L'ère Chrétien, les beaux jours du Natural governing party, tout cela semblait bien loin, mardi soir au Théâtre Olympia, presque rempli pour l'investiture de Gilles Duceppe dans Laurier-Sainte-Marie.

Dans les années 90, les libéraux étaient l'ennemi numéro 1 du Bloc. Aujourd'hui, le Bloc ne les remarque même plus sur le chemin.

Le discours du chef le démontrait mardi. M. Duceppe propose avant tout de «barrer la route» aux conservateurs, au seuil d'une majorité selon les derniers sondages. «Une majorité conservatrice, c'est un danger pour le Québec. Si cela arrivait, les conservateurs n'auraient plus aucune retenue. Ils seraient libres d'imposer sans frein des politiques idéologiques contraires à nos intérêts et nos valeurs», a-t-il lancé.

Après avoir embrassé un bébé devant les caméras au son d'Awikatchikaën des Cowboys Fringants, le chef a prononcé un long discours de 20 minutes.

On n'a pas entendu une seule fois le nom «Ignatieff». Il a seulement fait référence au NPD et à son «ami» Jack Layton dans un court passage. Comme d'habitude, M. Duceppe a soutenu que le chef du NPD ne pourrait jamais devenir premier ministre.

Les publicités et le slogan de sa campagne n'utilisent pas les mots «souveraineté» ni «indépendance». M. Duceppe a répliqué aux critiques dès le début de son discours. «Je dois vous faire un aveu: je suis... souverainiste! Toutes les candidates et tous les candidats du Bloc québécois sont souverainistes. On sait ce qu'on a à faire.»

Par la suite, le thème est réapparu une seule fois, quand il a évoqué la mémoire de Pierre Bourgault pour dire que le Bloc voulait «un pays».

M. Duceppe a fustigé les propos de l'ex-sénateur conservateur Larry Smith contre le français. La foule a hué l'ex-président des Alouettes.

Le chef du Bloc se plaint que Stephen Harper diabolise l'opposition. Mais il ne brosse pas un portrait très nuancé de son rival. C'est sur les questions d'intégrité que le gouvernement Harper a perdu la confiance de la Chambre et c'est aussi sur cela que M. Duceppe l'a attaqué mardi soir.

Les conservateurs seraient «des gens qui mentent (...) de façon délibérée, préméditée».

Pendant que Stephen Harper assurait ne pas vouloir d'élections, il dépensait environ 25 millions en fonds publics pour des publicités partisanes cet hiver, a rappelé le chef du Bloc.

Autres récriminations: les propos, contradictoires selon lui, du premier ministre sur la légitimité d'un gouvernement de coalition, le «système prémédité» de fraude électorale des conservateurs dénoncé par Élections Canada, et les enquêtes en cours sur un ex-conseiller de Stephen Harper et un autre de Christian Paradis (Sébastien Togneri).

Le chef du Bloc a aussi accusé M. Harper de museler les journalistes. Samedi dernier à Québec, un reporter aurait été «repoussé comme un malpropre», a raillé M. Duceppe.

La chanson de campagne du Bloc a été composée par Mike Sawatzky, un Cri d'origine saskatchewanaise et ex-membre des Colocs. Les textes reprennent simplement des slogans du parti.

M. Duceppe était introduit par Martin Laroche, candidat dans Honoré-Mercier et comédien de François en série.