Dans une chambre d'hôtel quelconque du Massachusetts (nord-est des Etats-Unis), un super-héros tiré à quatre épingles jette un dernier coup d'oeil dans le miroir et ajuste sa tenue avant de sortir accomplir sa mission.

Avec son feutre noir, sa chemise blanche, sa fine cravate noire et son jean ajusté, Chaim Lazaros, 24 ans, alias «Life», ressemblerait à n'importe quel jeune new-yorkais branché, si ce n'est le masque noir qui orne son visage.Il y a trois ans, le jeune homme, qui travaille «dans le civil» pour une radio universitaire, a fondé les «super-héros anonymes» avec Ben Goldman, un réalisateur de films documentaires.

Ce groupe revendique aujourd'hui quelque 200 membres, des «militants costumés» patrouillant les rues du pays dans le but de faire le bien de façon désintéressée.

Les missions qu'ils se sont fixées sont aussi variées que leurs tenues: aider les sans-abri, les prostituées, ramasser les ordures, enseigner les premiers secours et bien sûr lutter contre la criminalité.

Pour «Life», le costume sert la cause.

«Dans la rue, les gens écarquillent les yeux et posent des questions. Ils sont intéressés et curieux», affirme le jeune homme, qui s'est donné pour objectif de réconforter les sans-abri.

En septembre, une vingtaine de ces «super-héros anonymes» étaient rassemblés dans la station balnéaire de New Bedford, dans le Massachusetts, pour une réunion de trois jours mêlant concert de hip-hop, opération de nettoyage de la plage ou encore un atelier pour apprendre comment désarmer un ennemi.

Dans les rues, les passants pouvaient apercevoir une créature vêtue intégralement de noir, avec un bustier en velours, de longs gants et une cagoule en élasthanne ne laissant entrevoir que ses yeux.

«Scavenger» (la chiffonnière), une assistante sociale de 28 ans, explique que ce costume inquiétant lui a été inspiré par les corbeaux et vautours, les recycleurs de la nature.

«Ils nettoient et utilisent ce qu'ils trouvent pour vivre. Donc je ramasse les déchets dans la rue», dit la jeune femme, précisant que l'argent qu'elle récolte avec ce recyclage lui sert «à acheter des choses pour les sans-abri».

De son côté, Mike Johnson est pompier et responsable des secours médicaux dans l'Ohio (nord). Mais lorsqu'il enfile son costume jaune vif et noir, l'imposant jeune homme de 26 ans se transforme en «KnightOwl» (le chevalier hibou) et espère changer le monde.

«Je pense que n'importe quelle personne un tant soit peu observatrice peut se rendre compte qu'il y a quelque chose qui ne va vraiment pas dans la façon dont les gens agissent», dit-il.

«Nous essayons de remédier un peu à cela et d'alléger la souffrance autant que possible», ajoute le jeune homme.

Dans leurs efforts pour faire le bien, ces super-héros d'un nouveau genre prennent parfois des risques bien réels.

Chaim Lazaros affirme ainsi que lui et certains de ses confrères affrontent parfois les revendeurs de drogue armés uniquement de caméras.

Sur le blogue du groupe, certains expliquent comment fabriquer un costume pratique pour lutter contre le crime, notamment des tenues pare-balles.

Ils préconisent également des stratégies pour amadouer les autorités locales, suggérant par exemple de se rendre costumé à l'hypermarché local le jour de Halloween, lorsque les enfants se déguisent, et de répéter l'opération par la suite pour que les gens se familiarisent avec la présence des super-héros.