Gilles Duceppe et ses troupes ont lancé une attaque verbale d'une rare violence contre Stephen Harper, hier, au cours d'un rassemblement de 2000 personnes à Saint-Hyacinthe.

«Tricheur», «arrogant», «rétrograde», «menteur», le chef du Bloc québécois n'a pas ménagé les épithètes contre le chef conservateur. Il a attaqué son bilan en matière de développement régional, lui a reproché de «saboter» le protocole de Kyoto et a fustigé son parti pris aux Communes pour la guerre en Irak.

 

«Une majorité à Stephen Harper, c'est courir le risque de se retrouver dans une guerre dont on ne veut pas, a-t-il déclaré. On ne peut pas offrir une majorité à un homme qui manque si cruellement de jugement et de sens moral.»

Gilles Duceppe a voulu amorcer la dernière ligne droite de sa campagne avec une démonstration de force. Il a pris la parole dans la plus importante assemblée organisée par un parti depuis le début de la campagne.

Devant une foule survoltée qui comprenait la plupart de ses candidats, des centaines de militants et des députés du Parti québécois, le chef du Bloc a accusé le Parti conservateur et son chef d'être «prêts à détruire l'environnement et à affaiblir l'économie québécoise pour protéger les intérêts des grandes pétrolières».

Il a en outre dénoncé ce qu'il appelle le «mépris envers les aînés» de l'actuel gouvernement, et il a abordé le controversé projet de loi C-484, que plusieurs ont interprété comme une manière détournée de recriminaliser l'avortement. «Une majorité conservatrice, a-t-il clamé, c'est un danger sérieux de recul pour les femmes.»

Dans son discours d'une demi-heure, il a prononcé 61 fois le nom du premier ministre sortant. Il n'a pas fait la moindre allusion à Stéphane Dion ni à Jack Layton.

M. Duceppe n'a pas été le seul à tomber à bras raccourcis sur son principal adversaire. La sociologue Louise Vandelac a aussi pris la parole pour qualifier le gouvernement conservateur d'«obscurantiste». Le maire de Huntingdon, Stéphane Gendron, l'a pour sa part accusé d'avoir gardé les bras croisés tandis que les déboires de l'industrie textile entraînaient des centaines de mises à pied dans sa ville. Le prêtre et ancien député Raymond Gravel a ensuite qualifié le gouvernement Harper de «sans-coeur».

En point de presse après le rassemblement, M. Duceppe s'est défendu de mener une campagne de peur et d'avoir recours à des attaques personnelles pour contrer les conservateurs. «Tout cela a rapport à des faits concrets, a-t-il dit. Quand vous copiez un discours, comment appelez-vous ça? C'est de la tricherie.»

«Langage haineux»

Le chef bloquiste et ses partisans ont tenu ces propos pendant que Stephen Harper profitait d'une journée de congé. C'est le ministre responsable de la région de Montréal, Michael Fortier, qui a donné la réplique à Gilles Duceppe, qu'il a accusé d'avoir «dépassé les bornes».

«Il est tombé dans un langage haineux, a-t-il dénoncé. C'est au-delà de la peur: ce sont des attaques personnelles qui n'ont pas leur place en politique.»

Le candidat dans Vaudreuil-Soulanges croit que les électeurs de la province jugeront sévèrement le leader du Bloc pour cette virulente sortie.

Gilles Duceppe reprendra la route ce matin pour visiter des circonscriptions chaudement disputées. Après un passage en Estrie, il se dirigera vers Trois-Rivières, où les conservateurs ont bon espoir de faire élire l'ex-présidente de la chambre de commerce, Claude Durand. Il se rendra aussi à Québec et au Saguenay, où sa candidate Chantale Bouchard menace le ministre Jean-Pierre Blackburn dans Jonquière-Alma.