Réembauché comme directeur général par l'administration Vaillancourt moins de deux ans après sa démission de ce même poste pour diriger une firme faisant affaire avec la Ville, Gaétan Turbide a vu son salaire bondir au passage.

M. Turbide a retrouvé son bureau de l'hôtel de ville le 20 septembre. Son embauche a été officialisée le 25 août, d'abord par une résolution du comité exécutif tenu à huis clos le matin, puis par un vote à l'unanimité du conseil municipal. C'est le maire Vaillancourt qui l'a proposée, appuyé par le conseiller Benoît Fradet.

Ceux-ci se sont appuyés sur un rapport du service des ressources humaines de la Ville - obtenu par La Presse grâce à la Loi sur l'accès à l'information -, qui «propose et recommande» la nomination de Gaétan Turbide «au salaire de 250 000$».

Par comparaison, le DG de la Ville de Québec, deuxième en importance dans la province après Montréal, est de 162 000$, soit 88 000$ de moins. Mais, ce chiffre ne comprend pas les bonifications.

Un écart justifié aux yeux de Marc DeBlois, porte-parole de la Ville de Laval: «C'est une excellente nouvelle que quelqu'un comme Gaétan Turbide délaisse le privé, et c'est un salaire à la hauteur de ses compétences.»

Un autre document de la direction générale évoque une recommandation de la firme Raymond Chabot et vante «l'expérience» et les «qualités de gestionnaire» de M. Turbide.

La convention d'une durée de cinq ans signée par la Ville et Gaétan Turbide lors de sa première embauche le 7 février 2006, aussi obtenue grâce à la Loi sur l'accès à l'information, prévoyait un salaire de 200 000$. Une clause stipulait le versement d'une indemnité de départ «équivalente à 12 mois de salaire» au cas où Laval ne renouvellerait pas son contrat.

«Une excellente occasion d'affaires»

Gaétan Turbide avait quitté ses fonctions prématurément le 15 octobre 2008 pour saisir «une excellente occasion d'affaires», pour reprendre les propos du maire Vaillancourt à l'époque. Aucune «somme à titre d'allocation de départ» ne lui a été versée, affirme toutefois le greffier Guy Collard dans une correspondance adressée à La Presse. Il avait été remplacé par Richard Fleury.

Quelques mois plus tard, Gaétan Turbide et l'homme d'affaires Benoît Galland prenaient le contrôle de la firme Aqua-Rehab par l'intermédiaire du fonds Octopus.

Cette entreprise spécialisée dans la réfection des conduites d'eau obtenait déjà de gros contrats à Laval. Mais à l'hôtel de ville, on disait ne pas y voir de problème puisque Gaétan Turbide n'intervenait pas, affirmait-on, dans la gestion de la firme.

Or Gaétan Turbide est devenu par la suite président d'Aqua-Rehab. Six jours après sa réembauche comme DG, il s'est retiré d'une réunion du comité exécutif, qui a accordé un mandat à cette firme.

M. Turbide a aussi occupé un poste au sein d'une autre firme de Benoît Galland, Garival. Celle-ci a obtenu, notamment en 2003, des contrats importants à la Société de transport de Laval, dirigée alors par le même Gaétan Turbide.

Quant à Richard Fleury, il a pris sa retraite pour des raisons de santé le 1er septembre. Il a touché une prime de départ de 228 000$, soit l'équivalent de son salaire annuel.

À la Ville de Montréal, le salaire du DG Louis Roquet est de 300 000$, contre 182 800$ à Gatineau et 191 000$ à Longueuil.

Un autre transfuge

Par ailleurs, un des adjoints actuels de M. Turbide n'est autre que Jean Roberge. Embauché en avril 2008, celui-ci a longtemps présidé la firme d'ingénierie Équation Groupe Conseil, bénéficiaire aussi de gros contrats à Laval.

La Presse a constaté qu'il est toujours inscrit comme président sur le site d'Industrie Canada, ceci après une mise à jour datée du 27 mars 2009. Ce qui surprend Marc DeBlois: «M. Roberge a liquidé ses intérêts le 1er juillet 2007 et est resté chez lui jusqu'à son embauche en 2008. Aucun membre de sa famille ne travaille au sein de cette compagnie.»

- Avec la collaboration de William Leclerc