Une vaste poursuite intentée contre le gouvernement par une fondation qui avait récolté plus d’un million de dollars en dons du public pour contester les mesures sanitaires pendant la pandémie de COVID-19 vient d’être rejetée par la Cour supérieure parce qu’elle est devenue « purement théorique ».

La Fondation pour la défense des droits et libertés du peuple (FDDLP), dirigée par l’ex-comptable Stéphane Blais, cherchait par cette action à faire invalider l’ensemble des amendes de 1546 $ imposées aux récalcitrants pendant la crise, et à forcer l’État à rembourser les contrevenants. Cette demande a été jugée « imprécise et impraticable » et « impossible à faire exécuter » par la Cour supérieure.

La poursuite, niant carrément l’existence de la pandémie, était basée sur l’opinion de plusieurs « experts de renommée mondiale », dont le DChristian Perronne, et soutenait notamment que le port du masque pouvait causer des « problèmes cognitifs » et même mener à une « mort subite ».

L’argent qui a servi à financer la poursuite avait à la base été récolté en mai 2020 lors d’un web-o-thon dont les têtes d’affiche étaient le leader complotiste Alexis Cossette-Trudel, l’actrice Lucie Laurier, le blogueur Dan Pilon et André Pitre, un ancien conférencier du groupe identitaire La Meute.

La FDDLP a plaidé que 17 005 personnes ont contribué au financement de la poursuite, et que leur refuser le droit d’être entendues « sur une question aussi fondamentale que de savoir s’il y a bel et bien eu une pandémie » serait « tout un affront à ces personnes et tout un gaspillage des ressources qu’elles ont investies ».

Dans un jugement très technique de 44 pages, le juge Michel A. Pinsonnault conclut qu’en raison de la fin de l’urgence sanitaire décrétée le 1er juin 2022, « les questions soulevées ne justifient pas, dans un intérêt public, l’utilisation des ressources judiciaires de la Cour » pour étudier « l’ampleur de la preuve envisagée par les demandeurs ».

« Le Tribunal ne peut se substituer au gouvernement ou à l’Assemblée nationale pour décréter ou nier [après les faits] l’existence de l’état d’urgence sanitaire. Une telle décision du gouvernement relève de la sphère politique », indique le juge, et ce n’est pas le rôle des tribunaux de trancher la question, « mais bien celui des urnes », ajoute-t-il, accueillant la demande du Procureur général du Québec de rejeter la poursuite.

La Fondation pour la défense des droits et libertés du peuple a fait savoir qu’elle étudierait la possibilité de porter la décision en appel. « Nous sommes extrêmement attristés par ce jugement. Nous avons de bons experts, de bons avocats, on aurait difficilement pu faire mieux », a déclaré son président, Stéphane Blais.

La FDDLP a d’abord été représentée par l’avocat constitutionnaliste Guy Bertrand, qui s’est subitement retiré du dossier en reprochant à Stéphane Blais d’avoir « détruit [sa] propre crédibilité face à la Cour » par ses « déclarations souvent intempestives » en lien avec la COVID-19. Un autre avocat, MDominic Desjarlais, a déposé la plainte, puis s’est aussi subitement retiré du dossier après que La Presse eut révélé, en octobre 2021, que M. Blais et le directeur de la FDDLP étaient au lit depuis plusieurs jours, infectés par la COVID-19, et refusaient de se faire tester. La poursuite a par la suite été plaidée devant la cour par Lily Monier et Stéphane Blais, qui ne sont pas avocats.

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