L’homme qui pilotait l’aéronef s’étant écrasé le printemps dernier à Saint-Rémi, en Montérégie, voulait « faire un spectacle » à des amis qui se trouvaient sur un terrain au sol. L’élève était toujours en formation, mais avait obtenu l’autorisation de son instructeur pour voler en solo, quand l’accident est survenu.

C’est ce que conclut le Bureau de la sécurité des transports du Canada (BST), dans un rapport d’enquête dévoilé mercredi. L’accident s’était produit vers 19 h 30, le 21 avril dernier, quand un petit aéronef s’était écrasé après avoir heurté deux résidences et un véhicule dans le secteur de la rue de l’Église, à Saint-Rémi.

On apprend dans le rapport que c’est un élève-pilote qui était aux commandes de l’appareil, au moment des faits. L’homme dans la trentaine avait envoyé un message à son instructeur pour l’informer de son intention de voler avec un ami, ce à quoi l’enseignant aurait donné son autorisation, et ce même si un élève-pilote ne peut théoriquement avoir un passager à bord.

L’avion a donc décollé vers 18 h 30, avec l’élève et son ami à bord. Selon le BST, les conditions météorologiques étaient alors « favorables » et les vents soufflaient « du nord-ouest à environ 14 nœuds ».

C’est près d’une heure après le décollage, aux alentours de 19 h 20, que les choses se corsent. À ce moment, l’aéronef survole une zone résidentielle à l’ouest de Saint-Rémi à basse altitude « où un rassemblement extérieur d’une quinzaine de personnes avait lieu sur un terrain privé », écrit le Bureau.

Sur ce terrain, l’une des personnes reconnaît l’avion et appelle l’élève-pilote « pour lui demander de faire un spectacle ». L’appel se termine peu de temps après, et rapidement, le pilote fait une approche en provenance du nord vers le rassemblement.

  • Une image fournie dans le rapport d’enquête donne une idée de la chute de l’aéronef.

    PHOTO FOURNIE PAR LE BST

    Une image fournie dans le rapport d’enquête donne une idée de la chute de l’aéronef.

  • Les dommages à l’aéronef ont été nombreux, notamment sur ses ailes, comme le montre l’image ci-dessus.

    PHOTO FOURNIE PAR LE BST

    Les dommages à l’aéronef ont été nombreux, notamment sur ses ailes, comme le montre l’image ci-dessus.

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Fils électriques « sectionnés »

Dans son rapport, le BST note que l’avion a rapidement « amorcé un cabré prononcé, et [à la suite d’une] manœuvre que l’enquête n’a pas pu identifier, il s’est retrouvé en descente verticale ». L’avion a ensuite « sectionné des fils électriques avant de s’écraser sur le toit d’une voiture stationnée dans l’entrée d’une maison se trouvant à environ 100 pieds du rassemblement ».

Un incendie s’est alors déclaré et de nombreuses personnes ont accouru au secours de l’élève-pilote et de son ami. Les deux hommes ont été grièvement blessés et transportés d’urgence dans un centre hospitalier. Heureusement, aucune personne qui se trouvait sur le terrain privé n’a toutefois été blessée.

Selon le rapport d’enquête, le brasier s’est ensuite « propagé à la maison » et à d’autres installations, avant d’être finalement maîtrisé par les pompiers. Un véhicule qui se trouvait sur place a également été endommagé. L’avion, lui, a été complètement détruit.

Un type d’accident fréquent

Pour Jean Lapointe, pilote et expert en aviation civile, ce dossier est troublant. « Quand on est un pilote, on ne se laisse pas influencer par nos amis. On ne fait pas de passe pour impressionner en allant à l’encontre des règlements. Des spectacles aériens, si c’est ce que la personne voulait faire, il faut que ce soit fait en conformité avec des gens au sol qui ont éloigné toutes les personnes. Il y a tout un protocole », dit-il.

« L’erreur, là-dedans, c’est que le pilote ne s’est pas affirmé en refusant de le faire, d’autant plus qu’il n’avait probablement pas les compétences pour faire des manœuvres d’acrobatie. Maintenant, ce sera à Transports Canada de déterminer si le permis de l’élève-pilote doit lui être retiré », explique M. Lapointe.

Ce genre d’accident, « il y en a chaque année malheureusement », regrette le pilote d’expérience. « C’est une bonne chose que le BST le mette de l’avant. Dans la communauté des pilotes, il faut apprendre des erreurs des autres. C’est juste triste en 2023 qu’on assiste encore à des accidents comme ça, alors qu’on a tous les outils pour bien superviser les pilotes et les entraîner de façon adéquate », conclut-il.

Le BST a profité de la parution de son rapport, mercredi, pour rappeler que selon le Règlement de l’aviation canadien (RAC), « il est interdit d’utiliser un aéronef au-dessus d’une zone bâtie […] à une altitude inférieure à 1000 pieds au-dessus de l’obstacle le plus élevé situé dans un rayon de 2000 pieds ou moins ».

On rappelle également aux élèves-pilotes « que les vols en solo sont autorisés uniquement pour pratiquer des manœuvres nécessaires à l’obtention d’un permis ». Pour assurer la sécurité des vols d’entraînement, les instructeurs doivent quant à eux « évaluer et renforcer l’adoption et l’application, par les élèves-pilotes, des pratiques liées à une bonne discipline ».

« Il est essentiel que les instructeurs dirigent et surveillent activement ces vols d’entraînement en solo, ce qui toutefois peut être difficile si les élèves-pilotes se servent de leur propre aéronef et si les instructeurs effectuent la surveillance à distance », conclut le Bureau.