Quand un candidat à la présidence des États-Unis est populaire et se fait élire par une forte vague, voire un raz-de-marée, il a un effet d'entraînement pour les candidats de son parti aux autres niveaux, au fédéral et dans les États.

Les Américains appellent cela le «coattails effect»: les candidats accrochés aux «basques de la redingote» de leur aspirant présidentiel se font élire avec lui.

Selon le nombre de candidats de son parti qui «passent» ainsi la barre, le jargon politique dit même si le président élu a eu «des basques longues» ou «courtes».

À cinq jours du scrutin de mardi, des sondages publiés hier donnent toujours au démocrate Barack Obama un net avantage sur le républicain John McCain. Le sondage Washington Post/ABC News le met huit points devant McCain (52% à 44%). Le baromètre quotidien Zogby lui donne sept points, celui de Rasmussen cinq. Le dernier sondage Gallup lui accorde entre cinq et sept points d'avance.

«L'effet Bradley»

Ces chiffres sont stables depuis des semaines. Répartis État par État, car ce sont les 538 voix du collège électoral qui décident, ces chiffres donnent des scénarios qui varient de 300 et plus pour Obama à au moins 265 pour McCain (la majorité requise est de 270).

Sur la base de ces chiffres, il est permis de prévoir l'élection d'Obama mardi, par un raz-de-marée même, peut-être. L'usure des républicains, les échecs de Bush, la soif de changement, le charisme d'Obama sont autant de facteurs qui justifient un tel scénario.

Mais il y a aussi «l'effet Bradley», du nom d'un ancien candidat noir au poste de gouverneur de Californie: il menait dans les sondages, mais il a été battu. Les analystes en ont déduit que, pour ne pas paraître racistes, les gens sondés ont dit l'appuyer, mais que, dans l'intimité du vote, ils l'ont rejeté.

Cet «effet Bradley» est évalué à quelque 6 points dans les sondages, ce qui veut dire que, à cinq jours du scrutin, Obama et McCain sont peut-être plus ou moins à égalité. La victoire d'Obama n'est pas garantie mardi.

Elle l'est d'autant moins que le tandem McCain-Palin brasse bien les pulsions de l'Amérique profonde. Ni la droite religieuse ni la droite laïque n'ont d'autre choix que de bloquer Obama. Pour cimenter les néolibéraux et les néoconservateurs derrière eux, McCain et Palin accusent aussi Obama d'être «socialiste» et de flirter avec des «terroristes».

Si Obama est victorieux mardi, il le devra peut-être à l'envers du coattails effect: c'est-à-dire que l'usure républicaine et la mobilisation démocrate à la base seront si déterminantes que c'est une vague populaire qui le porterait jusqu'à la Maison-Blanche - neutralisant «l'effet Bradley». Ce serait alors un «effet de poussée» au lieu d'un «effet d'entraînement».