Alors que le chorégraphe Eddy Toussaint fait face à une deuxième accusation d’agression sexuelle, l’école et la troupe de ballet qu’il a fondées prennent leurs distances et changent de nom. Des spectacles ont aussi été retirés de l’affiche dans la foulée des accusations, mais la direction estime qu’il est injuste de pénaliser les danseurs.

MPatricia Johnson, porte-parole du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP), indique que M. Toussaint fait maintenant face à deux chefs d’accusation d’agression sexuelle envers deux victimes distinctes. Celles-ci sont seulement identifiées par les initiales L.-P. L. et A. G., et les accusations portent sur des faits qui ont eu lieu entre 2015 et 2017.

Le Service de police de Laval (SPL) a annoncé au début du mois que M. Toussaint avait été arrêté et avait comparu en juillet en lien avec l’une de ces accusations. Il a été libéré « avec plusieurs conditions à respecter » et doit se présenter à nouveau devant la cour en novembre.

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La victime dans cette affaire était un homme « dans la vingtaine qui aspirait à un avenir dans la danse », que M. Toussaint avait pris sous son aile. « Au fil du temps, le suspect aurait exercé des pressions sur la victime afin d’obtenir des relations sexuelles avec lui », a indiqué le SPL par communiqué, précisant chercher d’autres victimes potentielles.

Dimanche, le directeur général de l’école et du Ballet Eddy Toussaint, Timothy Tompkins, a annoncé que ceux-ci changeaient de nom pour devenir le Conservatoire Ballet Tompkins et Ballet Tompkins du Québec, respectivement.

M. Toussaint s’est retiré de son poste de président du conseil d’administration de l’organisation et de son rôle de professeur dans la foulée de l’annonce des accusations, a déclaré M. Tompkins à l’occasion de ce qui devait initialement être l’inauguration des nouveaux studios de l’école.

Une situation « injuste »

La Ville de Laval a néanmoins retiré de l’affiche et suspendu la vente des billets du spectacle Dracula, que la troupe devait présenter en octobre à la Maison des arts, « afin de prendre le temps d’analyser l’ensemble des impacts occasionnés par les accusations majeures portées sur M. Toussaint ».

Des représentations du spectacle Casse-Noisette en décembre sont aussi en péril, selon la direction. L’école a également perdu des élèves, sans être en mesure de dire combien.

« On essaie de négocier avec la Ville de Laval parce qu’on a déjà dit que ce n’est pas juste que si quelqu’un est accusé, ce n’est pas une compagnie qui devrait souffrir », a déploré le directeur général. Il serait « dommage », selon lui, d’empêcher les danseurs et les élèves de performer, surtout après autant d’occasions manquées en raison de la pandémie.

« C’est injuste », laisse tomber Emeric Marchand, un danseur de la troupe. « Ça me fait de la peine, ça me déçoit », dit-il, soulignant tout le travail des dernières années.

La Ville de Laval se veut rassurante

Invitée à réagir, la Ville de Laval a dit vouloir « rassurer les professionnels et artistes du milieu de la danse puisqu’elle entend poursuivre son appui indispensable aux multiples productions réalisées sur son territoire ».

« La Ville a reçu les informations demandées à l’organisme vendredi et procède actuellement aux vérifications en lien avec la gouvernance présentée », a précisé le porte-parole Alexandre Banville. « La Ville appuie moralement toute personne victime d’abus sexuels à dénoncer ces situations auprès des autorités compétentes. »

Une douzaine de personnes se sont présentées aux studios de l’école dimanche à Laval, dont la chanteuse Patsy Gallant. Elle a décrit M. Toussaint comme « un homme extraordinaire », et a fait part de son soutien. « Le mouvement #metoo était très nécessaire, est toujours nécessaire, a-t-elle ajouté, mais je trouve que des fois, il y a des abus. »