Michael Ignatieff fait appel à la «colère» de quelque 60% des électeurs contre le «régime Harper» pour attirer le vote vers ce qu'il désigne comme une option libérale bien ancrée au «centre» du spectre politique depuis la création du Canada.

Dans un discours prononcé à Vancouver lundi soir et dans des nouvelles publicités négatives diffusées au cours des derniers jours, le chef libéral hausse le ton. L'objectif: tenter de freiner la montée du NPD dans les sondages et convaincre les électeurs de remplacer le gouvernement Harper par un gouvernement libéral.

«Avec six jours à faire dans cette campagne, il est temps pour un peu de colère justifiée, a-t-il exhorté lors de sa dernière assemblée publique de la campagne, énumérant une longue liste de critiques adressées au gouvernement Harper. Il y a un certain type d'indignation canadienne silencieuse dont nous avons vraiment besoin maintenant.»

«Il est temps de se lever debout, a-t-il ajouté. Après le 2 mai, il sera trop tard.»

En point de presse mardi matin, il a présenté son parti comme la véritable option du centre au Canada. «Ce pays a été gouverné du centre pour 140 ans. Et c'est pourquoi les Canadiens ont donné leur confiance au Parti libéral. Les Canadiens ne veulent pas un gouvernement de la gauche. Ils ne veulent pas un gouvernement de la droite. Ils veulent un gouvernement du centre qui soit progressiste, modéré et empreint de compassion», a plaidé M. Ignatieff.

Dernière chance

Le Parti libéral a bel et bien glissé en troisième place dans les intentions de vote, derrière le Parti conservateur et le NPD.

Dans une nouvelle publicité diffusée en anglais lundi, il attaque maintenant les troupes de Jack Layton et celles de Stephen Harper comme étant les «deux côtés d'une même médaille», deux politiciens de carrière déconnectés des priorités des Canadiens.

Ce genre de discours, plus direct et belligérant, pourrait être la norme d'ici la fin de la campagne en provenance du camp libéral. Selon Thierry Giasson, professeur de communication politique à l'Université Laval, il est normal pour un parti politique d'ainsi miser sur des publicités à caractère plus négatif en fin de parcours.

«La très grande majorité des électeurs ont pris leur décision à ce stade-ci. On est dans le dernier droit et là, on s'adresse à des segments d'électeurs qui ne vont pas ou très peu utiliser d'informations factuelles pour guider leur vote. Ils vont utiliser de l'information qui est liée à leurs émotions», a-t-il expliqué.

«Ça peut représenter jusqu'à 10% de l'électorat ces gens-là, malgré tout.»

Le défi des libéraux pour les prochains jours sera donc de bien marteler ce type de message. Car selon M. Giasson de même que le spécialiste en publicité Luc Dupont, les troupes de Michael Ignatieff ont échoué à bien communiquer leur plateforme depuis le début de la campagne.

«J'attends toujours le message qui va nous dire quelle est la plateforme libérale, dit M. Dupont, professeur de communication à l'Université d'Ottawa. Mais évidemment, il est trop tard. La campagne est pas mal terminée.»

Les libéraux ont néanmoins diffusé trois nouvelles publicités francophones à avec un angle positif mardi matin, dans lesquelles ils reviennent sur certains éléments de leur plateforme.

Prime à l'urne

Devant la montée du NPD, l'entourage du chef libéral nourrit encore au moins un espoir: que les électeurs hésitent et reviennent sur leur décision de voter pour Jack Layton, au moment de faire leur croix sur leur bulletin de vote.

Les libéraux espèrent aussi que leur organisation leur permette de mieux faire «sortir le vote» que les troupes de Jack Layton, le soir des élections, c'est-à-dire qu'ils convainquent plus de leurs partisans d'aller aux urnes.

À cet égard, Michael Ignatieff espère que son travail des derniers mois, où il a sillonné le pays pour mobiliser la base de son parti derrière lui, aura porté fruits.

«Nous avons fait un travail acharné sous la visibilité pour mobiliser notre base, avec toutes les techniques modernes, a-t-il expliqué en point de presse. Et c'est une question-clé. Parce que le 2 mai, la question décisive sera: qui va sortir ce vote. Et moi, je suis très confiant que les libéraux vont sortir ce vote.»

«C'est crucial dans cette affaire. C'est pour ça que je reste souriant et confiant», a-t-il conclu.