Montréal n’a pas créé de précédent dangereux en s’entendant avec l’entreprise chargée de construire ses centres de traitement du compost, dont les chantiers sont paralysés depuis 10 mois, a assuré lundi Valérie Plante.

La Ville a conclu un accord avec Veolia dans la nuit de jeudi à vendredi, après avoir augmenté de plus de 40 millions le budget des projets et accepté de renoncer à facturer 5,4 millions en frais de retard. Veolia a promis de reprendre les travaux d’ici 30 jours.

« Quel message l’administration envoie-t-elle aux autres entreprises qui font affaire avec la Ville ? Qu’un arrêt de chantier va être bénéfique ? Que les pénalités vont être effacées ? », a questionné l’élu d’opposition Alan DeSousa au conseil municipal.

« Personnellement, je pense que c’est non seulement un lourd précédent pour la Ville, mais c’est presque un guide pour d’autres personnes qui vont apprendre de cette expérience », a-t-il ajouté.

Fait inhabituel, la mairesse de Montréal a directement répondu à M. DeSousa.

« Nous ce qu’on fait comme administration de façon de manière responsable et transparente […] c’est de négocier de bonne foi dans le cadre du contrat. On n’a pas réouvert le contrat justement pour ne pas créer de précédent », a répondu Valérie Plante. « Mais à entendre mon collègue, on aurait dû juste laisser faire, repartir en appel d’offres alors qu’une usine était complétée à 80 %. »

La mairesse a fait valoir que l’opposition l’incitait à régler ce dossier au début de la « crise », mais lui reproche maintenant d’avoir trouvé une solution. « Branchez-vous ! », a lancé Mme Plante.

Quelques minutes auparavant, la responsable de l’Environnement à l’hôtel de ville s’était félicitée de la conclusion du dossier.

« On avait dit l’automne dernier qu’il n’y aurait pas de chèque en blanc », a affirmé Marie-Andrée Mauger, toujours au conseil municipal. « On s’est assurés dans l’entente […] que les sommes consenties, certaines allaient descendre jusqu’aux sous-traitants. »

« On est très fiers de cette entente-là qui remet finalement sur les rails ce chantier », a-t-elle ajouté.

110 000 tonnes de résidus à traiter

Les deux projets de centre de traitement des matières organiques font couler de l’encre depuis des années.

L’installation de Saint-Laurent, située sur le boulevard Henri-Bourassa Ouest, devait coûter 175 millions à la métropole, somme qui inclut son exploitation pendant les cinq premières années. Le chantier est actuellement achevé à 90 %. L’usine devrait pouvoir traiter 50 000 tonnes de résidus de table par année pour en faire du compost utilisable en agriculture.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

L’installation de Saint-Laurent devait coûter 175 millions à la métropole, somme qui inclut son exploitation pendant les cinq premières années. Le chantier est actuellement achevé à 90 %.

L’installation de Montréal-Est, un centre de biométhanisation, sera située sur le site de l’ancienne carrière Demix, à l’intersection de l’avenue Broadway Nord et de l’autoroute 40. Sa construction et son exploitation pendant les cinq premières années devaient coûter 167 millions à Montréal. L’installation avalera 60 000 tonnes de compost par année, selon la Ville.

Les deux projets ont souffert de retards et de dépassements de coûts importants. La Ville de Montréal doit maintenant exporter une partie de ses matières organiques vers l’Ontario en attendant la finalisation des deux installations.

Les contrats pour leur construction et leur exploitation avaient été accordés en 2019 à Suez, une entreprise française dont la filiale nord-américaine a été rachetée l’an dernier par sa compatriote Veolia. C’est ce qui explique que la Ville de Montréal doive maintenant traiter avec Veolia.

En 2021, la vérificatrice générale de Montréal évoquait un « constat global de dépassement de coûts et de non-respect du calendrier » dans le dossier des centres de traitement des matières organiques (CTMO). « Le projet de construction des CTMO ne s’est pas effectué en suivant un processus suffisamment rigoureux auquel on devrait s’attendre pour un projet d’une telle complexité et envergure », écrivait-elle.