Même si le NPD essayait de baisser les attentes, il misait beaucoup sur son rassemblement à Montréal cet après-midi, son premier depuis les sondages qui le placent désormais devant le Bloc. Et le parti a réussi à organiser son plus gros rassemblement depuis le début de la campagne, qui a galvanisé ses bruyants partisans.

Le NPD avait choisi la même salle que celle de l'investiture de Gilles Duceppe : l'Olympia. Une salle située à trois coins de rue du local du chef du Bloc. Une façon de défier M. Duceppe ? « Non, pas du tout, on aimait la salle », a-t-il prétendu.

Le NPD avait acheté des publicités entre autres dans le Voir et le Métro pour annoncer l'événement. Il a presque rempli l'Olympia, avec plus de 1200 militants (selon le décompte électronique à l'entrée du personnel de la salle). Soit encore plus que pour l'investiture de M. Duceppe, et avec une foule au moins aussi exubérante.

Le NPD avait même déplacé la majorité de ses candidats dans la province - 41 - pour l'occasion. Il s'agissait du ralliement le plus important du NPD au pays depuis au moins les débats des chefs. Le plus gros aussi au Québec, à égalité peut être seulement avec celui des libéraux à la Tohu en début de campagne. Pour la première fois, le NPD avait aussi installé des écrans géants pour présenter des publicités du parti.

M. Layton était précédé sur scène par deux groupes : un trio jazz montréalais qui chantait en anglais et un quatuor de Gatineau au nom de circonstance, Cracker Jack.

Contrer le cynisme et le vote stratégique

Désormais attaqué de toutes parts, Jack Layton a laissé les tomates voler pour mieux se concentrer sur ses politiques et son nouvel ennemi : l'apathie. « Nous osons regarder le cynisme droit dans les yeux », a-t-il lancé, une phrase qu'il ne prononçait pas dans ses discours précédents dans la campagne.

M. Layton craint que ses appuis ne se concrétisent pas le 2 mai à cause du vote stratégique. Et aussi à cause de l'abstention - un choix plus populaire aux dernières élections que n'importe quel autre parti. La menace est d'autant plus grande que les jeunes, qui sont particulièrement attirés par le NPD, votent en moins grande proportion.

M. Layton a repris son vieux refrain du changement. Sa candidate dans Gatineau, Françoise Boivin, avait répété la même chose avant de le présenter. « Les autres partis n'ont rien de positif à offrir. Ils vont seulement vous dire pour qui voter et pour qui ne pas voter. Les seuls à offrir une vision positive pour l'avenir, c'est Jack Layton et le NPD. Et c'est la chose qui dérange le plus nos adversaires », a-t-elle lancé à la jeune foule.

Le NPD a laissé à son député le plus pugnace, Thomas Mulcair, le soin de présenter les nouvelles « publicités d'attaques ».

Incapable de nommer plus de six candidats du Québec

M. Layton est accusé par ses adversaires de manquer de candidats de qualité au Québec. Depuis le début de la campagne, il s'en défend en vantant toujours les mêmes six noms: les anciens libéraux Thomas Mulcair (Outremont) et Françoise Boivin (Gatineau) ainsi que Nycole Turmel (Hull-Aylmer), Roméo Saganash (Abitibi-Baie-James-Nunavik-Eeyou), Alexandre Boulerice (Rosemont-La Petite Patrie) et Tyrone Benskin (Jeanne-Le Ber).

Peut-il en nommer quelques-uns dans les 69 autres circonscriptions du Québec?

« On a des gens qui ont travaillé dans les syndicats, dans les arts, on a quelques étudiants. Certains nous critiquent d'avoir des étudiants comme candidats, mais nous avons la plus jeune femme à la Chambre des communes, Niki Ashton (au Manitoba)», a-t-il répondu.

Il n'a pas nommé d'autres noms. « Il y a un grand nombre de circonscriptions au Québec. Je pourrais lire tout la liste si vous voulez, mais moi, je suis très content de mon équipe, non seulement au Québec, mais aussi ailleurs au Canada. On a une équipe très expérimentée avec beaucoup à offrir », a-t-il expliqué. Il a ajouté : « Je suis un homme un peu plus vieux maintenant, j'ai parfois besoin d'une feuille pour nommer 308 candidats. Je n'entrerai pas dans ce jeu-là. »

Sur 75 circonscriptions au Québec, le NPD compte 12 locaux électoraux.

Plafond d'émission : pas de risque financier, dit Layton

Dans sa plateforme, le NPD promet une dizaine de projets en infrastructures et énergies vertes. Ils coûteraient un total de 3,485 milliards pour l'année prochaine. Ils seraient financés par la vente de crédits d'émission, qui rapporterait 3,6 milliards, selon les calculs du NPD.

Or, aucun marché de vente de crédits n'est encore en place au Canada. Même si les libéraux partagent l'objectif du NPD, ils jugent son échéancier irréaliste. Le PLC ne croit pas qu'un gouvernement fédéral puisse voter les lois, négocier avec les provinces et mettre en place le marché en moins de 11 mois. Ils rappellent que l'Union européenne a pris plusieurs années avant de compléter le processus.

« Mais des États aux États-Unis ont déjà un programme en marche. On n'aurait qu'à le joindre », a rétorqué M. Layton, en référence au Western Climate Initiative, à laquelle participent entre autres la Californie et le Québec.

En fait, même si ce marché est en gestation depuis quelques années, il n'est pas encore opérationnel. Cela prouve que l'échéancier du NPD ne serait pas crédible, soutiennent les libéraux.

M. Layton réplique que son pari n'est pas risqué. « Nous avons calibré notre budget pour que les revenus de la vente de permis soient utilisés pour financer nos projets environnementaux. On investira seulement l'argent récolté par la vente de permis. Il n'y a pas de problème fiscal. Il y a seulement une opportunité », a-t-il répondu. Si le marché n'est pas lancé avant la fin 2011-12, les projets environnementaux seront donc tout simplement retardés.