Un ostéopathe montréalais accusé d’avoir agressé sexuellement une cliente a été acquitté mardi. La juge Joëlle Roy écorche la crédibilité de la plaignante pour être restée seins nus pendant le traitement et avoir gardé les yeux fermés pendant les gestes allégués.

« Le Tribunal croit l’accusé. » Sufyan Haji Bik s’est effondré au sol lorsque la juge Roy a prononcé son acquittement mardi après-midi au palais de justice de Montréal. Les larmes aux yeux, le thérapeute de 60 ans semblait bouleversé.

La juge a entièrement retenu le témoignage de l’accusé, qui a juré n’avoir jamais agressé cette femme. Sufyan Haji Bik n’avait gardé aucun souvenir de sa cliente. Il disait toutefois craindre la COVID à l’époque et porter en tout temps deux masques et des gants. Selon la juge Roy, la plaignante aurait dû remarquer que l’homme avait deux masques.

La femme a raconté au procès avoir été agressée par Sufyan Haji Bik au printemps 2021. Un proche lui avait recommandé les services de cet ostéopathe de l’ouest de Montréal pour une hernie discale et une douleur à l’épaule.

Selon la plaignante, l’accusé lui faisait d’emblée des compliments « non appropriés » en lui disant qu’elle était « très belle et une bonne fille ». Elle faisait également les traitements sans son soutien-gorge, ce qui l’embarrassait, disait-elle.

« Le mot « embarrassée » revient souvent dans son témoignage. […] Si sa nudité l’embarrassait, elle pouvait remettre ses sous-vêtements. Elle en était libre. Tout comme elle était libre de prendre une serviette », souligne la juge Roy.

« Pas de souci de justesse »

Pendant le troisième traitement, la plaignante raconte avoir senti sur ses seins un objet qui faisait un effet de « succion ». Or, la femme n’a pas vu l’objet – décrit comme un cône – puisqu’elle a gardé les yeux fermés. Toujours selon la plaignante, l’accusé lui a ensuite touché rapidement la vulve et la région pelvienne. Elle aurait ensuite dit à l’homme de cesser en lui prenant le poignet. Son cœur battait la chamade après les faits, raconte-t-elle.

« Si elle dit être capable de prendre les poignets de l’accusé afin qu’il cesse de la masser dans la région pelvienne et de lui dire qu’elle est là pour son dos, elle peut aussi ouvrir les yeux lors de l’épisode des « cônes », ce qu’elle ne fait pas », conclut la juge Roy. Également, la femme n’a pas mentionné la « succion » aux policiers, souligne la juge.

Même si les gestes décrits par la plaignante étaient vrais, ceux-ci ne constitueraient pas un acte à connotation sexuelle, selon la juge Roy. « Le geste n’est pas spécifique. […] Il était lors d’un traitement, en portant des gants. L’utilisation de l’huile a pu faire glisser la main et le geste est très rapide », énumère-t-elle.

La juge reproche particulièrement à la plaignante d’avoir décrit le mauvais immeuble, soit celui voisin de celui de l’accusé. Une erreur majeure aux yeux de la magistrate. « Il n’y a pas de souci de justesse dans son témoignage », tranche la juge Roy.

Au début de sa décision, la juge a rappelé « être bien aux faits […] de l’application de mythes et de stéréotypes en matière d’agression sexuelle » et a assuré que les faits décrits dans son jugement « ne servent pas à attaquer la crédibilité de la plaignante sous cet angle ».

MKahina Rougeau Daoud a représenté le ministère public, alors que MAudrey Amzallag a défendu l’accusé.