La chef péquiste Pauline Marois a fait face mercredi à une fronde concertée d'au moins une demi-douzaine de ses députés, exaspérés par son incapacité à faire en sorte que le Parti québécois retrouve la faveur de la population. Mais, à la sortie d'un huis clos de près de trois heures en toute fin de soirée, elle semblait être parvenue à calmer le jeu.

«Je ne partirai pas. Je suis là pour rester, et je vais faire la prochaine élection», a-t-elle affirmé. «J'ai un bon appui du caucus. Il y a des gens qui ont fait un certain nombre de remarques. C'est normal, parce qu'on ne serait pas le Parti québécois sans ça. Quant à moi, je crois que c'est bien engagé pour la suite des choses.» Selon elle, ces députés critiques «restent». «Personne ne part», a-t-elle assuré.

«On a eu de très bonnes discussions. Et quant à moi, on devrait continuer à faire notre travail comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant.»

Le reportage publié par La Presse, mercredi, a eu l'effet d'un tsunami dans les rangs des élus péquistes et a cristallisé la volonté de plusieurs élus d'obtenir rapidement le départ de leur chef. Dans les coulisses, plusieurs élus confiaient leur souhait de voir Mme Marois quitter son poste très rapidement, avant le conseil général du début décembre.

En après-midi, lors d'une rencontre à huis clos, quatre députés ont, sans équivoque, réclamé le départ de Mme Marois. D'autres devaient s'ajouter en soirée.

La Presse a appris de sources sûres que la première salve est venue de députés élus depuis 2008, dans la grande région de Lanaudière, et des Laurentides, la zone d'influence naturelle de François Legault, l'ancien député péquiste de Rousseau.

Ainsi, Guillaume Tremblay (Masson), Daniel Ratthé (Blainville), André Villeneuve (Berthier) et Guy Leclair (Beauharnois) ont été les premiers à contester le leadership de Mme Marois. À la sortie, ces députés ont quitté la salle au pas de course.

Guillaume Tremblay s'est contenté de dire qu'il était «encore député du PQ». Visiblement contrariés, André Villeneuve et Daniel Ratthé se sont limités à des commentaires laconiques.

Un autre qui semblait avoir des réserves au sujet de la chef, Stéphane Bergeron, a donné l'impression de se rallier. «Mme Marois est chef du Parti québécois, elle a la confiance des membres du Parti québécois dont je suis», a-t-il dit. Paraissant soulagé, le leader parlementaire Stéphane Bédard, fidèle supporter de la chef, a lancé: «Pensez-vous qu'à un seul moment j'ai douté que Mme Marois soit la meilleure personne [pour diriger le parti]?»

Le député de Richelieu, Sylvain Simard, s'est dit «satisfait du résultat» de la réunion du caucus. «Nous sommes un parti fort qui va gagner les prochaines élections», a-t-il dit, ajoutant par la suite que ce sera «avec Mme Marois».

En dépit de l'importance du schisme, une majorité d'élus restaient derrière la chef, et l'ont applaudie bruyamment à deux ou trois reprises, durant la session à huis clos en soirée.

Altercation Gendron-Léger

À la période des questions en matinée, Pauline Marois y est allée d'une sortie passionnée contre le gouvernement Charest, mais tous ses députés, semblant embarrassés, gardaient le regard baissé sur leur pupitre. On a été témoin d'une longue conversation, sur le parquet de l'Assemblée, entre le doyen François Gendron et Nicole Léger, la whip du parti, un appui de la première heure de Mme Marois. Derrière le trône du président, en privé, l'échange s'est corsé plus tard, a confié un témoin. D'un ton impatient, exaspéré, M. Gendron a lancé à Mme Léger que Pauline Marois devait «se brancher» et dire «si elle reste ou elle s'en va!»

En après-midi, dans le but de casser les putschistes, Stéphane Bédard a fait le tour des élus pour prévenir que les mutins seraient congédiés du caucus, forcés de démissionner.

Dans les régions, les secousses ressenties à Québec ont soulevé bien des questionnements. Claude Lessard, président régional du Parti québécois en Mauricie, a comparé le PQ au Canadien de Montréal, «et quand le Canadien perd tout le temps, c'est le coach qui paye», a-t-il prévenu dans une entrevue diffusée à Radio-Canada.

Des présidents régionaux et de circonscription ont toutefois réitéré leur appui à Mme Marois lors d'entretiens avec La Presse. L'un d'entre eux a néanmoins souligné que certains de ses collègues «se posent maintenant des questions. Mais personne ne veut bouger tant que le caucus n'aura pas fait quelque chose». Le sondage CROP-La Presse, dévastateur pour le PQ, sème le doute dans l'organisation. «Avec tout ce qui s'est passé récemment, les libéraux devraient être morts. Mais on voit encore que le PQ ne monte pas.» Deux députés lui ont confié que des organisateurs de campagne sont réfractaires à l'idée de mener la prochaine bataille.