Alors que policiers et criminels appréhendaient un été chaud en matière de violences par arme à feu à Montréal, celles-ci ont diminué de 30,5 % depuis le début de la période estivale, comparativement à la même période l’an dernier. Mais le meurtre d’un jeune homme lié aux gangs de rue lundi pourrait changer la donne.

Autant à Montréal qu’à Laval, les policiers craignent en effet des représailles à la suite du meurtre de Justice Owusu Tajudeen, 28 ans, tué par balle au centre-ville de Montréal dans la nuit de dimanche à lundi, a appris La Presse.

Selon des sources policières et du milieu, Justice Owusu Tajudeen était lié à un gang de rue d’allégeance bleue impliqué dans un conflit avec des groupes d’allégeance rouge de Laval.

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Justice Owusu Tajudeen

D’après nos informations, chacun des deux camps adverses compte sur des gangs alliés dont les membres sont autant présents à Montréal qu’à Laval, dans différents secteurs des deux villes, et des commentaires faits depuis lundi sur les réseaux sociaux n’augurent rien de bon, appréhende la police.

Par exemple, des membres de gangs lavallois se sont publiquement moqués des amis de la victime sur les réseaux sociaux quelques heures après l’annonce de sa mort. Des comptes Instagram anonymes ont également nargué les proches du défunt, surnommé Steady.

Il y a deux semaines, Tajudeen, qui aurait été lié aux gangs Villeray 99 et Downtown Projekt (Plan Jeanne-Mance), avait été impliqué dans une altercation avec deux individus reliés aux 24 Gang et aux Flameheads, deux groupes alliés d’allégeance rouge, dans un magasin du Carrefour Laval.

La tendance à la baisse se poursuit

Mais depuis le début de l’été, les évènements de coups de feu sont en baisse à Montréal.

Des statistiques obtenues par La Presse auprès du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) indiquent que 25 décharges d’arme à feu sans victime, tentatives de meurtre et meurtres par arme à feu sont survenus dans la métropole en juin et juillet de cette année, comparativement à 36 pour les deux mêmes mois en 2022.

Sur une plus longue période, de janvier à juillet inclusivement, tous les évènements de décharge d’arme à feu confondus ont diminué de près de 32 % comparativement aux sept premiers mois de l’an dernier.

Le SPVM prévient cependant qu’il s’agit de données temporaires et que celles-ci pourraient évoluer au fil des enquêtes.

La publication de ces statistiques survient au moment où un meurtre par arme à feu, un septième cette année, a été commis dans le centre-ville de Montréal dans la nuit de dimanche à lundi.

Depuis le début du mois d’août, en une semaine, il y a eu cet homicide et des coups de feu tirés sur un commerce de l’est de l’île lié à un mafieux, selon une compilation maison de La Presse.

Individus hors d’état de nuire

En entrevue avec La Presse au début du mois de juillet, le commandant de la Division du crime organisé (DCO) du SPVM, Francis Renaud, se montrait satisfait de cette baisse, mais demeurait prudent en se disant conscient qu’une recrudescence des violences armées dans la métropole pouvait survenir à tout moment.

Sans pouvoir expliquer les raisons de cette diminution, M. Renaud a souligné certains facteurs qui pourraient y avoir contribué.

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Dans le cadre du projet Arrêt, le SPVM a ajouté des effectifs à la lutte contre les violences armées dans la métropole.

Ainsi, au printemps dernier, les enquêteurs de la DCO et leurs collègues des Crimes majeurs ont effectué des perquisitions et des arrestations d’individus dangereux liés à des gangs de rue du nord-est de Montréal qui auraient été impliqués dans des évènements violents survenus depuis 2021.

Plusieurs autres individus connus comme étant des utilisateurs d’armes à feu sont par ailleurs actuellement derrière les barreaux.

Au début de l’été, le SPVM a mis sur pied ce qu’il a appelé des « collectifs », une nouvelle stratégie de prévention et de répression ciblant des individus à risque.

Le SPVM a également ajouté des effectifs à la lutte contre les violences armées dans le cadre d’une offensive baptisée Arrêt.

Il y a aussi les enquêteurs des Équipes multisectorielles dédiées aux armes à feu (EMAF), leurs collègues des Stupéfiants et les membres de l’escouade Éclipse, spécialisée dans la surveillance des bars et la collecte de renseignements, qui s’attaquent quotidiennement au phénomène.

Enfin, le SPVM est appuyé par d’autres corps de police, dont la Sûreté du Québec, par l’entremise des Équipes intégrées de lutte contre le trafic d’armes (EILTA) dans le cadre de la stratégie québécoise de lutte contre la violence armée Centaure.

Les tensions vives au sein du crime organisé de haut niveau, qui se sont traduites par la tentative de meurtre sur Leonardo Rizzuto à la mi-mars et les meurtres de Claudia Iacono et de Francesco Del Balso les 16 mai et 5 juin derniers, se sont vraisemblablement apaisées depuis le début de l’été, même si elles pourraient toujours être présentes, selon nos sources.

Avec la collaboration de Mayssa Ferah, La Presse

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.

Violences par arme à feu

Comparaison des sept premiers mois de 2023 par rapport à la même période en 2022

  • Meurtres par arme à feu : baisse de plus de 25 %
  • Tentatives de meurtre avec arme à feu : baisse de 16,7 %
  • Décharges d’arme à feu sans victime : baisse de 38,3 %
  • Total : baisse de 31,9 %

Source : SPVM