La fumée des incendies de forêt du Canada a atteint le Groenland, en début de semaine, assombrissant le ciel et affectant la qualité de l’air.

Ce qu’il faut savoir

  • La fumée des incendies de forêt canadiens a atteint le Groenland au début de la semaine.
  • Le phénomène inhabituel est attribuable à une dépression météorologique dans le nord de la région continentale du Nunavut, explique Environnement et Changement climatique Canada.
  • La fumée affecte aussi l’île de Baffin, au Nunavut.

Voitures et mobilier extérieur ont même été recouverts de suie dans différentes localités de la côte ouest de ce territoire danois autonome, et la police locale a reçu des appels de citoyens inquiets, a rapporté le quotidien Sermitsiaq.

« Lundi, c’est comme si le soleil ne s’était jamais levé, même à midi il faisait très sombre », a raconté à La Presse l’océanographe québécoise Caroline Bouchard, qui vit dans la capitale, Nuuk.

C’était une ambiance apocalyptique, avec de gros nuages noirs et une odeur de fumée intense.

Caroline Bouchard

Les autorités ont d’ailleurs recommandé aux personnes souffrant de maladies pulmonaires de demeurer à l’intérieur, lundi.

C’est une dépression météorologique dans le nord de la région continentale du Nunavut qui aurait poussé la fumée jusqu’au Groenland, explique la météorologue Natalie Hasell, d’Environnement et Changement climatique Canada.

« Les vents associés à ce système nous viennent du nord de l’Alberta et des Territoires du Nord-Ouest, descendent la partie centrale de la Saskatchewan, et ensuite remontent vers l’île de Baffin », explique-t-elle, ajoutant que la communauté d’Iqaluit, au Nunavut, s’est elle aussi retrouvée enfumée.

PHOTO TIRÉE DE LA PAGE FACEBOOK D’AGNETHA MIKKA PETERSEN

Un deuxième facteur explique que la fumée soit restée dense sur une aussi longue distance, ajoute Mme Hasell : l’absence de « mélange vertical » de l’air.

« Les conditions ont été telles qu’il n’y a pas eu beaucoup […] de turbulence, d’instabilité, pour diluer la concentration de la fumée », explique la météorologue.

Cette fumée provient des incendies qui font rage dans les Territoires du Nord-Ouest et dans le nord de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan, du Manitoba, de l’Ontario ainsi que, dans une moindre mesure, du Québec, précise-t-elle.

Inhabituel

Il est inhabituel que la fumée d’incendies de forêt du Canada atteigne le Groenland, estime Caroline Bouchard, qui n’avait jamais rien vu de tel en sept ans sur place.

En juin, quand la fumée des incendies canadiens avait atteint New York, il y avait eu au Groenland « quelques couchers de soleil rouge à cause des particules de fumée, mais il n’y avait eu ni odeur ni nuage noir », dit-elle.

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« Mais je suis originaire de Chibougamau, donc les incendies de forêt m’inquiètent beaucoup après l’évacuation de l’été dernier », confie la chercheuse.

Même s’il n’est pas fréquent que la fumée d’incendies canadiens se rende jusqu’au Groenland, le phénomène n’est pas étonnant pour autant, affirme Natalie Hasell.

« On voit à répétition la fumée qui vient de la Sibérie au Canada », illustre-t-elle, ajoutant qu’il est arrivé plusieurs fois que de la fumée des incendies canadiens atteigne la France.

Et il n’est pas nécessaire que le volume de fumée soit très important pour qu’elle se rende loin, ajoute la météorologue.

« Il y a quelques années, la fumée d’un ou deux feux en Alberta s’était transportée jusque dans la région [française] de la Loire », rappelle-t-elle.

La fumée s’étant maintenant dissipée au Groenland, la qualité de l’air y est redevenue bonne et devrait le demeurer dans les prochains jours, selon les prévisions météorologiques.

En revanche, Iqaluit est toujours dans le panache de fumée et la qualité de l’air y demeure plus faible, observe Natalie Hasell, même si la situation s’est légèrement améliorée, mercredi.

Quelle est la différence entre une dépression et un anticyclone ?

Une dépression signifie que la pression atmosphérique, soit le poids de l’air au sol, est plus basse dans une zone donnée que dans les zones situées autour, explique la météorologue Natalie Hasell, d’Environnement et Changement climatique Canada. Inversement, un anticyclone signifie que la pression atmosphérique est plus élevée dans une zone donnée qu’autour d’elle. Dans les latitudes canadiennes, les dépressions sont associées à du temps venteux et à des précipitations, tandis que les anticyclones sont synonymes de beau temps et de températures très froides ou très chaudes.

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  • 56 865 habitants
    population du Groenland en date du 1er juillet
    Source : gouvernement du Groenland