(La Prairie) Moins de tondeuse, plus de plantes indigènes : c’est le pari qu’a fait la Ville de La Prairie dans le cadre d’un projet pilote lancé cette année. Le gazon est coupé moins souvent, et des plantes attrayantes pour les pollinisateurs ont été semées près des arbres fruitiers.

En cette fin d’été, le contraste entre les différentes zones du parc du Rhône est frappant.

De chaque côté du chemin, le gazon raccourci chaque semaine joue sagement son rôle de pelouse.

Vers la gauche, des corolles roses, rouges, indigo et jaunes émergent de trois talles fleuries, semées ici pour attirer les insectes pollinisateurs vers les arbres fruitiers qui poussent à proximité.

Un peu plus loin, le long de la clôture, des tiges de verge d’or, d’aster, d’asclépiade et de rudbeckie se fraient un chemin à travers la verdure.

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Daniel Girard, conseiller en transition écologique à la Ville de La Prairie

Beaucoup d’espèces de plantes indigènes ont poussé naturellement, sans intervention. Peut-être qu’elles étaient en dormance dans le sol et sont ressorties spontanément.

Daniel Girard, conseiller en transition écologique à la Ville de La Prairie

Dans ce parc linéaire de 1,5 kilomètre qui faisait autrefois partie d’un terrain de golf, la nature reprend joyeusement ses droits. Même les cailloux qui enrochaient le pourtour de l’étang artificiel sont en train de disparaître sous la végétation. Des couleuvres y ont été vues à travers les herbes hautes.

Une économie de 60 000 $

« Le parc fait à peu près 65 000 mètres carrés, et il y en a environ 50 000 qu’on a laissé en renaturalisation », résume M. Girard.

Ces 50 000 mètres carrés n’ont pas vu la tondeuse cette année, tout comme quelque 30 000 mètres carrés supplémentaires répartis dans plus d’une dizaine d’autres terrains municipaux. Des miniprés fleuris destinés à attirer les pollinisateurs ont aussi été semés partout où la Ville avait planté des pruniers, poiriers et pommiers, soit une douzaine de sites.

« C’est dans un but de pollinisation, et d’embellir le paysage – surtout depuis la mi-juillet, c’est tout le temps en fleurs. On regarde la possibilité de le faire aussi pour les jardins communautaires. »

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Panneau explicant le rôle du pré fleuri

Outre les fleurs, La Prairie a pris soin de planter des affiches explicatives. « Moins de tonte, plus de vie » aide la faune, réduit les émissions de gaz à effet de serre, crée des îlots de fraîcheur et augmente la résistance des écosystèmes, indique un panneau fiché dans un carré de pissenlits.

En réduisant le nombre de tontes sur l’ensemble de son territoire (notamment grâce au mouvement Mai sans tondeuse) et en s’abstenant de couper la végétation sur environ 80 000 mètres carrés de terrains municipaux, La Prairie prévoit économiser environ 60 000 $ cette année. L’aménagement des prés fleuris et l’ajout de panneaux explicatifs sont donc « à coût nul ».

Des fleurs et des pots

L’initiative a suscité des éloges, mais aussi des questions et des plaintes, reconnaît M. Girard.

« Les prés fleuris, habituellement, les gens adorent ça. C’est beau, c’est défini, ça fait plus aménagé. »

  • Une parcelle de pré fleuri au parc du Rhône

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    Une parcelle de pré fleuri au parc du Rhône

  • De part et d’autre du chemin qui longe un quartier résidentiel, la Ville continue de tondre le gazon chaque semaine.

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    De part et d’autre du chemin qui longe un quartier résidentiel, la Ville continue de tondre le gazon chaque semaine.

  • La végétation gagne du terrain autour de ce lac artificiel qui faisait autrefois partie d’un terrain de golf.

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    La végétation gagne du terrain autour de ce lac artificiel qui faisait autrefois partie d’un terrain de golf.

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Dans les zones non tondues, par contre, « si les gens ne sont pas au courant, ils ont l’impression qu’on a abandonné la place ».

Certains vont dire qu’il y a des mauvaises herbes, comme le chardon : on ne l’aime pas dans notre jardin mais ici, les bourdons l’adorent.

Daniel Girard, conseiller en transition écologique à la Ville de La Prairie

Et « plus de vie » amène aussi bien des commentaires positifs que négatifs. Si l’abondance de papillons est bien accueillie, la présence de mulots et de couleuvres suscite moins d’enthousiasme.

« Il y a quand même un certain entretien qui se fait, on va peut-être tondre une fois par an, enlever les pousses d’arbres dont on ne veut pas », précise M. Girard, qui assure ne pas avoir vu d’herbe à poux ni de plantes envahissantes.

Avant de lancer le projet, le conseiller en transition écologique s’est informé auprès d’autres municipalités qui ont mené des projets de biodiversité, comme Candiac et Drummondville.

« On me disait toujours : “Ça s’est bien passé, les gens sont accueillants, mais il faut vraiment de la communication, de la communication, plus, plus, plus !” »

Une activité de type « BioBlitz », où les citoyens sont invités à inventorier la biodiversité en prenant des photos avec leur cellulaire, est notamment envisagée.

Et des résidants ayant exprimé le désir de rendre leur propre terrain à la nature, une réflexion sur la réglementation municipale est en cours. La Prairie, en effet, limite actuellement la hauteur du gazon à 15 centimètres et exige que les plans des potagers en façade soient approuvés par la Ville.

« J’ai fait une tournée du territoire pour voir des exemples, donc on va présenter ça à la Commission de l’environnement, un peu pour se donner des balises [sur] ce qui serait acceptable et ne l’est pas. »

Des microforêts pourraient aussi être implantées dans des quartiers où les arbres sont plus rares.

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