Il a 36 ans, il est sculpteur et il est l'un des artistes visuels québécois les plus reconnus sur la scène internationale. Élevé dans le quartier Côte-des-Neiges, à Montréal, David Altmejd a fait beaucoup de chemin. Aujourd'hui, ses oeuvres sont exposées partout et prisées des collectionneurs.

David Altmejd a remporté l'an dernier le prix Sobey, la récompense pour jeunes artistes la plus convoitée au pays.

Ses sculptures sont faites d'une combinaison de matériaux. « J'aime créer des tensions en associant des matériaux qu'on ne voit pas souvent ensemble, par exemple des matières artificielles comme le miroir, le verre, le plexiglas, avec des matières plus organiques comme le poil d'animaux», explique le sculpteur.

Pendant quelques années, il a beaucoup travaillé autour du personnage du loup-garou, une créature qui le fascine par son potentiel de transformation et sa double identité. C'est durant cette période, entre 2001 et 2004, que le public a surtout découvert ses oeuvres.

Depuis quelques années, il travaille à une autre figure mythique: le géant, qui lui permet d'explorer le rapport entre le corps et le paysage. «En ce moment, je crée aussi des espèces d'univers, de réseaux nerveux, d'environnements en trois dimensions à partir de fils et de chaînes en or à l'intérieur de boîtes de plexiglas», dit-il.

De la biologie à la sculpture

Quand il est entré à l'université, David Altmejd se destinait à la biologie. Mais il a vite réalisé que le langage scientifique n'était pas sa tasse de thé. «Je me suis rendu compte que ce qui m'intéressait le plus, ce n'était pas d'apprendre des codes et un langage, mais plutôt d'en inventer. Et le seul domaine où l'on encourage cela, c'est en arts.»

Il a commencé par le dessin et la peinture avant de découvrir la sculpture. « C'est en sculptant pour la première fois que j'ai compris que ce qui m'intéressait le plus, c'était de faire exister un objet dans ce monde. C'était ce que je trouvais de plus puissant.»

Il a donc obtenu un baccalauréat en arts visuels à l'UQAM avant de se rendre à New York pour faire sa maîtrise à la Columbia University.

« Pendant ma maîtrise, je me suis habitué à travailler ici, explique-t-il. Je suis devenu habile pour utiliser les ressources disponibles, trouver mes matériaux. J'ai acquis une façon de travailler propre à la ville, qui fonctionne bien. J'ai besoin d'avoir du bruit autour de moi pour pouvoir me concentrer, et New York, avec toute son activité, sa circulation, les gens partout, est une ville faite pour ça.»

Toutefois, la vie sociale et mondaine frénétique de la Grosse Pomme n'est pas pour lui. «Je ne fais pas du tout de social, dit-il. En fait, je travaille continuellement. Mais je ne le vois pas vraiment comme du travail, je n'ai pas l'impression que je suis un workaholic. L'art, ce n'est pas comme un job.»

Il ne se considère d'ailleurs pas du tout comme carriériste. «Je suis toujours extrêmement concentré sur mon travail dans l'atelier, je ne pense pas à autre chose. Ce qui s'y passe constitue 95% de mes préoccupations «, ajoute l'artiste.

Rester humble

Malgré les honneurs et les prix qu'il s'est vu décerner, David Altmejd ga rde les pieds sur terre. Il y a trois ans, il a représenté le Canada à la Biennale de Venise, l'exposition d'art contemporain la plus prestigieuse du monde. Et le prix Sobey, qu'il a remporté l'an dernier (doté d'une bourse de 50 000 $), lui a valu beaucoup d'attention médiatique.

« Le prix Sobey est une reconnaissance importante, dit-il. Cependant je sais que cela peut avoir l'air cliché , l'important, pour moi, c'était de faire partie de cet événement, parce qu'il est excitant et qu'il génère beaucoup de débats et d'activité intellectuelle. Tous les participants qui étaient là l'an dernier auraient mérité le prix. L'art, c'est tellement subjectif ! Il faut le voir avec modestie.»

Comme artiste, son but demeure de continuer à explorer et à créer. «Ma préoccupation a toujours été d'avoir l'impression de faire quelque chose de complexe qui peut générer une énergie, dit-il. Mon défi est de toujours continuer à créer quelque chose de vivant.»