Un résidant d’Ottawa de 26 ans, soupçonné d’avoir participé à la production d’une vidéo de propagande hyperviolente du groupe néonazi Atomwaffen Division, à Saint-Ferdinand, dans le Centre-du-Québec, fait face à de rares accusations d’avoir participé à une activité terroriste et d’avoir fomenté volontairement la haine au profit d’une organisation terroriste.

« C’est très sérieux. C’est une première historique pour le Canada. On n’avait pas utilisé la loi antiterroriste à ce jour pour contrer les activités des gens associés à l’idéologie extrémiste de droite, et contre une personne accusée d’avoir participé à la propagande de ce groupe-là », indique l’inspecteur David Beaudoin, de l’Équipe intégrée à la sécurité nationale (EISN) de la GRC, qui a mené l’enquête.

L’accusé, Patrick Gordon MacDonald, comparaîtra à 14 h 30 au palais de justice d’Ottawa. Il aurait collaboré à la production de trois vidéos d’Atomwaffen Division, dont une qui aurait été tournée en partie dans une ancienne école désaffectée de Saint-Ferdinand, autour de 2019. Une soixantaine de policiers de la GRC, lourdement armés, avaient perquisitionné cette école en juin 2022.

La Presse avait pu confirmer, grâce à des détails architecturaux de l’immeuble aperçus dans des vidéos de propagande d’Atomwaffen Division, qu’au moins quatre hommes s’y étaient filmés, en tenue de combat paramilitaire, en train de faire des manœuvres avec des armes à feu. Une voix hors champ tenait des propos antisémites violents.

Attomwaffen Division, qui prône une idéologie de « guerre sainte raciale » et voue un culte au tueur en série Charles Manson, a été inscrite à la liste des entités terroristes du Canada en 2021. L’organisation a tenu différents « camps de la haine » lors desquels ses membres étaient formés au maniement des armes. Elle est considérée de la mouvance « accélérationniste » parce que ses membres cherchent à provoquer l’effondrement de la démocratie par le déclenchement d’une guerre civile armée. Les policiers américains ont notamment trouvé des explosifs chez quatre des membres fondateurs, qui devaient servir à un attentat contre des centrales nucléaires américaines afin de déstabiliser le système politique et mettre sur pied un 4e Reich.

Selon le magazine Vice, Patrick Gordon MacDonald, un graphiste qui travaillait sous le pseudonyme Dark Foreigner, a modifié plusieurs symboles nazis pour créer la signature visuelle d’Atomwaffen Division.

« Au cœur des accusations déposées contre M. MacDonald se trouve sa collaboration, sa participation, et surtout, la distribution de certaines vidéos et d’autres éléments de propagande liés à Atomwaffen Division », explique l’inspecteur Beaudoin.

Patrick Gordon MacDonald est accusé de participation à une activité terroriste, de facilitation d’une activité terroriste et d’avoir fomenté volontairement la haine au profit d’un groupe terroriste. Cette dernière accusation est passible de prison à vie.

Jusqu’à maintenant, les dispositions du Code criminel visant les activités terroristes n’avaient été utilisées que contre des groupes extrémistes religieux, notamment contre un groupe de Montréalais partis se battre en Syrie pour le Groupe armé État islamique, en 2014.

Le fait qu’Atomwaffen Division soit officiellement inscrit sur la Liste des entités terroriste a rendu possibles ces accusations rares.

« On utilise les dispositions antiterroristes pour envoyer un message très clair. Les gens ont une conception assez fermée de ce qui constitue du terrorisme. C’est une opportunité de démontrer que ce genre d’action-là, que ce soit relié à de l’extrémisme religieux ou idéologique, ne sont pas tolérées au Canada », affirme l’inspecteur Beaudoin.

Un deuxième individu arrêté à Kingsey Falls, au Québec, pourrait faire face à des accusations ultérieurement.