Dans un cas cruel de « sextorsion » d’enfants en ligne, un coiffeur montréalais a écopé jeudi de quatre ans de pénitencier. Mitchel Sendel était sans pitié : il réclamait toujours plus de vidéos même si sa victime de 12 ans disait vouloir mourir pour que son cauchemar cesse.

« Le délinquant a exploité les vulnérabilités de deux jeunes filles pour les dégrader, les humilier et les menacer. Ceux qui envisagent d’utiliser l’internet pour exploiter des enfants doivent être avertis que cela sera sévèrement condamné par les tribunaux », a conclu le juge Salvatore Mascia.

L’Ontarien de 33 ans, qui a été coiffeur durant plusieurs années dans l’est de Montréal, espérait s’en tirer avec moins de deux ans de prison, alors que la Couronne réclamait cinq ans de détention. Mitchel Sendel a plaidé coupable l’an dernier à des chefs de leurre, de production et de possession de pornographie juvénile.

Le prédateur utilisait les réseaux sociaux Facebook, Instagram et Omegle pour arriver à ses fins. En 2019, il a réussi à arracher une vidéo sexuellement explicite d’une jeune Américaine de 12 ans de l’Ohio. Il l’a alors menacée de partager cette vidéo sur les réseaux sociaux et sur des sites pornos si elle ne lui donnait pas d’autres contenus similaires.

Même si l’adolescente le suppliait d’arrêter et lui disait vouloir mourir, Sendel n’en avait cure. Il continuait de la menacer et multipliait les ultimatums pour réclamer plus de photos.

« [Elle] se sentait prise au piège et pensait que sa seule issue, face aux demandes croissantes de l’accusé, était de se suicider », a résumé le juge.

Mitchel Sendel est même allé jusqu’à menacer une amie de sa première victime : si la jeune de 11 ans ne lui envoyait pas des vidéos explicites d’elle, il publierait en ligne les vidéos de son amie.

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Mitchel Sendel s’est caché avec son sac à la vue des journalistes.

Le prédateur sexuel utilisait une photo de la célèbre série pour enfants The Muppets sur son profil Omegle, une application de clavardage avec des personnes anonymes. Sendel profitait de cette application pour discuter avec des enfants âgés de 10 à 18 ans. Sur une vidéo trouvée chez lui, on peut entendre une fille lire des directives de l’accusé : « enlever son chandail et se toucher la poitrine ».

Des milliers de photos

Dans son appartement de Saint-Léonard, les policiers ont mis la main sur des milliers de photos de pornographie juvénile, dont des dizaines de clichés tirés de la vidéo arrachée à sa première victime.

Même s’il reconnaît avoir manipulé sa première victime, Mitchel Sendel a peu d’empathie envers celle-ci. Selon lui, l’adolescente exagérait lorsqu’elle lui disait vouloir mourir.

« Il n’hésitait pas à utiliser la manipulation et la violence psychologique pour arriver à ses fins », conclut le rapport présentenciel.

Selon un autre expert, Mitchel Sendel n’a aucune « compassion » pour ses jeunes victimes, qu’il traite comme de simples « objets sexuels ». « J’étais prêt à dire ou faire n’importe quoi pour obtenir ce que je voulais. Je voulais seulement jouir [to get off] », a expliqué Sendel à un sexologue.

Mitchel Sendel jette même le blâme sur sa consommation d’alcool et ses problèmes psychologiques. De surcroît, il nie son attirance sexuelle à l’égard des adolescentes, malgré les conclusions du sexologue.

« Si elles ont des seins, si elles ont des fesses, je vais dire : OK. Je ne crois pas avoir un problème », a témoigné Sendel.

Le juge a rappelé que la « sextorsion » peut avoir de graves répercussions : humiliation, anxiété, dépression et même suicide. Une victime de « sextorsion » vit en effet dans la peur de voir apparaître en ligne sa photo à tout moment. « Les victimes de pornographie juvénile sont des victimes pour la vie », a insisté le juge.

Le magistrat a aussi retenu comme facteurs aggravants la conduite prédatrice de Mitchel Sendel et son mépris complet de la souffrance des victimes.

Comme facteurs atténuants, le juge a souligné la reconnaissance de la culpabilité – quoique tardive –, l’amorce de réhabilitation de l’accusé et ses remords exprimés en salle d’audience. Cependant, ces facteurs ne font pas le poids par rapport aux objectifs de dénonciation et de dissuasion, conclut le juge.

Cependant, si Mitchel Sendel n’avait pas conclu une thérapie fermée pour ses problèmes d’alcool, sa peine aurait certainement été plus élevée, a indiqué le juge.

MCamille Boucher a représenté le Directeur des poursuites criminelles et pénales, alors que MStéphanie Basso défendait l’accusé.

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