Un prédateur sexuel qui se faisait passer pour un policier pour agresser sexuellement des travailleuses du sexe a été condamné mardi à une peine « très sérieuse » de huit ans d’emprisonnement. Les victimes de Mohamad Abdool Koheeallee étaient des femmes « particulièrement vulnérables », selon le juge.

« Les crimes sont prémédités et planifiés. Les victimes sont choisies en raison de leur occupation. […] Les victimes étaient des femmes vulnérables choisies en raison de leur situation personnelle », a souligné le juge Yves Paradis, mardi au palais de justice de Montréal.

Le magistrat s’est ainsi rangé aux arguments de la Couronne qui réclamait huit ans de détention contre l’accusé afin de dénoncer ces agressions visant « quatre femmes innocentes […] choisies à cause de leur métier ».

À l’audience précédente, l’une des victimes avait d’ailleurs lancé un message percutant à la cour sur la réalité des travailleuses du sexe à Montréal. « Je suis consciente que la société a beaucoup de préjugés envers le métier d’escorte, mais je souhaite mentionner qu’on mérite, comme toutes les autres femmes, d’être respectées. »

Formé en ingénierie, le Montréalais de 38 ans était un prédateur sexuel, une fois la nuit tombée. Son modus operandi était bien rodé : il fixait un rendez-vous avec une travailleuse du sexe. Une fois qu’elle était dans son véhicule, il brandissait un insigne de police, se présentait comme un policier « undercover » et informait la femme qu’elle risquait un casier judiciaire. Il offrait ensuite à sa victime de lui faire une fellation pour éviter d’être arrêtée.

En six mois, en 2019 et 2020, Mohamad Abdool Koheeallee a ainsi agressé sexuellement trois femmes, convaincues qu’elles étaient sous le joug d’un véritable policier. L’une des victimes était une ex-fugueuse de 18 ans. Une quatrième victime a été relâchée par l’accusé sans avoir été agressée, mais a été victime d’extorsion.

« Il n’a démontré aucune compassion ou considération pour ces femmes », souligne le juge.

La victime de 18 ans a été particulièrement ébranlée par l’agression sexuelle très intrusive qu’elle a subie. « J’ai rapidement sombré dans la drogue pour oublier. […] Les crises de panique font partie de mon quotidien », a-t-elle témoigné, en mai dernier. On lui a diagnostiqué une maladie transmissible sexuellement et elle a dû être opérée.

« Les séquelles psychologiques sur toutes les victimes sont importantes : anxiété, hypervigilance et perte de confiance envers les autres. Dans le cas [de la victime de 18 ans], les conséquences sont dramatiques », affirme le juge.

Selon le juge, Mohamad Abdool Koheeallee a exploité la « vulnérabilité des travailleuses du sexe face aux policiers en raison du contexte de leur occupation ». Il s’agit ainsi d’un facteur aggravant. Aux yeux de l’accusé, les travailleuses du sexe étaient « habituées », puisque c’était leur « gagne-pain ». Il voyait ses crimes comme une « fraude ».

Les rapports d’expertise ne brossent pas un portrait positif du prédateur, dont le risque de récidive est dans la « moyenne » des autres délinquants. Même après trois ans de détention, le diplômé en ingénierie – qui a été ingénieur junior jusqu’en 2016 – utilise toujours un discours « rhétorique et intellectuel » au lieu de faire son introspection. Le juge évoque même « un savant mélange de minimisation, d’intellectualisation, de rationalisation et d’externalisation » dans son discours.

La procureure de la Couronne MAnna Levin s’est montrée satisfaite. « C’étaient des femmes clairement effrayées, qui ont vécu de réels traumatismes. C’étaient des femmes dans un contexte très vulnérable », a-t-elle affirmé, en mêlée de presse.

« Le message le plus important, c’est de dénoncer. Les victimes doivent dénoncer, peu importe leur situation. […] Ça a mené, trois ans plus tard, à une condamnation et à une peine très sérieuse », a insisté MLevin.

L’avocate de la défense, MMarie-Hélène Giroux, réclamait cinq ans de détention.

Comme Mohamad Abdool Koheeallee est détenu depuis janvier 2020, il a déjà purgé plus de la moitié de sa peine de huit ans, puisque le temps préventif est calculé à temps et demi.