Un enfant de 2 ans a été tué par un chien, mercredi, dans un village du Grand Nord du Québec.

C’est au moins le troisième enfant du Nunavik à mourir de cette façon dans la dernière décennie.

« Un enfant de deux ans a été attaqué par un chien à Quaqtaq et il est malheureusement mort de ses blessures », a indiqué par courriel Jean-François Morin, du Service de police du Nunavik (SPN), la police locale. « L’évènement est survenu le 14 septembre vers 16 h 30. »

M. Morin n’a pas voulu préciser de quel type de chien il s’agissait, ni s’il avait un propriétaire.

Le dossier fait l’objet d’une enquête de notre unité d’enquête mixte et aucun autre détail ne sera diffusé par respect pour la famille.

Jean-François Morin, chef adjoint du SPN

La Sûreté du Québec (SQ) dit avoir confié le dossier à son unité d’enquête sur les crimes majeurs. « L’enfant a été transporté au CLSC de l’endroit, où malheureusement son décès a été constaté », a indiqué la policière Nancy Fournier. « L’enquête va être menée sous la loi sur le coroner. Le dossier va être remis au DPCP pour analyse. »

Quaqtaq est un petit village d’environ 400 habitants, à très forte majorité inuite. Comme les 13 autres villages de la région, il n’est accessible qu’en avion.

Le maire de Quaqtaq n’a pas immédiatement rappelé La Presse.

Troisième cas en 10 ans

La petite victime de mercredi est au moins le troisième enfant du Nunavik à mourir entre les griffes d’un chien dans les 10 dernières années.

En 2019, un bébé de seulement 1 an avait été retrouvé sans vie, portant des traces de morsures animales sur le corps, et à proximité d’une meute de chiens de traîneau, dans le village de Kangiqsujuaq.

Tout le monde est sous le choc. Les parents répètent aux enfants qu’ils ne doivent pas s’approcher des chiens, d’être prudents avec les chiens.

Qiallak Nappaaluk, mairesse du village de Kangiqsujuaq, en 2019

Le rapport du coroner sur ce décès n’est toujours pas disponible, plus de trois ans après les faits.

En 2014, c’est une fillette de 4 ans qui avait été tuée par un chien à Puvirnituq. « Elle était ma princesse », confiait à l’époque sa mère, Mary Uqaituk, au journal local Nunatsiaq News. « Elle parlait beaucoup. Elle était tellement intelligente. […] Elle était tout pour moi. Elle était amusante et me faisait rire. Elle était si précieuse à mes yeux. »

Le rapport du coroner sur cette mort conclut que la fillette aurait lancé des roches à un « chien féroce » attaché entre deux terrains du village, juste avant l’attaque. « Rien ne laisse présager la possibilité d’un acte criminel dans ce dossier », a déterminé le coroner Jean-Marc Picard. Il ne formule pas de recommandation particulière.

Vivre avec les risques

Francis Lévesque est professeur d’anthropologie à l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT). Dans les dernières années, il a dirigé un programme de recherche sur les relations entre chiens et Inuits.

À son avis, le coût prohibitif de la nourriture pour chiens et la rareté des soins vétérinaires dans le Grand Nord favorisent la présence d’une grande quantité de chiens en liberté et non castrés ou blessés.

« Dans la culture des Inuits, il y a aussi une volonté que les chiens soient autonomes. On l’entend encore », a-t-il relaté.

Les chiens doivent apprendre à se débrouiller, à se nourrir, à être autour d’êtres humains et on ne peut pas le faire en les laissant attachés. Mais ça vient avec des risques.

Francis Lévesque, professeur d’anthropologie à l’UQAT

Selon les dernières données disponibles chez Statistique Canada, le taux de mortalité chez les enfants inuits du Canada est environ cinq fois supérieur à celui des enfants en général.

En savoir plus
  • Moins de 40 %
    Proportion des chiens qui seraient stérilisés à Kuujjuaq, la plus grande ville du Nunavik
    SOURCE : Understanding the Connections Between Dogs, Health and Inuit Through a Mixed-Methods Study (2019)
  • 41 %
    Proportion des morsures signalées au système de santé du Nunavik entre 1996 et 2016 qui concerneraient des enfants de moins de 14 ans
    SOURCE : Portrait épidémiologique pour la caractérisation des signalements de morsure animale au Nunavik de 1996 à 2016 (2017)