(Montréal) Gary Arnold, un Québécois reconnu coupable de participation à l’enlèvement en 2020 d’un couple d’Américains du nord de l’État de New York, a été condamné lundi à une peine de 13 ans d’emprisonnement.

Le juge Michel Pennou, de la Cour supérieure à Montréal, a précisé lundi qu’en tenant compte du temps déjà purgé en détention préventive, Arnold devra encore passer neuf ans, deux mois et six jours en prison.

Compte tenu de l’ensemble de la preuve, a conclu le juge Pennou, le tribunal est convaincu au-delà de tout doute raisonnable que M. Arnold a été impliqué du début à la fin dans la planification et l’exécution de l’enlèvement et de l’extorsion.

La Couronne réclamait une peine de 17 ans pour Arnold, qui avait été arrêté le 1er octobre 2020, et reconnu coupable par un jury, en février, de cinq chefs d’accusation, dont enlèvement, extorsion et complot en vue d’un enlèvement.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Sandra Helm (au centre), l’une des victimes

On a appris au procès qu’Arnold avait fait partie d’un complot visant à enlever James et Sandra Helm, un couple de septuagénaires de Moira, dans le nord de l’État de New York. La poursuite a soutenu que les deux septuagénaires américains avaient été enlevés dans le cadre d’une transaction de drogue qui avait mal tourné impliquant leur petit-fils.

Quatre coaccusés dans cette affaire avaient été arrêtés le 29 septembre 2020 – le jour même où des membres du Groupe tactique d’intervention de la Sûreté du Québec libéraient le couple dans un chalet à Magog, dans les Cantons de l’Est, après deux jours de séquestration. Les quatre autres accusés ont écopé de peines de six à 15 ans de prison.

La Couronne a affirmé que les deux Américains avaient été enlevés comme moyen de pression par un groupe d’hommes qui voulaient récupérer 50 kilos de cocaïne ou 3,5 millions en espèces, depuis que leur petit-fils avait été arrêté dans le Vermont six jours plus tôt en possession de la drogue.

Les Helm avaient été enlevés chez eux et introduits clandestinement au Canada via le territoire mohawk de Kanesatake, puis détenus dans un chalet à Magog.

Conditions de détention dures

Le juge Pennou a cité un certain nombre de facteurs aggravants qui justifieraient une peine plus longue, notamment l’âge et la vulnérabilité des victimes, ainsi que l’impact de ces évènements traumatisants sur leur santé et leur vie quotidienne. Arnold avait également un casier judiciaire lié à la contrebande de drogues et de cigarettes, bien qu’aucune de ses infractions n’ait été violente.

Mais le juge a admis qu’Arnold avait été soumis à des conditions de détention particulièrement dures, ce qui, selon le magistrat, devrait réduire le temps que l’accusé devra encore passer derrière les barreaux. Arnold, a déclaré le juge, s’est vu refuser les médicaments qui lui avaient été prescrits pour le psoriasis, une affection cutanée douloureuse.

La défense avait requis 10 ans de prison pour Arnold, qui a soutenu au procès qu’il avait agi sous des menaces contre sa vie et sa famille, qu’il ne savait rien du complot d’enlèvement et n’avait jamais rencontré de membre de la famille Helm. Il a aussi nié avoir été à l’intérieur de la maison du couple.

Arnold a déclaré qu’il avait suivi les ordres d’un certain « Big », qui lui avait demandé d’effectuer diverses tâches telles que transporter des téléphones, envoyer des textos et récupérer des cathéters dont Sandra Helm avait besoin.

Le juge Pennou a déclaré que bien qu’il soit impossible de savoir précisément pourquoi le jury avait rendu son verdict, il a décrit le témoignage d’Arnold comme généralement non crédible, qui laissait une forte impression de pure fabrication.

Le juge a déclaré que le témoignage comprenait des détails étonnants sur des conversations qui auraient eu lieu deux ans plus tôt, ainsi que des affirmations commodes et absurdes de l’accusé. Bien qu’il ne soit pas invraisemblable qu’Arnold ait été sous pression pour participer aux crimes, le juge Pennou a déclaré qu’on ne pouvait pas se fier à son témoignage.

S’exprimant après le prononcé de la peine, la procureure de la Couronne Kim Chaiken a reconnu que ces 13 ans étaient inférieurs aux 17 ans espérés par la poursuite, ajoutant qu’elle prendrait le temps de lire le jugement avant de décider de faire appel. Alors que James Helm est décédé, elle a rappelé que Sandra Helm devrait vivre avec l’impact de cet enlèvement.

« Il est certain que Mme Helm ainsi que son fils ont vécu ces évènements de façon très difficile et encore aujourd’hui, ils ont des impacts qui vont rester jusqu’à la fin de leurs jours, au niveau de la crainte pour leur sécurité ainsi que leur mode de vie qui a complètement changé », a expliqué Me Chaiken à sa sortie de la salle d’audience. « On va leur souhaiter bonne chance. »

L’avocat de la défense, John T. Pepper Jr., a déclaré que le juge avait tenu compte du fait que son client n’avait pas reçu le traitement médical requis en détention. Il a déclaré que l’absence de médicaments pendant sa détention avait causé à son client de grands épisodes de douleurs qui avaient même laissé des traces de sang sur ses draps.

« Deux accusés ont été condamnés à 15 ans et 13 ans, notre client est condamné à 13 ans, moins le crédit auquel il a droit [pour la détention préventive]. Le juge a bien appliqué le droit », a résumé Me Pepper Jr. « Selon moi, ce serait difficile de faire infirmer (cette peine) en Cour d’appel. »