L’ex-chien de garde de l’intégrité au sein de l’état-major du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) se plaint d’avoir été écarté de ses fonctions pour avoir contribué au mouvement des camionneurs qui occupaient le centre-ville d’Ottawa.

L’inspecteur Patrick Lavallée avait tenté de devenir le chef de police de la métropole avant d’être doublé à l’arrivée par Fady Dagher, fin 2022.

Mais au début de cette année-là, alors qu’il dirige la Division de l’intégrité du SPVM, « l’employeur lui annonce qu’il fait l’objet d’une enquête disciplinaire à la suite d’un don fait aux camionneurs ayant manifesté leur opposition à Ottawa », relate le Tribunal administratif du travail (TAT) dans une décision qui vient d’être rendue publique.

La liste des donateurs du mouvement des camionneurs avait fait l’objet d’une fuite au même moment.

« Environ deux semaines plus tard, il est déplacé au poste de conseiller au soutien à la gendarmerie (sud-ouest) », un poste beaucoup moins stratégique, continue le jugement. « Il conserve toutefois son grade d’inspecteur et le même salaire. Aucune résolution n’est adoptée par l’employeur à ce sujet. »

L’inspecteur Patrick Lavallée a entamé une contestation judiciaire, car il estimait que cette décision constituait une tentative de congédiement déguisé. Le TAT ne s’est pas prononcé sur le fond de l’affaire, se contentant de renvoyer M. Lavallée devant la Cour du Québec.

« Étant donné la judiciarisation du dossier, nous ne ferons pas de commentaires », a indiqué le SPVM.

L’avocat de Patrick Lavallée, MSylvain Lefebvre, a invité La Presse à contacter le SPVM.

Candidat à la direction

Patrick Lavallée a fait les manchettes dès son arrivée comme recrue au SPVM, en 2000.

Le jeune homme avait alors contesté une clause de la convention collective limitant le salaire des nouveaux policiers de Montréal devant la Commission canadienne des droits de la personne. Pris d’un « vif sentiment d’injustice », il s’attaquait à la fois à son employeur et à son syndicat.

La même année, il faisait couler de l’encre en devenant l’un des premiers policiers montréalais à faire son coming out sur la place publique.

PHOTO MICHEL GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Patrick Lavallée, en 2000

« Je crois que lorsqu’on a une attitude de victime, on finit par être persécuté par quelqu’un. Moi, au contraire, j’ai une attitude de gagnant », avait-il expliqué à l’époque en entrevue avec La Presse. « C’est sûr qu’il y a de la bigoterie et des gens bornés dans la police, comme ailleurs. Mais il n’y a pas de persécution systématique. »

Patrick Lavallée a ensuite gravi les échelons du SPVM jusqu’à atteindre l’état-major en 2015. Il a notamment été responsable du poste de quartier 39, à Montréal-Nord.

En novembre 2022, Radio-Canada avait rapporté qu’il était candidat à la succession du chef sortant Sylvain Caron. « Patrick a en aversion les injustices et il n’hésitera pas à faire tout ce qu’il faut pour les éliminer », avait commenté l’inspecteur à la retraite André Durocher, soutenant sa candidature. « C’est un candidat qui a de l’expérience terrain à la tonne depuis plus de 20 ans et qui s’est servi de cette expérience pour développer sa vision future de la police. »

C’est finalement Fady Dagher qui a été choisi.

Patrick Lavallée est toujours inspecteur au Service du soutien en gendarmerie, selon le SPVM.