Parce qu'il s'estime victime d'une atteinte à sa réputation et assimilé à un «criminel», l'entrepreneur Normand Trudel réclame 525 000$ à l'avocat Stéphane Handfield. Dans une seconde procédure, il réclame près de 400 000$ au député péquiste de Masson Guillaume Tremblay.

Au coeur du litige, en ce qui concerne Stéphane Handfield, des commentaires jugés diffamatoires sur le coût du déneigement des bornes d'incendie à Mascouche, partie intégrante d'un contrat global octroyé au demandeur par l'administration du maire Richard Marcotte.

Dans la requête déposée le 27 juin en Cour supérieure visant Stéphane Handfield, et obtenue par La Presse, Normand Trudel, propriétaire de la firme TEM, se présente comme «un homme d'affaires bien connu dans le milieu de la construction» qui «au cours des années [...] s'est donc bâti une solide réputation à titre de citoyen et d'homme d'affaires dans la région Laurentides/Lanaudière». Il est aussi partenaire de Tony Accurso dans la firme de décontamination Écolosol, établie à Mascouche.

L'entrepreneur reconnaît s'être «impliqué» «au sein de différents partis politiques [...] tant pour le financement [...] et les levées de fonds». Normand Trudel a organisé en 2008, à son domicile de Terrebonne, un cocktail-bénéfice en faveur du PLQ et en présence de Jean Charest.

L'entrepreneur reproche donc à Me Handfield, qui réside à Mascouche, d'avoir «probablement» flairé «l'occasion de se faire du capital politique» à la suite de la publication par La Presse, en janvier dernier, d'une enquête sur le contrat de déneigement des rues, trottoirs et bornes d'incendie, accordé en 2007 à TEM pour cinq saisons hivernales.

Rappelons que dans sa soumission, la firme TEM avait inscrit une somme de 650$ par borne et par hiver, ce qui semblait bien au dessus des tarifs moyens en vigueur dans d'autres villes de la province. Mais peu après avoir emporté le contrat global de déneigement, TEM avait sous-traité la portion bornes d'incendie à un autre entrepreneur pour une somme estimée à environ moitié moins chère.

Selon les termes de la requête, Me Handfield aurait entre autres déclaré «sur les ondes d'une radio populaire» le jour de la publication de cette enquête que «Normand Trudel empoche presque 215 000$ par an, soit près de 1 million de dollars, rien qu'en restant assis sur ses fesses». Me Handfield aurait aussi dénoncé un système «semblable à celui des commandites» à Mascouche, lit-on encore dans le document déposé en Cour.

«L'utilisation de cette référence au scandale des commandites était volontaire et se voulait une attaque directe à la probité du demandeur, M. Trudel et de ses entreprises», soutient Normand Trudel. Il croit ainsi avoir été assimilé «à un criminel ayant comploté, manigancé et fraudé la municipalité de Mascouche».

Il est aussi reproché à Me Handfield de s'être servir de son «titre professionnel pour ajouter du poids à son analyse de l'attribution des contrats municipaux». Plus, de «s'être attribué une légitimité dans le paysage politique de Mascouche et a ainsi moussé sa présence sur la scène politique locale».

Il est aussi intéressant de noter que Normand Trudel affirme dans sa requête que les déclarations de Me Handfield «avaient notamment comme objectif de placer une pression politique importante sur le maire, M. Marcotte, afin qu'il prenne position et démissionne». Ou bien que Me Handfield avait «espoir que la pression du public force le maire de Mascouche à démissionner».

D'autre part, l'hebdomadaire Le Trait d'union a rapporté jeudi sur son site internet que Normand Trudel aurait déposé une autre requête visant cette fois le député péquiste de Masson Guillaume Tremblay. Le montant exact n'a pas été divulgué mais il serait inférieur aux 525 000$ réclamés à Me Handfield.

Le député avait reçu fin janvier deux mises en demeure totalisant 225 000$ de Normand Trudel, de TEM et Ecolosol. Elles concernaient des propos que le député aurait tenus à Radio-Canada sur Normand Trudel, et d'autres concernant l'entreprise Ecolosol, firme au sein de laquelle Tony Accurso et Normand Trudel sont partenaires.

Joint par La Presse, Me Handfield dit avoir donné instruction à ses avocats «d'utiliser tous les recours appropriés». Le bureau de Guillaume Tremblay s'est refusé à tout commentaire.

Normand Trudel n'était pas joignable jeudi, a-t-on indiqué à son bureau.