Un an jour pour jour après la mort de la petite Mariia Legenkovska sous les roues d’un chauffard, la circulation demeure dense dans le Centre-Sud, concède l’administration Plante. La Ville de Montréal promet d’ailleurs d’en faire encore plus pour « apaiser » les quartiers à compter de l’an prochain, dès le retour du printemps.

« Nos mesures fonctionnent, mais on doit reconnaître qu’on reste quand même dans un quartier qui demeure sous pression, surtout avec les travaux du pont-tunnel La Fontaine et le pont Jacques-Cartier à côté. On ne s’arrêtera pas là », explique à La Presse la responsable de la mobilité à la Ville, Sophie Mauzerolle.

La petite Mariia Legenkovska a été happée par un conducteur qui ne s’est jamais arrêté, le 13 décembre 2022, alors qu’elle se rendait à pied à son école du quartier Centre-Sud. Cette triste histoire avait engendré une vaste mobilisation citoyenne réclamant plus de mesures de sécurité routière sur le réseau local.

Dans la foulée, l’arrondissement de Ville-Marie a annoncé plusieurs mesures d’apaisement de la circulation depuis avril dernier. En plus d’une centaine de dos d’âne permanents installés, certains axes comme la rue Larivière ont été fermés à la circulation. Des rues ont aussi fait l’objet de « réaménagements », avec l’ajout de saillies de trottoir, alors que d’autres ont vu leur sens inversé.

Selon Sophie Mauzerolle, la mort de Mariia a certes été un « électrochoc », mais « le constat général reste difficile un an après ».

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Sophie Mauzerolle, élue responsable de la mobilité au comité exécutif

Ça reste fâchant et frustrant de voir que malgré tout ce qu’on fait, il y a encore autant de délinquance sur nos routes.

Sophie Mauzerolle, élue responsable de la mobilité au comité exécutif

Cette « délinquance », l’élue l’attribue surtout à l’augmentation constante du parc automobile. « Les gens ont beaucoup de difficulté à l’accepter, mais ce ne sont pas les chantiers et nos mesures d’apaisement qui créent plus de trafic. C’est plutôt le nombre de véhicules qui augmente. Et la délinquance vient du fait que les gens sont coincés et s’impatientent. Et plus le parc automobile va croître, plus les gens vont être pognés longtemps dans la congestion », soutient Mme Mauzerolle.

Un nouveau plan pour 2024

Montréal présentera d’ici le printemps prochain son plan de sécurisation 2024, qui comprendra plusieurs nouvelles mesures à implanter graduellement sur le territoire.

« Ça va inclure des mesures qu’on fait déjà, donc on continuera à déployer des dos d’âne, des saillies, mais on regarde aussi de nouvelles choses », explique la responsable municipale. Elle cite entre autres des traverses à mi-îlot ou des tête-bêche, ce qui revient à mettre du mobilier ou encore un terre-plein au milieu de la rue et à avoir deux sens différents de part et d’autre, afin de réduire la circulation de transit.

Le concept de rue piétonne et partagée, c’est quelque chose qu’on regarde aussi beaucoup dans certains secteurs.

Sophie Mauzerolle, élue responsable de la mobilité au comité exécutif

Plus globalement, la Ville constate depuis l’an dernier une hausse des demandes d’intervention en sécurité routière. Le plus récent budget montréalais, adopté lundi, prévoit entre autres l’embauche de neuf personnes pour accélérer l’implantation de mesures d’apaisement, partout dans l’île.

« C’est toute la ville qu’il faut sécuriser, ultimement. Et à la quantité de rues qu’on a, on n’est pas rendu, dit Mme Mauzerolle. Après, il n’y a pas de formule universelle et on ne veut pas déplacer de problèmes ailleurs. Mais si on juge qu’une intervention peut être faite, qu’un sens de rue peut être changé, par exemple, on va le faire, systématiquement. »

Plus de surveillance, mais…

Dans la dernière année, le Service de police de la Ville de Montréal a nettement accentué la surveillance dans le Centre-Sud et les environs. Les policiers ont remis de janvier à septembre 3847 infractions en mouvement, en hausse de 4 % par rapport à la même période en 2022.

Par contre, le bilan routier à la tête du pont Jacques-Cartier est en demi-teinte. Depuis l’accident, le quartier a enregistré une légère baisse du nombre de collisions (- 3 %), mais on y a déploré plus de morts et de blessés graves.

En effet, de janvier à septembre dernier, le corps policier a noté deux accidents mortels et quatre blessés graves, contre un mort et deux blessés graves durant la même période en 2022.

De son côté, le ministère des Transports a notamment fixé à 30 km/h la limite maximale en zone scolaire. Dans sa Stratégie nationale en sécurité routière, la ministre Geneviève Guilbault s’est aussi engagée à augmenter les amendes pour des infractions contre les piétons et les cyclistes et à hausser le nombre de radars photo sur les routes.

Du côté municipal, les heures de certaines voies réservées ont été revues. Des tronçons ont aussi été étendus, comme dans la rue Sherbrooke, alors que d’autres sont en réalisation, par exemple dans l’avenue De Lorimier.

L’histoire jusqu’ici 

13 décembre 2022 : Mariia Legenkovska est happée à l’angle des rues de Rouen et Parthenais.

14 avril 2023 : Montréal annonce un blitz de mesures dans Ville-Marie, dont l’ajout d’une centaine de dos d’âne, la fermeture ou le changement de sens d’une dizaine de rues.

6 mai 2023 : Un citoyen filme 44 automobilistes en une heure faisant un virage interdit à gauche à l’intersection des rues Rouen et Parthenais.

22 août 2023 : Geneviève Guilbault présente sa Stratégie nationale en sécurité routière, avec des amendes augmentées pour des infractions contre les piétons et les cyclistes et une réduction de vitesse en zone scolaire.