Le chef conservateur Stephen Harper n'a pas semblé s'émouvoir de la position unanime de l'Assemblée nationale condamnant sa décision d'offrir un coup de main au projet hydroélectrique du Bas-Churchill, à Terre-Neuve-et-Labrador.

Au lendemain de l'adoption par tous les députés du Québec d'une motion pour dénoncer l'aide de financement promise par les conservateurs au projet du Bas-Churchill, le chef conservateur n'a pas changé de discours, jeudi.

Il s'agit d'un projet pour combattre les changements climatiques, un objectif qui est pourtant partagé par le gouvernement du Québec, a plaidé Stephen Harper.

Or, tant le premier ministre du Québec, Jean Charest, que celui de l'Ontario, Dalton McGuinty, ont fort mal accueilli la garantie de prêt de quelque 4 milliards de dollars promise par M. Harper la semaine dernière.

Questionné à savoir si les positions d'Ottawa et de Québec étaient redevenues de plus en plus divergentes au point d'être irréconciliables, M. Harper a simplement réitéré que l'aide qu'il offrirait à Terre-Neuve serait tout autant disponible pour une autre province.

«J'ai dit que quand on fait un tel investissement comme ça, on va faire de tels investissements équitables à travers le pays, y compris au Québec. Mais (le Bas-Churchill) c'est une question pour le développement du Canada atlantique», a-t-il soutenu.

Ce n'est pas la première fois que l'Assemblée nationale fait front commun pour s'opposer à une décision du gouvernement fédéral sous la direction de M. Harper.

Les députés de la Belle Province s'étaient notamment unis pour condamner la volonté des conservateurs d'abolir le registre des armes d'épaule, un projet toujours envisagé par Stephen Harper. Celui-ci a confirmé cette semaine qu'il mettra de l'avant un projet de loi en ce sens s'il est élu majoritaire.

Et si le chef libéral, Michael Ignatieff, s'est engagé à reconstruire d'ici dix ans le pont Champlain, qui relie Montréal et sa rive sud, Stephen Harper ne s'est toujours pas prononcé sur ses intentions.

En point de presse jeudi, en banlieue de Toronto, il s'est contenté de rappeler qu'il avait offert des fonds pour assurer que le pont soit «sécuritaire».

«Nous investissons régulièrement dans ce pont», s'est-il défendu, semblant ainsi laisser entendre qu'il refusait de faire la même promesse que son homologue libéral.

Michael Ignatieff n'a cependant pas été en mesure de préciser la facture qui pourrait accompagner la reconstruction du pont Champlain, ni où un éventuel gouvernement libéral trouverait les fonds nécessaires.

Pour le moment, les libéraux comptent sur l'argent du fonds fédéral sur les infrastructures pour entamer dès 2011 les études nécessaires. Le prochain plan financier du Parti libéral, à compter de 2014, prévoirait en outre l'enveloppe nécessaire, grâce aux économies réalisées en mettant de côté certaines priorités des conservateurs que ne partagent pas les libéraux, a indiqué M. Ignatieff.

«Je suis confiant qu'avec des choix clairs (...) nous aurons les moyens de faire les investissements après 2014 pour le pont et pour d'autres priorités des Canadiens», a argué le chef libéral, en conférence de presse à Laval.

M. Harper passera trois jours cette semaine dans la grande région de Toronto, qui représente un terrain fertile en vue du scrutin du 2 mai, où les conservateurs espèrent décrocher quelques sièges.

Selon certains sondages, ces sièges pourraient d'ailleurs compenser pour ceux qu'ils risqueraient de perdre au Québec.

En consacrant une bonne part de sa deuxième semaine de campagne au sud de l'Ontario, l'équipe de M. Harper semble maintenant y miser davantage que sur le Québec, même si le premier sortant a refusé de commenter sur ce sujet en point de presse.

Stephen Harper a par ailleurs poursuivi ses annonces ciblées, qui sont conditionnelles à la fin du déficit budgétaire.

Le chef conservateur s'est engagé, jeudi matin, à doubler le montant qu'il est possible de placer dans les Comptes d'épargne libre d'impôt (CELI), dont le plafond est pour le moment fixé à 5000 $.

Mais comme les dernières annonces du Parti conservateur dans le cadre de la campagne électorale, la mesure annoncée par Stephen Harper jeudi ne serait mise en oeuvre qu'une fois le budget équilibré. Les conservateurs prévoient éponger leur déficit record en 2015-2016.

Un tel délai a fait bondir, encore une fois, ses adversaires.

«Encore une fois, c'est une proposition hypothétique parce qu'on doit attendre plusieurs années pour voir les résultats de son engagement. Nous, nous sommes en train, dans cette campagne électorale, de proposer des initiatives qui peuvent commencer dès maintenant», a lancé, à l'instar du leader libéral, le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jack Layton, qui se trouvait à Surrey, en Colombie-Britannique.

Les conservateurs estiment que plus de 4,7 millions de Canadiens auraient choisi de se prévaloir de cet outil d'épargne, ce qui représente des placements d'une valeur de 17,9 milliards.