Flaco, ce hibou grand-duc d’Europe le plus populaire de New York, est mort le 23 février dernier après être entré en collision avec un édifice situé près de Central Park. Un évènement rappelant que les principales causes du déclin des populations d’oiseaux dans le monde, ce sont les activités humaines… et celles de leurs amis à quatre pattes.

Comme dirait Obélix, ils sont fous, ces New-Yorkais ! C’est quoi cette histoire de hibou dont tout le monde parle ?

Depuis son évasion du zoo du Central Park, en février 2023, les aventures de Flaco captivaient les New-Yorkais, de plus en plus nombreux à reconnaître ce hibou grand-duc d’Europe mâle posté dans un arbre ou sur le bord d’une corniche dans la métropole américaine. Il n’était pas rare de voir de nombreux amateurs d’ornithologie et de photos animalières dans Central Park cherchant à l’observer. Selon le journaliste Ed Shanahan, du New York Times, Flaco était aussi devenu la muse de plusieurs artistes, dont des tatoueurs, des poètes et des compositeurs. C’était le cas aussi de l’artiste Calicho Arevalo, qui avait déjà peint huit œuvres murales de Flaco sur différents immeubles au moment de la mort de l’oiseau.

PHOTO BING GUAN, ARCHIVES REUTERS

Dimanche dernier, l’artiste d’origine colombienne Calicho Arevalo apporte des modifications à l’une de ses œuvres après qu’elle a été couverte par des tags dans la Freemans Alley, à New York.

Qu’est-ce qu’il avait de particulier, ce Flaco ?

On pourrait dire que sa rareté était sûrement l’un des facteurs expliquant sa popularité. Comme son nom l’indique en anglais, l’Eurasian eagle-owl (hibou grand-duc d’Europe) ne vit pas en Amérique, mais plutôt en Europe et en Asie, où l’espèce n’est pas considérée comme menacée. Falco, lui, est né en captivité en 2010 dans un zoo en Caroline du Nord avant d’être transféré à Central Park la même année. Mesurant entre 65 et 75 cm de hauteur, cette espèce de hibou a une envergure pouvant aller jusqu’à 1,88 m une fois ses ailes déployées. Les mâles (de 2 à 2,5 kg) sont généralement plus petits que les femelles (de 2,5 à 3,3 kg).

Lisez le texte de Richard Hétu « Flaco, le rapace qui fascine New York »

Comment un tel oiseau pouvait-il survivre dans une ville comme New York ?

Cette crainte était partagée par plusieurs experts, qui ne voyaient pas comment Flaco pourrait survivre longtemps dans un tel environnement. Selon les premiers résultats communiqués par le zoo de Central Park, l’oiseau serait mort des suites d’une lésion traumatique. D’autres tests permettront de déterminer s’il avait également été exposé à différents produits toxiques présents dans l’environnement à New York.

PHOTO BING GUAN, ARCHIVES REUTERS

Les messages et les fleurs abondaient au pied d’un chêne de Central Park après l’annonce de la mort de Flaco.

Il me semble avoir déjà lu que des millions d’oiseaux meurent chaque année après être entrés en collision avec les fenêtres des bâtiments.

C’est bien le cas. Selon une étude récente publiée dans The Wilson Journal of Ornithology, entre 621 millions et 1,7 milliard d’oiseaux meurent chaque année aux États-Unis après être entrés en collision avec un bâtiment ou une maison.

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Certains verres sont traités pour réduire le risque de collisions des oiseaux avec les bâtiments.

Ouch ! Et au Canada, le portrait est-il différent ? Est-ce qu’on a des chiffres sur ce phénomène ?

Les données sont moins récentes, mais dans une étude publiée en 2013 dans la revue Avian Conservation Ecology, on avait estimé qu’environ 25 millions d’oiseaux meurent chaque année après une collision avec un bâtiment. Les maisons étaient alors en grande partie responsables (90 %) de ces collisions, suivies des bâtiments de faible hauteur (10 %) et des édifices (1 %).

Mais si je me souviens bien, les chats font encore plus de dégâts, non ?

Oh que oui ! Selon l’organisation American Bird Conservancy, les chats tuent environ 2,4 milliards d’oiseaux chaque année aux États-Unis. Au Canada, on estime que nos félins tuent annuellement entre 100 et 350 millions d’oiseaux. Toujours selon l’étude publiée dans la revue Avian Conservation Ecology, « la prédation par les chats domestiques est probablement la cause de mortalité d’oiseaux liée aux humains la plus importante au Canada ».

Voilà un triste bilan. Les populations d’oiseaux dans le monde ne sont-elles pas déjà en déclin ?

Selon un rapport publié en 2022 par l’organisation internationale BirdLife, la situation des oiseaux en général est plutôt préoccupante. Une espèce sur huit est menacée d’extinction. Près de la moitié des espèces d’oiseaux dans le monde (49 %) sont aussi en déclin. Les causes sont multiples, mais les pertes d’habitats provoquées par l’agriculture, l’exploitation forestière et les espèces exotiques envahissantes figurent au premier rang avec les changements climatiques.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Les îles Castor et du Mitan, face à Berthierville sur le fleuve Saint-Laurent, ont été réensauvagées ces dernières années. On y a planté 30 000 arbres pour offrir de nouveaux lieux de nidification aux oiseaux.

Que peut-on faire pour ralentir ce déclin en milieu urbain ?

Nous avons posé la question à Jean-Sébastien Guénette, biologiste et directeur général du regroupement QuébecOiseaux. « Notre dernière soirée-bénéfice, c’était justement ça, la thématique : la cohabitation avec les oiseaux en milieu urbain. Nous voulons développer des outils pour aider les municipalités à être plus efficaces et devenir des villes amies des oiseaux. » En collaboration avec Nature Canada, l’organisme a en effet mis sur pied le programme Ville amie des oiseaux qui permet de diminuer les menaces humaines à l’endroit des populations d’oiseaux. Jusqu’à présent, la municipalité de Sainte-Anne-de-Bellevue est la seule au Québec à avoir reçu cette certification. « La majorité des municipalités qu’on a approchées ont vraiment de l’intérêt à travailler avec nous, mais souvent, elles ne savent pas trop par où commencer. Ça touche plusieurs aspects », fait remarquer M. Guénette.

Avec des informations du New York Times et du Guardian