À mi-parcours de son deuxième mandat, Valérie Plante assure avoir « encore le feu » et être « encore passionnée » par la gestion de Montréal, malgré ses relations souvent orageuses avec le gouvernement Legault.

En entrevue éditoriale avec La Presse, la mairesse a déploré – peut-être plus ouvertement que jamais auparavant – que Québec gouverne trop fréquemment aux dépens de sa métropole.

« Au cours des dernières années, il y a quand même plusieurs orientations et décisions prises par le gouvernement actuel qui ont un impact négatif sur la région métropolitaine », a-t-elle laissé tomber, en soupirant. « C’est un peu ça, mon constat. »

« Ça a un impact sur le dynamisme économique de la région métropolitaine, sur sa réputation à l’international. Chaque geste tout seul ? Non. Mais quand on commence à les [additionner]… »

Malgré ces frustrations, Valérie Plante a confirmé qu’elle tenterait d’obtenir un troisième mandat en 2025.

Je ne fais pas l’unanimité, personne ne la fait, j’en suis bien consciente, mais je suis contente que les Montréalais trouvent que Montréal change, change pour le mieux.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

« Oui, des chantiers, il y a en a beaucoup. Mais je crois que les Montréalais comprennent que ça va être pour le mieux et que la vie va être encore plus belle après », a poursuivi Mme Plante.

Promesses et priorités

Valérie Plante a été réélue en 2021, à un moment où la violence armée, la pandémie de COVID-19, l’habitation et les entraves routières étaient au centre des préoccupations. Deux ans plus tard, les cônes orange et la pénurie de logements donnent toujours des cauchemars aux Montréalais, mais l’itinérance et l’avenir des transports en commun se sont hissés au sommet des manchettes.

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Valérie Plante lors de sa réélection, en novembre 2021

Il n’est pas aisé de faire le bilan des 250 engagements pris par Mme Plante avant le dernier scrutin. Certains sont manifestement réalisés : la gratuité des transports collectifs pour les aînés, par exemple, ou la multiplication par deux du budget lié à l’itinérance. D’autres sont manifestement ratés : les policiers montréalais n’ont jamais vu la couleur des caméras corporelles dont ils devaient être dotés dès 2022 et le Sommet sur les chantiers n’a pas été tenu durant les six premiers mois du mandat, mais seulement cette année.

La vaste majorité des promesses se situent toutefois entre ces deux extrêmes : soit qu’elles sont en cours de réalisation, soit que le délai que Projet Montréal s’était fixé n’est pas encore échu.

À un moment donné, il y a des priorités qui bougent. Je ne dis pas ça pour me justifier. J’essaie seulement d’expliquer : des fois, la situation change et, nécessairement, il faut qu’on s’adapte.

Valérie Plante, mairesse de Montréal

Dans les locaux de La Presse, jeudi, la mairesse a toutefois clairement réitéré sa promesse-phare de construire, protéger ou maintenir 60 000 logements abordables en 10 ans. Malgré l’apparente inefficacité de son Règlement pour une métropole mixte à faire sortir de terre de tels projets, la promesse tient, jure-t-elle. « On est tout à fait mobilisés, motivés », a-t-elle assuré, sans s’inquiéter outre mesure de l’impact du ralentissement immobilier sur ces projets.

Une augmentation des pénalités imposées aux promoteurs qui préfèrent sortir le chéquier plutôt que de bâtir des logements sociaux, abordables ou familiaux est prévue.

En contrepartie, la mairesse a révélé que la nouvelle version de son règlement exclurait dorénavant les projets de moins de 20 logements de ces obligations, alors que la barre était fixée à 6 jusqu’à maintenant. « On a vu dans les données que c’est plutôt avec les plus gros bâtiments que ça marche », a-t-elle dit.

« Choquée » par un ministre

Mais ces jours-ci, c’est surtout le financement des transports en commun qui occupe les journées de la mairesse. C’est au beau milieu de l’entrevue éditoriale que la ministre Geneviève Guilbault a fait connaître son « offre finale » pour le renflouement du déficit des opérateurs. La CMM l’a rejetée vendredi.

La lune de miel entre les deux femmes les plus puissantes du Québec, à l’époque où Mme Guilbault investissait des dizaines de millions dans la police, semble terminée.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Geneviève Guilbault, ministre des Transports

« Est-ce qu’on peut entendre de la bouche de la ministre que la mobilité durable, c’est vraiment important ? Parce qu’on ne l’entend pas », a asséné Valérie Plante, qui n’en peut plus des commentaires qui remettent en question la nécessité pour l’ensemble des Québécois de contribuer au métro montréalais. « Je l’ai entendu d’un ou d’une ministre, cet argument-là, a-t-elle rapporté. Ça m’a choquée. »

Lorsque l’on évoque l’exemple de Saint-Constant, qui menace de retenir une partie de sa contribution à l’Autorité régionale de transport métropolitain, la mairesse est loin de condamner le geste. « On va avancer ensemble. On est unis », a-t-elle dit.

À plusieurs reprises dans son bilan des deux dernières années, la mairesse a d’ailleurs montré du doigt Québec pour expliquer des retards à remplir ses engagements. En matière de logement social, Valérie Plante s’indigne de ce qu’elle considère comme un désengagement total du gouvernement.

Tout n’est toutefois pas noir. La mairesse voit positivement la conclusion récente d’un nouveau pacte fiscal entre le gouvernement et les municipalités, qui prévoit des mécanismes de dialogue sur une base régulière.

« Traditionnellement, c’est un rapport très paternaliste du gouvernement du Québec, quel qu’il soit. La CAQ est particulièrement… », a-t-elle dit, sans finir sa phrase. « C’est : “Voilà l’argent, laissez-nous tranquilles, on se revoit dans quatre ans.” » Cette fois, il y a une vraie tentative de discussion d’égal à égal, s’est réjouie Valérie Plante.