Évacués depuis le 2 mai de leur résidence de la rue Perrier, à Saint-Jean-sur-Richelieu, Marcel Joly et Thérèse Trudel, âgés de plus de 80 ans, étaient de passage lundi matin dans un centre d'aide aux sinistrés afin d'obtenir des coupons de nourriture. Cette aide offerte par la Croix-Rouge est une bien mince consolation pour ces sinistrés, qui n'en peuvent plus de voir l'eau de la rivière Richelieu monter et descendre.



Après avoir baissé de 36 cm depuis quelques jours, le niveau de la rivière a augmenté à nouveau de 8 cm, lundi. Pour le plus grand malheur des 3000 familles touchées par les pires inondations à survenir depuis 150 ans dans la région, une nouvelle hausse de 10 à 20 cm est attendue d'ici à minuit ce soir. Un faible vent du sud pourrait aussi commencer à souffler dès jeudi.

«Si la tendance se maintient, le niveau de l'eau reviendra cette semaine aux sommets atteints le 6 mai», a annoncé lundi après-midi le directeur régional de la Sécurité publique de la Montérégie, Yvan Leroux.

«On a le moral à plat. On n'en peut plus», dit M. Joly. «Ça ne finit pas de finir», ajoute Mme Trudel.

Deux fois plus de pluieque la normale

Depuis le 14 avril, 230 mm de pluie se sont abattus sur le sud-est du Québec, le double de la normale à ce temps-ci de l'année. Seulement depuis vendredi, 50 mm de pluie sont tombés en Montérégie. «Le lac Champlain et la rivière Richelieu forment un grand bassin. Les effets de l'eau tombée au cours des derniers jours vont commencer à se faire sentir cette semaine», a expliqué M. Leroux, qui presse les sinistrés à laisser en place les sacs de sable qui protègent leur maison.

Selon M. Leroux, il est encore trop tôt pour dire si le niveau de l'eau pourrait dépasser les sommets déjà atteints et entraîner de nouvelles évacuations. En attendant, 600 soldats des Forces canadiennes restent sur place pour prêter main-forte à la population.

Des évacués... évacués

En plus d'être angoissées par les prévisions météorologiques, une trentaine de familles hébergées à l'hôtel Holiday Inn de Saint-Jean-sur-Richelieu ont eu leur lot d'émotions, lundi, quand elles ont su qu'elles devraient de nouveau déménager.

L'hôtel a dû respecter des réservations faites depuis très longtemps par des participants à une compétition de Génies en herbe. «On essaie de garder les gens le plus près possible de leur domicile, mais on a des contraintes. On a dû déplacer une trentaine de familles à l'hôtel Best Western de Brossard», a expliqué la porte-parole de la Croix-Rouge, Myrian Marotte.

Pour plusieurs, cette situation était inacceptable. «Il faut retourner à la maison tous les jours, pour nourrir les chats, entre autres choses. Ça va être bien plus compliqué», déplorait lundi matin Nancy Hébert, de Saint-Blaise. Son conjoint, Éric Galipeau, et elle étaient hébergés depuis plus d'une semaine au Holiday Inn avec leur fils de 13 ans.

Leur fils va à l'école à Saint-Jean-sur-Richelieu. «Si on va à Brossard, il n'ira pas à l'école pendant un bout de temps. Il a le syndrome de la Tourette et n'aime pas le changement. Il vit trop de stress depuis plusieurs jours», a dit M. Galipeau.

Jean Gladu était lui aussi stressé à l'idée de devoir aller à Brossard avec sa femme et sa fille de 1 an. Ce résidant de Saint-Paul-de-l'Île-aux-Noix a dû évacuer sa maison le 2 mai. «Ma maison est une perte totale. L'attente, c'est déjà stressant. Penser devoir aller à Brossard, c'est encore pire.»

En fin de matinée, les familles Galipeau et Gladu ont appris qu'elles pourraient rester à Saint-Jean-sur-Richelieu parce que leur situation est particulière. Mme Marotte ajoute que deux autres familles seront aussi hébergées à leur demande à Saint-Bernard-de-Lacolle. Mais une trentaine d'autres ont dû prendre le chemin de Brossard. «On sait que ce n'est pas l'idéal. On comprend les sinistrés. Ils sont à bout. On va tout faire pour leur faciliter la vie», a dit Mme Marotte. Un service de navette sera offert.