Un an après son embauche, qui avait suscité la controverse au sein des patrouilleurs montréalais, l’ex-policier Alain Babineau n’est plus à l’emploi de la Commissaire à la lutte au racisme et aux discriminations systémiques de Montréal. Il déplore avoir été limité dans ses fonctions.

« Le rôle du poste, c’était surtout de travailler avec la police de Montréal. Et selon les recommandations du rapport de l’Office de consultation publique (OCPM), on était supposé d’avoir une personne en poste au quartier général. Mais ils n’ont jamais voulu m’avoir là », dénonce le principal intéressé, qui a effectué sa dernière journée avec le bureau de la commissaire Bochra Manaï le 30 avril.

Au fil de l’année, M. Babineau dit avoir mené une « réflexion » sur la pertinence de son rôle, constatant notamment qu’il n’avait pas assez d’espace pour travailler.

« C’était un poste pour effectuer des changements accélérés. Or, parfois, il y a des cultures d’organisation avec lesquelles, peu importe la personne, c’est inchangeable. On fait donc des changements très cosmétiques », fustige-t-il en parlant du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM), au sein duquel sa présence a « toujours dérangé », selon lui.

Souvent cité dans les médias sur le profilage racial, Alain Babineau – un ancien policier de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) qui a travaillé pour le Centre de recherche-action sur les relations raciales (CRARR) – se réjouit toutefois des avancées qu’il a pu faire durant son mandat. « J’ai fait beaucoup de travail avec la Société de transport de Montréal (STM), par exemple, sur de la formation d’agents, sur des politiques. Pour moi, ça, c’est un indicatif d’une organisation qui veut avancer. Maintenant, je passe à un autre appel », soutient-il.

Vives tensions

Dès l’annonce de son embauche, en mai 2021, la Fraternité des policiers et policières de Montréal s’était indignée de l’arrivée d’un « militant […] dont l’une des spécialités est d’accuser les policiers et policières de profilage racial ». « Il est évident qu’un militant plaidant dans les médias contre les policiers et policières est mal placé pour susciter l’adhésion. Un minimum d’apparence d’impartialité aurait été nécessaire pour ce poste », avait alors martelé la Fraternité dans un courriel envoyé à tous ses membres.

Par courriel, le président de la Fraternité, Yves Francœur, est demeuré succinct dans ses commentaires, lundi, indiquant simplement que son groupe n’est « pas surpris » de la situation. Une source policière a par ailleurs fait valoir que M. Babineau aurait été remercié par la Ville.

À la Ville de Montréal, on demeure prudent. « Les dossiers employés sont confidentiels. À ce titre, la Ville ne fera aucun commentaire spécifique à cet effet », a simplement répondu la porte-parole Gabrielle Fontaine-Giroux. Le cabinet de Valérie Plante n’a pas non plus souhaité commenter lundi, invoquant des « processus administratifs » hors de sa portée.

Quant à elle, Bochra Manaï demeure commissaire à la lutte au racisme et aux discriminations systémiques à la Ville de Montréal. Le recrutement de Mme Manaï par l’administration Plante avait également causé une controverse à l’hiver 2021 parce qu’elle avait qualifié le Québec de « référence pour les suprémacistes et les extrémistes du monde entier » dans la foulée de l’adoption de la loi 21. À Québec, le premier ministre François Legault avait critiqué sa nomination.

Avec Daniel Renaud, La Presse