Joseph Frenn, un individu que les renseignements policiers relient au crime organisé libanais, a été reconnu coupable de production et de possession de cocaïne dans un but de trafic, jeudi, au palais de justice de Saint-Jérôme.

Joseph Frenn, 33 ans, ses frères ainsi que les frères Saoumaa et d’autres individus ont fait l’objet en 2017 d’une importante enquête de la Division du crime organisé du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) baptisée Affliction.

Les enquêteurs soupçonnaient l’organisation d’écouler jusqu’à 50 kilogrammes de cocaïne par semaine à cette époque et d’approvisionner les Hells Angels et la mafia.

La même organisation serait, selon la police, derrière une importation par avion ratée de 130 kg de cocaïne en mars 2017.

PHOTO FOURNIE PAR LA U.S. CUSTOMS AND BORDER PROTECTION

Sylvain Desjardins et David Ayotte ont posé d’urgence leur petit avion bourré de 130 kg de cocaïne en Ohio, le 29 mars 2017.

L’appareil, piloté par deux Québécois, s’était posé d’urgence sur la piste de l’aéroport de l’Université de l’Ohio en raison d’un problème mécanique.

L’organisation avait également aménagé un laboratoire de transformation et de presse de la cocaïne sophistiqué sur le chemin Thomas-Gore à Lachute, démantelé par les policiers quelques jours après l’atterrissage d’urgence de l’avion.

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Propriété du chemin Thomas-Gore à Lachute, où le laboratoire avait été aménagé, dans le garage à l’arrière-plan

Trahi par son ADN

En avril 2017, les limiers ont retrouvé dans ce laboratoire, aménagé dans le garage extérieur d’une propriété, une presse hydraulique, des balances électroniques contaminées à la cocaïne, des fours, des moulins à café, des scelleuses, des produits chimiques, des masques, des respirateurs à air propulsé, des gants et des tampons servant de logos de kilogrammes de cocaïne.

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Une partie du laboratoire de transformation et de production de cocaïne démantelé par les enquêteurs de la Division du crime organisé du SPVM en avril 2017

L’ADN de Joseph Frenn a été retrouvé sur un masque et sur l’un des respirateurs à air propulsé retrouvés dans le laboratoire, et l’une de ses empreintes digitales a été relevée sur une balance.

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C’est sur un respirateur à air propulsé comme celui-ci, découvert dans le laboratoire de Lachute, que l’ADN de Frenn a été trouvé.

La preuve contre Frenn reposait également sur des vidéos et plusieurs filatures effectuées entre janvier et avril 2017, au cours desquelles il a été vu se rendant dans le laboratoire, ou en compagnie de complices avec lesquels il a transporté ou échangé des sacs et des valises, dont une fois entre minuit et 8 h.

« Une machine à compter de l’argent, des masques, des produits utilisés pour le trafic de stupéfiants, des sacs réutilisables, les mêmes saisis sur des perquisitions et contenant des kilos de cocaïne, ont été retrouvés chez l’accusé », a souligné le juge Sylvain Lépine de la Cour du Québec, avant de conclure qu’à la lumière de la preuve circonstancielle présentée devant lui, il ne pouvait tirer aucune autre inférence que la culpabilité de l’accusé.

« Les observations faites par les policiers lors des filatures démontrent un comportement hors de l’ordinaire. Il ne s’agit pas ici d’individus qui pratiquent un sport ensemble. Ces individus, dont l’accusé, échangent des sacs. On n’en voit pas le contenu, mais la seule conclusion logique, avec les éléments saisis lors des perquisitions, c’est-à-dire des stupéfiants, de l’argent et des produits et instruments servant au trafic et à la vente de stupéfiants, est que l’accusé avait la connaissance et le contrôle de la cocaïne », a conclu le juge Lépine.

« Un des arguments de la défense est que l’on ne voit pas le contenu des sacs transportés par l’accusé et ses présumés complices. Mais il est de la nature même de ces crimes de cacher ce qui est transporté. Les trafiquants de stupéfiants ne vont certainement pas transporter argent et drogue dans des sacs transparents », a ajouté le magistrat, qualifiant même l’une des théories de la défense de « farfelue ».

Une accusation peu fréquente

Il est relativement peu fréquent au Québec qu’un individu soit accusé et reconnu coupable d’un chef de production de cocaïne. Une personne reconnue coupable de ce chef est passible d’une peine à perpétuité.

« La preuve circonstancielle contre l’accusé était probante au-delà de tout doute raisonnable. Mais combinée aux éléments de preuve directe, celle-ci devenait accablante. Le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP) est satisfait du jugement considérant l’analyse complète de la preuve effectuée par le Tribunal », ont réagi les procureures de la Poursuite, MCaroline Buist et MJennifer Lepage.

Joseph Frenn était représenté par MDanièle Roy.

Les observations sur la peine ont été reportées à la mi-janvier.

Pour joindre Daniel Renaud, composez le 514 285-7000, poste 4918, écrivez à drenaud@lapresse.ca ou écrivez à l’adresse postale de La Presse.