Même si Michael Ignatieff rejette l'idée d'une coalition PLC-NPD-Bloc, Gilles Duceppe, lui, ne ferme pas la porte. «Je regarderai quelle sera la situation au lendemain de l'élection. (...) On fera ce qui est dans le meilleur intérêt du Québec», a-t-il annoncé ce matin au lancement de sa campagne, dans un hôtel du Vieux-Montréal.

Le Bloc répète qu'il ne participerait pas techniquement à un gouvernement de coalition. Il se contenterait plutôt de lui donner son appui.

Alors que les conservateurs mènent avec une bonne avance dans les sondages, Stephen Harper soutient que les Canadiens devront choisir dans l'urne entre deux options: un gouvernement majoritaire conservateur ou une coalition «broche à foin» avec le Bloc, un parti qui «veut briser le pays».

M. Harper a assuré ce matin qu'il n'avait jamais songé à former une telle coalition en 2004 pour défaire le gouvernement libéral de Paul Martin. «Il a menti», a répondu M. Duceppe en brandissant une lettre signée par M. Harper lui-même.

Cette lettre était cosignée par MM. Duceppe et Layton. Elle s'adresse au Gouverneur général de l'époque, Adrienne Clarkson. L'opposition lui explique que si la chambre devait être dissoute, elle devrait «examiner toutes ses options» (traduction libre) avant de déclencher des élections. Une de ces options, non mentionnée dans la lettre, mais bien connue de tous les observateurs politiques, était que le Gouverneur propose  au chef de l'opposition officielle de l'époque, M. Harper, de former un gouvernement de coalition.

«Moi, je ne réécris pas l'histoire, ça se vérifie, ce que je (dis)», a-t-il ajouté.

Les trois chefs de l'opposition s'étaient rencontrés en septembre 2004 à l'Hôtel Delta de Montréal. «Je m'en rappelle comme si c'était hier», racontait ce matin M. Duceppe.

Les chefs s'étaient notamment entendus pour changer la composition des comités parlementaires. Après la rencontre, ils avaient présenté leur accord au premier ministre Paul Martin. Comme ce dernier était minoritaire, il avait dû accepter.

M. Duceppe a qualifié cette rencontre à l'Hôtel Delta «d'une des plus importantes que j'ai eue, en ce qui concerne la démocratie parlementaire».

Les conservateurs ont utilisé le Bloc comme épouvantail, en accusant les libéraux de vouloir s'associer à un parti qui veut «briser le pays». Cela a presque fait sourire M. Duceppe, qui a rappelé les discussions de 2004. «Quand ils ont besoin de nous, ils voudraient tous être dans le même lit, mais ils ne veulent pas nous marier», a-t-il ironisé.

Système organisé de «mensonge et tromperie»

Avant même d'attaquer les politiques des conservateurs, M. Duceppe a attaqué l'intégrité de leur chef.

Les «mensonges» de M. Harper sur la coalition de 2004 démontreraient que M. Harper n'est «pas digne» du mandat majoritaire que pourraient lui accorder les Canadiens.

Il accuse M. Harper d'avoir «érigé le mensonge et la tromperie en système de gouvernement» et de n'avoir «que faire de la vérité». M. Duceppe a rappelé entre autres la récente condamnation pour outrage au Parlement -une première dans l'histoire- et les poursuites d'Élections Canada pour un système «prémédité» de fraudes électorales. Autre «mensonge» selon le Bloc: M. Harper prétend ne pas vouloir d'élections, mais il a orchestré cet hiver une campagne publicitaire de 26 millions, payée avec des fonds publics.

«Stephen Harper a tout fait pour provoquer des élections. Le chef conservateur veut obtenir une majorité pour imposer son idéologie sans aucune limite», se plaint M. Duceppe.

Il accuse même les conservateurs d'avoir «conçu un budget pour qu'aucun parti ne puisse l'appuyer».

Le Bloc réduit la politique conservatrice à un «assaut contre les démunis, les femmes et la démocratie».

Essaie-t-il de transformer Stephen Harper en Bonhomme Sept Heures? «Je dis la vérité», se défend-il.