Valérie Plante a appelé à la rescousse le contrôleur général de Montréal, mardi, après avoir appris que les pompiers avaient mis la pédale douce dans l’application de la réglementation sur les sorties de secours depuis 2018.

Ce qu’il faut savoir

Le Globe and Mail a révélé mardi le contenu d’un document interne des pompiers de Montréal qui instaure un « moratoire » sur une partie de l’application des normes sur les sorties de secours.

L’administration Plante, surprise par ces révélations, a demandé au gardien de l’éthique de la Ville de Montréal de jeter un coup d’œil au dossier.

L’opposition officielle à l’hôtel de ville demande le déclenchement d’une enquête indépendante.

Sur les réseaux sociaux, la mairesse de Montréal a annoncé avoir « demandé au contrôleur général de la Ville de Montréal d’accompagner le Service de sécurité incendie de Montréal (SIM) pour clarifier la situation », a-t-elle indiqué sur son compte Twitter. « La sécurité des Montréalais est notre priorité. Nous ne ferons aucun compromis pour faire la lumière sur cette tragédie. »

En conférence de presse, la numéro 2 de l’administration Plante a confirmé la décision. « C’est important de faire toute la lumière sur les faits qui ont été allégués, a dit Dominique Ollivier. On a quand même une équipe de direction nouvelle qui est en place. On trouve important de se faire accompagner par le contrôleur général pour être capables de bien saisir où sont les moments où il aurait pu y avoir des manquements, s’il y en a eu. »

Le contrôleur général est le gardien de l’éthique au sein de la Ville de Montréal.

En matinée au conseil municipal, la mairesse s’était dite « énormémement préoccupée » par la situation.

Elle a confirmé qu’un « moratoire » sur certains aspects des inspections concernant les voies d’évacuation avait été « mis en place » il y a cinq ans par le SIM. Motif : à cause d’un manque de formation, la preuve produite par les inspecteurs du service n’était parfois pas suffisante pour traîner les propriétaires délinquants devant la justice.

« On veut vraiment faire la lumière sur cette situation parce que ce n’est pas ce que l’on souhaite », a poursuivi Mme Plante, mardi. « La sécurité, il ne faut pas lésiner avec ça. Pour notre administration, c’est absolument fondamental et essentiel, tout comme ça l’est pour le SIM. »

Informations contradictoires

C’est le Globe and Mail qui a levé le voile sur la situation, mardi. Le quotidien a rapporté qu’une note interne de 2018 annonce aux employés une interruption des « demandes d’expertise » en lien avec la réglementation sur les possibilités d’évacuation. Selon deux sources du journal, cette interruption a entraîné un arrêt des inspections en matière d’évacuation.

Le Globe and Mail croit savoir que ce moratoire a été suspendu sans tambour ni trompette dans la foulée de l’incendie de la place D’Youville, qui a fait sept morts en mars. Mardi, la mairesse de Montréal a expliqué que selon les informations reçues par son équipe, le moratoire avait plutôt pris fin en 2021.

En après-midi, le directeur du SIM, Richard Liebmann, a tenté de clarifier la situation. Dans une conférence de presse où il a dû répéter à de nombreuses reprises des explications longues et complexes, il a fait valoir que le « moratoire » évoqué dans les documents internes était en fait un simple changement d’approche.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Richard Liebmann et Valérie Plante

« Ce sont les poursuites pénales qu’on a suspendues pendant qu’on rehaussait notre niveau d’expertise pour nous assurer que si on poursuivait, on pourrait forcer le retour à la conformité », a dit M. Liebmann, précisant que le service continuait toutefois à distribuer des constats d’infraction. « Le rythme des inspections n’a jamais ralenti. On a mis l’emphase sur la qualité des inspections et pas seulement la quantité. On a toujours poursuivi un nombre stable d’inspections. »

Contrairement à ce que la mairesse Valérie Plante avait affirmé le matin même, le directeur a ajouté que le moratoire n’était pas encore levé à l’heure actuelle, mais qu’il était « en processus » d’être levé, processus qui s’est accéléré avec l’incendie du Vieux-Montréal.

« Je suis inquiet »

Ces explications n’ont pas convaincu Aref Salem, chef de l’opposition à l’hôtel de ville, qui se grattait toujours la tête après la conférence de presse de Richard Liebmann. L’élu a demandé le déclenchement d’une enquête indépendante sur cette situation.

« Je suis inquiet aujourd’hui. Je ne suis pas satisfait des explications qui ont été données », a-t-il dit.

M. Salem a fait valoir que ce dossier faisait ressortir le manque de leadership de l’administration Plante, qui n’avait visiblement pas été informée de la situation avant la publication de l’article du Globe and Mail. « On dirait que la Ville fonctionne seule, qu’il n’y a pas de pilote dans la Ville. »