L'un des symboles culturels du Québec a été qualifié de tous les noms, autant de dégoûtant que de délectable, en passant par provocateur de crises cardiaques.

Mais est-ce que ce mets québécois de plus en plus populaire connu sous le nom de poutine - ce mélange étrange de frites, de sauce brune et de fromage en grains - pourrait maintenant être considéré comme une source de fierté pancanadienne?

Lorsqu'un groupe de «mangeurs professionnels» des États-Unis et une poignée d'amateurs canadiens se confronteront à l'occasion du championnat mondial de mangeurs de poutine, il n'aura pas lieu à Montréal, ni à Québec, ou ailleurs dans la belle province.

Il aura lieu, contre toute attente, à Toronto.

Et en raison des règles provinciales sur les concours, les Québécois ne pourront même pas y participer.

S'affranchissant de sa réputation de «nourriture de la classe ouvrière des petites villes québécoise», la poutine compte maintenant des amateurs partout au Canada et même au-delà de ses frontières.

La concoction a été intégrée à la haute cuisine et s'est fait une niche autant à New York qu'à Los Angeles.

«Je pense que ça démontre que la poutine est devenue un mets national», a déclaré l'auteur du livre Maudite poutine, publié en 2007, Charles-Alexandre Théorêt, en référence à l'épreuve de force alimentaire qui aura lieu le 22 mai au Stade BMO de Toronto.

«Ce qui était un mets québécois est maintenant partout», a-t-il ajouté.

Une dizaine de participants étoiles de la Ligue majeure des mangeurs - un circuit connu surtout pour ses indigestions de hot-dogs en temps record - auront 10 minutes pour engloutir autant de poutines que possible.

Le champion gagnera la modeste somme de 750$ et...les droits de s'en vanter!

Le porte-parole de la International Federation of Competitive Eating, Mike Antolini, a expliqué que les organisateurs ont considéré des établissements du Québec pour servir la poutine, mais ont finalement arrêté leur choix sur Smoke's Poutinerie, une chaîne torontoise.

«Je sais que les Montréalais estiment que la poutine leur appartient, mais nous allons couronner un champion canadien, et je crois que c'est la chose la plus importante parce que la poutine est canadienne avant tout», a-t-il souligné.

Bien sûr, cela n'a pas toujours été le cas.

Pendant des années, les villes de Warwick et de Drummondville ont toutes les deux clamé être le lieu de naissance de la poutine, mais une chose n'a jamais été remise en question, le mélange à base de frites est né au Québec.

La poutine a toujours entretenu un lien complexe avec les Québécois, nombreux d'entre eux levant le nez sur ce qu'ils considèrent être une abomination culinaire.

«C'est une relation amour-haine, il y a les plus jeunes qui sont très à l'aise avec la poutine et qui en ont même fait une icône à la mode», a expliqué M. Théorêt. «Mais les plus vieux n'ont pas grandi avec la poutine et croient qu'il s'agit d'un met bas de gamme. Il en ont honte», a t-il conclu.