Le documentariste Sébastien Rioux devra finalement attendre encore plusieurs mois avant de connaître la peine qui sera imposée à son cyberharceleur Peter Poncak, qui lui a fait vivre un véritable enfer en ligne pendant deux ans. Vendredi, la cause a été reportée en février, en raison de l’engorgement des tribunaux.

« Votre dossier a une importance et je veux être capable de lui accorder le temps dont il a besoin », a indiqué la juge Luce Kennedy à M. Poncak, qui s’était déplacé au palais de justice de Rivière-du-Loup. Sébastien Rioux y était aussi et devait lire une déclaration à la Cour durant l’audience.

L’engorgement des nombreux dossiers a toutefois empêché la juge de procéder. La magistrate en a d’ailleurs profité pour souligner la surcharge de travail qui pèse en ce moment sur la Cour. « On a tellement de dossiers, on est rendus à fixer des dossiers en juillet et en août actuellement à Rivière-du-Loup parce qu’on a tellement de volume. C’est la réalité ici et je ne peux pas changer ça », a-t-elle dit, en s’excusant.

La sentence de Peter Poncak devait initialement être prononcée en septembre, mais avait été reportée au 13 octobre. L’audience est maintenant fixée au 2 février 2024, en matinée. Le dossier a été marqué comme prioritaire.

Appelé à réagir vendredi, Sébastien Rioux n’a pas caché sa déception. « Ça va être la 14e fois que je vais me présenter en Cour en février. Je comprends bien que le système judiciaire est engorgé, mais je ne vous cacherai pas que je suis dépassé par les évènements. C’est long et ça n’en finit plus de finir », souffle-t-il.

« J’aurais voulu avoir un beau cadeau de Noël et que ça se règle cet automne. Maintenant, qui sait ce qui se passera le 2 février ? », poursuit M. Rioux, pour qui « le plus dur, c’est de le revoir chaque fois et qu’il soit libre ». Il espère encore qu’une « sentence exemplaire » soit rendue à terme par la Cour « pour montrer que ça ne se fait pas, que ce n’est pas un comportement accepté par notre société et pour dissuader d’autres personnes de le faire ». « Il faut lancer un message fort », ajoute-t-il.

Longue saga

Sébastien Rioux est un documentariste et musicien de Trois-Pistoles dans la fin de la quarantaine. À la fin de 2019, il avait décidé de porter plainte à la police contre M. Poncak, qui lui avait envoyé sur les réseaux sociaux un mème tiré du film Taken, où on lisait I will find you, and I will kill you. En français, cela signifie : « je vais te trouver et je vais te tuer ».

À l’époque, la police avait d’abord retrouvé Poncak avant de l’interroger, mais aucune accusation n’avait été déposée. C’est toutefois après cette première plainte que tout a basculé, a rapporté en avril la chroniqueuse de La Presse Isabelle Hachey.

Au début de 2020, M. Rioux a commencé à recevoir un torrent de menaces, d’insultes et de messages haineux sur Twitter, Instagram et YouTube, ainsi que par courriel.

L’artiste en était à un point où il redoutait même de s’asseoir devant son ordinateur le matin, en commençant sa journée. « Je commençais à avoir peur. Je recevais des photos de moi avec une cible dans le front. Des photos de moi, enfant, qui se faisait tirer dessus par des gens », avait-il d’ailleurs expliqué en entrevue.

M. Rioux a finalement porté plainte une seconde fois à l’automne 2020. Une enquête a de nouveau été ouverte. Et près d’un an plus tard, le 4 août 2021, la police de Gatineau, appuyée par l’escouade du cybercrime de Montréal, a arrêté Peter Poncak, âgé de 38 ans, après avoir relié ses comptes à une adresse IP.

En mars, à l’issue de près de deux ans de procédures judiciaires, Peter Poncak a finalement été déclaré coupable de harcèlement criminel, un chef d’accusation qui est passible d’un emprisonnement maximal de dix ans. Poncak était connu en ligne sous des pseudonymes comme Nick Gurr et youranalmaster.