Les cônes et les chantiers font toujours autant la vie dure aux Montréalais. Dans une étude qui paraîtra vendredi, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) constate que près d’un cylindre orange sur cinq est encore « inutile » au centre-ville, mais surtout que les artères entravées y sont toujours aussi nombreuses.

Ce qu’il faut savoir

La CCMM affirme que la situation ne s’améliore pas vraiment depuis la parution de son étude sur la présence des chantiers au centre-ville, en janvier.

Tout près d’un cône sur cinq est toujours considéré comme inutile.

Plusieurs artères sont toujours périodiquement entravées, irritant les commerçants et les travailleurs.

« Il n’y a pas de véritable transformation de la culture. Les résultats sont limités, ce qui fait que les perceptions des travailleurs et des entreprises, elles, n’ont pas changé », affirme le président de la CCMM, Michel Leblanc, en entrevue avec La Presse.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

Michel Leblanc, président de la CCMM

En janvier, son groupe avait marqué les esprits en montrant dans une première étude que 94 % des artères du centre-ville avaient été entravées à un moment en 2022, et que plus du quart des cônes étaient « inutiles ».

Lisez « Cônes orange au centre-ville de Montréal : Omniprésents… et souvent “inutiles” »

Dans la foulée, la Ville avait notamment imposé l’installation et le retrait de la signalisation entourant un chantier 24 heures avant le début ou après la fin des travaux, en plus de démobiliser les zones de travaux inactives pendant plus de cinq jours, en marge du Sommet sur les chantiers, le printemps dernier. Québec enlève aussi depuis les cônes au bout de 72 heures d’inactivité sur un chantier et privilégie des glissières métalliques aux cônes sur ses chantiers.

« Le problème demeure »

Depuis, l’absence de coordination entourant les chantiers persiste, et malgré ces mesures, le problème demeure, observe M. Leblanc, qui reconnaît néanmoins que l’impact de ces mesures n’est pas encore pleinement mesurable.

N’empêche, 15 des 45 kilomètres d’artères de l’hypercentre étaient toujours entravés en 2023, soit 6,9 kilomètres liés à des chantiers de la Ville et 8,1 kilomètres, de chantiers privés. La proportion d’artères entravées à un moment ou un autre demeure similaire, de 94 % à 93 % entre 2022 et 2023 selon les données de la CCMM. Celle-ci déplore aussi que l’accès des arrondissements à la plateforme AGIR, pour y inscrire tous les contrats relevant de la Ville, attende à 2028, un délai « insuffisant » dans le contexte.

Quant aux cônes, leur nombre a diminué, passant de 604 en 2022 à 507 en 2023 dans le quadrilatère à l’étude, soit les axes Sherbrooke, Drummond, Guy et René-Lévesque. Il reste toutefois que sur 507, 112 étaient encore considérés comme « inutiles », ce qui revient à 22 %. L’an dernier, ce chiffre était de 27 %.

Ça veut dire qu’on a encore grosso modo un cône sur cinq au centre-ville qui n’a aucune raison d’être. C’est encore beaucoup trop.

Michel Leblanc, président de la CCMM

Des exemples probants

Selon la CCMM, qui représente la plupart des grands employeurs du centre-ville, les exemples d’artères du centre-ville qui continuent d’être entravées ne manquent pas. Rue Saint-Urbain, par exemple, il n’y avait plus qu’une voie de circulation au début de novembre, alors que la neige s’invitait pour la première fois de la saison. En fait, des entraves sont en place sur cette artère depuis une décennie, selon la CCMM.

L’organisme donne d’autres cas de figure en rafale : sur le boulevard Saint-Joseph, la voie en direction est a été interrompue, tandis que l’avenue Laurier a été complètement fermée à la circulation et que le boulevard Saint-Laurent n’a plus qu’une voie de circulation sur plusieurs tronçons.

Autre enjeu : les livraisons « continuent d’être tolérées à toute heure du jour » dans les quartiers centraux, déplore la Chambre. « C’est quelque chose qu’on a souligné souvent : la Ville pourrait facilement mettre de l’ordre dans les livraisons, sans laisser ça de façon aléatoire à toute heure, surtout en pointe. Ça ne veut pas dire que tout se fait à 2 h du matin, mais il y a moyen de faire du ménage », dit M. Leblanc.

« En fait, la réalité, c’est que les gens n’ont pas l’impression que ça s’améliore. Et dans le contexte où on veut ramener les gens le plus possible au centre-ville, le manque de fluidité demeure une des principales raisons pour lesquelles ils ne reviennent pas, justement », martèle encore le président.

Du positif, mais…

À la Société de développement commercial (SDC) Montréal centre-ville, le directeur général Glenn Castanheira estime aussi que l’insatisfaction persiste. « La source principale d’irritation pour les usagers, c’est encore clairement l’impact des chantiers, et en particulier la signalétique », dit-il.

On salue, cela dit, le fait que le chantier de la rue Sainte-Catherine soit bon élève. Ils ont utilisé des bollards au lieu des cônes, le chantier est propre et bien contenu. On n’a reçu que deux plaintes depuis le début.

Glenn Castanheira, directeur général de la SDC Montréal centre-ville

Mais il reste encore plusieurs cancres, en premier lieu « le chantier du REM, sur lequel on ne voit aucune amélioration encore ». « Il arrive aussi encore qu’on apprenne le jour même qu’une rue va être fermée, donc ce n’est pas parfait. Et je ne suis pas prêt à dire que la culture a véritablement changé », explique le gestionnaire.

La Ville de Montréal, elle, réitère que depuis son Sommet sur les chantiers, « une hausse considérable de la conformité des chantiers est observée ». « L’amélioration de la gestion des chantiers est un effort continu qui se poursuivra, mais nous voyons des résultats encourageants et nous comptons sur tout le monde pour continuer dans cette direction », soutient l’attachée de presse de la mairesse, Catherine Cadotte.

Selon elle, « le travail se poursuivra jusqu’à ce que les résultats quantitatifs observés sur le terrain changent la perception des visiteurs du centre-ville ».

En savoir plus
  • 85 %
    C’est la proportion de travailleurs jugeant que les déplacements ne sont pas encore fluides dans le Grand Montréal, selon la CCMM. De ce nombre, 75 % des répondants considèrent que le centre-ville est la pire zone en la matière.
    CCMM
    300
    Entre le 1er janvier et le 17 octobre 2023, l’Escouade mobilité a réalisé plus de 300 inspections de chantiers supplémentaires par rapport à 2022. Au total, 758 inspections ont été réalisées expressément en lien avec les nouvelles clauses de la Ville adoptées en marge du Sommet sur les chantiers.
    VILLE DE MONTRÉAL