise, elle était vivante et en bonne santé», a relaté hier Mme Duffin lors d'un entretien téléphonique.

Le véritable choc était cependant ailleurs: le Vatican considérait que la guérison de la femme victime de leucémie pouvait être le miracle qui manquait pour canoniser Marguerite d'Youville.

D'abord «soufflée» d'apprendre que son expertise était utilisée à cette fin, la chercheuse canadienne a accepté de présenter son rapport devant un tribunal ad hoc. Présidée par un évêque, l'audience visait à valider ou infirmer le caractère inexplicable de la guérison.

«Il y avait un côté presque judiciaire à l'audience. Et c'est comme ça depuis des siècles. Le Vatican a des standards très élevés», souligne Mme Duffin, qui s'est rendue à Rome pour assister à la cérémonie de canonisation de Marguerite d'Youville.

«J'ai d'abord voulu refuser l'invitation, mais je me suis finalement dit que ce serait intéressant à voir. J'y suis donc allée avec mon mari, qui est juif», relate la chercheuse.

Une fois là-bas, elle décide de se plonger dans les archives du Vatican pour voir quels sont les «miracles» invoqués au fil des siècles pour désigner les saints.

«Je ne savais pas si on me laisserait regarder, mais j'ai finalement eu l'autorisation. À toutes les époques, on demande l'expertise scientifique la plus avancée. J'ai été impressionnée par l'honnêteté et la rigueur des recherches consignées dans les dossiers que j'ai consultés.»

«J'ai des collègues qui pensent que tout ça, c'est de la folie, de la pensée magique, que l'Église catholique se fait berner par des gens, ou que l'effet placebo ou l'hystérie sont en cause. Mais les experts du Vatican connaissent ces phénomènes et écartent les cas où ils sont susceptibles d'expliquer les guérisons observées.»

Les propos de Mme Duffin recoupent ceux du père Mario Lachapelle, biologiste de formation devenu père de la congrégation de Sainte-Croix, qui agissait à titre de vice-postulateur dans la cause de la canonisation du frère André.

«Les gens pensent que les cas de guérison retenus pour les canonisations sont arrangés par le Vatican, mais ce n'est pas du tout le cas, explique le père Lachapelle. C'est incroyable la quantité de spécialistes et de personnes qui sont appelés à se prononcer dans le cadre du processus.»

Bien qu'elle ne croie pas en Dieu et ne pense pas un instant qu'une intervention supranaturelle puisse accomplir des guérisons autrement inexplicables, Mme Duffin se garde bien de juger les personnes qui y croient.

«Ma conviction qu'il y a une explication naturelle pour tous les phénomènes est une croyance parce que je ne dispose pas des preuves qui permettraient de prouver que j'ai raison. Pourquoi mettrais-je ma croyance au-dessus de celle d'une patiente qui pense que Dieu l'a guérie?»

En définitive, la religion et la médecine sont des «formes parallèles de sagesse humaine» qui aident toutes deux à «soulager la douleur», conclut l'universitaire.

Activités de la fin de semaine à l'Oratoire

À partir de 20h30: vigile.

4h du matin: retransmission en direct sur grand écran de la messe de canonisation au Vatican.

Demain à 11h: messe dans la basilique avec les Petits Chanteurs du Mont-Royal.

L'exposition Frère André, le saint du mont Royal est en cours à l'Oratoire.

Le grand rassemblement au Stade olympique aura lieu le 30 octobre.