Une semaine à peine après sa mise en place, la nouvelle escouade policière dédiée à contrer le vol d’autos a mené un premier coup de filet dans le port de Montréal. Pas moins de 26 conteneurs ont été perquisitionnés mardi, permettant la saisie de 53 véhicules.

« On est très satisfait de cette première grosse opération », lance le lieutenant à la SQ, Matthieu Pronovost, qui promet d’en faire plusieurs autres au cours des prochains mois.

Ces derniers jours, des renseignements avaient été obtenus par des enquêteurs au sujet de deux exportateurs de véhicules volés. Il s’agissait de deux entreprises reliées à des milieux criminels.

Les dizaines de voitures étaient d’abord destinées vers des ports de transit au Maroc et en Belgique, « pour ensuite être transbordés dans d’autres navires de plus petite capacité, qui se rendent en bout de compte vers d’autres pays du Moyen-Orient, le plus souvent », précise M. Pronovost.

Plus tôt, la semaine dernière, La Presse rapportait d’ailleurs que la hausse des exportations de véhicules québécois volés par les réseaux criminels a fait apparaître un nouveau marché dans la ville portuaire d’Anvers, en Belgique. Des encans de modèles nord-américains y sont saisis par la police belge lors d’une escale et revendus au rabais pour la clientèle européenne.

Environ 90 000 voitures sont volées chaque année au Canada, ce qui entraîne des coûts d’environ 1 milliard pour les assurés et les contribuables canadiens. Le port de Montréal est devenu une plaque tournante pour l’exportation de véhicules volés.

Plusieurs stratagèmes sont utilisés pour déjouer les autorités policières. À Montréal, les véhicules volés se retrouvent dans le port parce que les réseaux criminels ont enregistré des entreprises qui servent d’écrans pour simuler des envois de marchandises.

Des peines plus sévères

Tout cela survient moins d’une semaine après la tenue d’un Sommet national sur le vol de véhicules, à Ottawa, lors duquel le gouvernement Trudeau a dévoilé jeudi les premiers contours de son plan pour lutter contre l’épidémie de vols d’automobiles au pays.

Parmi les mesures envisagées, Ottawa avait justement évoqué une collaboration accrue entre policiers et douaniers au port de Montréal, mais aussi des peines de prison plus sévères pour les voleurs et l’interdiction de la vente de dispositifs de piratage.

La Sûreté du Québec avait aussi dévoilé dans la foulée une nouvelle équipe dédiée aux vols de véhicule. La cellule en question comprend 30 ressources de la SQ, d’autres corps de police québécois et de la GRC.

« On le voit : les procureurs ont les dents un peu plus longues en ce moment, parce qu’ils voient comme nous que c’est une sphère qui alimente aussi la criminalité en général, ce qui engorge les tribunaux. Avec les premiers dossiers d’exportations de véhicules qui vont bientôt arriver à la Cour, on espère avoir un effet dissuasif pour les voleurs », avance M. Pronovost.

Sans dire qu’on va l’enrayer, on est capable de diminuer beaucoup le vol de véhicules. On a une bonne écoute politique et il y a beaucoup de pression sociale.

Matthieu Pronovost, lieutenant à la SQ

Bon nombre de corps d’organisation ont assisté la Sûreté du Québec, dont la Gendarmerie royale du Canada (GRC), la Police provinciale de l’Ontario (OPP) et d’autres services municipaux québécois. Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) a aussi collaboré, tout comme l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et l’Administration portuaire de Montréal (APM).

Tout évènement jugé suspect peut être communiqué de façon confidentielle à la Centrale de l’information criminelle de la Sûreté du Québec, en composant le 1-800-659-4264.

Québec veut plus de contrôle

À Québec, l’Assemblée nationale a adopté une motion pour demander au gouvernement fédéral « d’améliorer les contrôles à l’exportation des véhicules automobiles avec l’ajout d’effectifs et d’outils au Port de Montréal ». Elle réclame également d’Ottawa qu’il renforce « rapidement le Code criminel pour rendre plus sévères les peines relatives au vol de véhicules ». L’Assemblée nationale déplore la « hausse fulgurante du nombre de vols de véhicules » depuis 2021, tout en soulignant que « le phénomène permet de financer les activités du crime organisé transfrontalier ». Elle « constate que le port de Montréal est malheureusement devenu une plaque tournante du vol de véhicules au pays », toujours selon le libellé de la motion.

Tommy Chouinard, La Presse