La Sûreté du Québec envoie un message « inquiétant » et « véritablement troublant » en vue des prochaines élections en affirmant que les méthodes de sécurité des évènements politiques n’ont pas changé depuis l’attentat du Métropolis en 2012, s’alarme le chef parlementaire du Parti québécois, qui reproche au service de police de « protéger son image ».

Le parti de l’opposition réagissait aux révélations de La Presse vendredi matin. Dans le cadre du procès civil intenté par des survivants de l’attentat, le responsable de la sécurité du premier ministre a témoigné sous serment jeudi que la Sûreté du Québec (SQ) maintiendrait « le même » plan de base de sécurité si un parti politique célébrait les élections d’octobre prochain au Métropolis (maintenant le MTELUS).

Pourtant, le 4 septembre 2012, le soir de l’élection de la première ministre Pauline Marois, Denis Blanchette a été assassiné et Dave Courage a été gravement blessé par Richard Henry Bain. Aucun policier n’était vraisemblablement présent derrière la salle de spectacle pour lui barrer le chemin. Si son fusil ne s’était pas enrayé, un véritable carnage aurait eu lieu.

« Le plan de sécurité de base va être le même. […] La recette, c’est la même de 2012 à 2022. […] On applique les mêmes méthodes », a témoigné le lieutenant Pierre Bertrand, responsable de l’unité de protection rapprochée des dignitaires de la SQ. Son équipe protégera les quatre principaux chefs de parti pendant la campagne électorale, l’automne prochain.

PHOTO JACQUES BOISSINOT, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Joël Arseneau, chef parlementaire du Parti québécois

Cette position de la SQ « déçoit » et « inquiète » le Parti québécois (PQ). « J’aurais plutôt pensé qu’avec un certain recul, la SQ puisse admettre que ces évènements étaient absolument inadmissibles et inexcusables, qu’il y avait eu des failles majeures dans la sécurité assurée à la nouvelle première ministre, et que fort de l’examen des circonstances, on ait amélioré nos pratiques », soutient en entrevue Joël Arseneau, chef parlementaire du PQ.

Non seulement il y a eu mort d’homme, mais un « carnage » a été évité de peu, rappelle l’élu. Dans ce contexte, que la SQ dise que « tout a été fait dans les règles de l’art et qu’on n’a pas amélioré les pratiques, c’est véritablement troublant », insiste-t-il.

« On a une société encore plus polarisée qu’en 2012. Lorsque les émotions sont à fleur de peau, comme au sortir d’une pandémie, et qu’on a une campagne électorale qui s’en vient, on veut que la Sûreté du Québec, dans ses pratiques, soit à la fine pointe des méthodes d’intervention, alors que là, le message est plutôt inquiétant », conclut Joël Arseneau.

Témoignage du lieutenant Bertrand

Le lieutenant Bertrand témoignait jeudi au palais de justice de Montréal à la suite d’une requête des médias, dont La Presse, visant à contester une demande de huis clos et de non-publication réclamée par le Procureur général du Québec pour protéger de nombreux éléments touchant les mesures de sécurité en 2012.

Quatre survivants de l’attentat poursuivent la SQ et le Service de police de la Ville de Montréal pour les dommages subis en raison de la sécurité déficiente ce soir-là. Ils réclament chacun 125 000 $.

Le bureau de la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, n’avait pas répondu à notre demande d’entrevue vendredi en fin d’après-midi.

Avec la collaboration de Tommy Chouinard, La Presse