Visiter des mosquées à 5 h du matin. Organiser des spectacles. Sillonner les parcs des 19 arrondissements. Balarama Holness se rappelle encore les efforts importants qu'il a dû déployer pendant trois mois, avec une cinquantaine de personnes, pour récolter les 15 000 signatures nécessaires pour forcer la Ville de Montréal à tenir une consultation sur le racisme systémique.

Le travail de citoyens engagés comme Balarama Holness sera bientôt grandement facilité puisque la métropole s'apprête à accepter les pétitions électroniques.

Depuis 2010, Montréal s'est doté d'un droit d'initiative populaire. Les citoyens peuvent en effet forcer la Ville à mener une consultation publique sur un sujet de leur choix. Des sujets délicats, souvent balayés sous le tapis, peuvent ainsi être abordés de front, comme le racisme systémique.

La barre à atteindre est toutefois haut placée. Les règles en vigueur imposent en effet aux instigateurs de récolter 15 000 signatures si la consultation concerne l'ensemble de Montréal, 5000 si l'enjeu touche un seul arrondissement. Et jusqu'à maintenant, seules les pétitions sur papier étaient acceptées.

Ainsi, depuis l'entrée en vigueur du droit d'initiative, une vingtaine de projets de pétition ont été présentés à la Ville, mais seulement deux ont abouti à des consultations à l'échelle de Montréal : sur l'agriculture urbaine en 2011 et celle sur le racisme systémique l'été dernier.

FACILITER LA COLLECTE DE SIGNATURES

Reconnaissant la difficulté d'atteindre le seuil des 15 000 signatures, l'administration Plante a décidé de modifier les règles sur les consultations publiques pour permettre aux citoyens d'utiliser les pétitions électroniques. Montréal estime que cette mesure « facilitera la collecte de signatures pour une pétition et favorisera possiblement l'accroissement de la participation citoyenne ».

La date d'entrée en vigueur des pétitions électroniques n'a pas encore été déterminée, car Montréal dit vouloir la faire coïncider avec la mise en ligne d'un formulaire standardisé que les citoyens pourront utiliser. À noter, les pétitions devront utiliser le langage épicène, soit une écriture non genrée.

Le sujet est dans l'air depuis longtemps. En mars dernier, le conseil municipal a adopté une motion pour demander l'adoption de la pétition électronique. L'ancienne administration Coderre avait inscrit le projet à ses chantiers de la ville intelligente.

« Je suis vraiment content. C'est certain que ça ouvre une porte aux gens qui veulent participer », a réagi Balarama Holness. Ancien joueur des Alouettes et candidat défait pour Projet Montréal aux élections de 2017, l'homme dit vouloir crever l'abcès sur le racisme systémique dans la métropole.

Aidé d'une cinquantaine de bénévoles, il avait ainsi sillonné la ville pour récolter les signatures. La Ville en demandait 15 000, mais son groupe en a obtenu plus de 20 000, du 1er mai au 27 juillet. Il reste que Balarama Holness aurait préféré faire l'économie de ces trois mois de travail. « Il a fallu faire une campagne de mobilisation à la grandeur de Montréal. C'était extrêmement difficile. Je ne pense pas qu'un groupe de citoyens devrait avoir à récolter ainsi autant de signatures papier. »

En phase de démarrage, la consultation publique sur le racisme et la discrimination systémiques doit avoir lieu au printemps prochain, et le rapport définitif est attendu à l'été.