La Presse a analysé en détail la transaction de 2004 sur des terres situées à l'ouest du domaine Le Bergerac, près du boulevard Curé-Labelle. Pourquoi la Ville a-t-elle vendu sa terre pour 1,20$ le pied carré alors qu'au même moment, un propriétaire voisin vendait la sienne pour 2,10$?

Cette terre de la Ville faisait près de 1 million de pieds carrés et a été vendue sans appel d'offres.

Dans une résolution, le comité exécutif de la Ville affirme avoir suivi les recommandations de ses évaluateurs. Au cours d'une rencontre, ceux-ci nous ont dit que le rapport justifiant cette évaluation n'avait pas été conservé. Trois jours plus tard, le relationniste de la Ville nous a dit qu'il n'y en avait jamais eu.

L'évaluateur en chef, René Lemire, a donné trois raisons pour expliquer l'écart de prix:

1. La présence d'un ruisseau

Le ruisseau Papineau traversait le terrain de la Ville dans le sens de la largeur, ce qui aurait constitué une contrainte majeure. «Il est interdit de construire sur 10 mètres de part et d'autre de ce ruisseau», a dit M. Lemire. Vérification faite, le schéma d'aménagement de la Ville de Laval n'accorde aucune protection aux rives des cours d'eau, à l'exception des rivières des Prairies et des Mille-Îles.

De leur côté, les terrains du propriétaire privé vendus 2,10$ le pied carré étaient constellés de milieux humides, selon une carte publiée sur le site internet de la Ville. L'un de ces milieux, grand comme deux terrains de football, avait une valeur écologique élevée. Il a fallu obtenir une autorisation du ministère de l'Environnement pour les remblayer.

Est-ce que cela ne représentait pas une contrainte aussi importante que le ruisseau? Réponse de la Ville: «En 2003, les milieux humides ne constituaient pas un élément significatif aux fins d'évaluation.» Pourtant, un document du Ministère concernant un autre projet de M. Borsellino (Islemere) montre qu'en 2003, la Ville était bien consciente de la question des milieux humides.

2. Le terrain de la Ville était en partie enclavé

M. Lemire a dit que la construction du domaine Le Bergerac III a commencé d'ouest en est, à partir du boulevard Curé-Labelle. Selon lui, le terrain de la Ville était situé plus loin des services. Il allait donc être le dernier à être construit, ce qui lui aurait enlevé beaucoup de valeur, a-t-il dit. Vérification faite, la construction a commencé à partir du boulevard Saint-Elzéar, au sud, à proximité du terrain de la Ville.

3. Le financement

René Lemire a fait valoir que le mode de financement explique en partie l'écart de prix. Le propriétaire privé a accepté de se faire payer en cinq ans sans imposer d'intérêts. Le prix de la transaction qui peut être comparé à celui de la Ville est donc de 1,87$ le pied carré plutôt que 2,10$, a-t-il dit.

Pas de liens particuliers

Par ailleurs, le porte-parole du maire, Jean-Maurice Duddin, a dit que le maire Gilles Vaillancourt et l'acheteur du terrain, M. Borsellino, n'avaient aucune «relation d'amitié particulière». M. Duddin a précisé que la Fondation Marcel-Vaillancourt pour l'enfance lavalloise n'est pas la fondation du maire, mais celle de son défunt père.

La mère, deux des frères et une des soeurs de Gilles Vaillancourt siègent au conseil d'administration de l'organisme, mais pas le maire. M. Borsellino fait partie des 26 patrons d'honneur de la Fondation, ajoute M. Duddin. Ces patrons sont généralement des entrepreneurs connus de Laval.