L’un des deux Canadiens emprisonnés en Chine pendant près de trois ans, Michael Spavor, accuse son quasi-homonyme, Michael Kovrig, d’être à l’origine de leur arrestation en raison de son travail auprès des services de renseignement du Canada et de ses alliés.

Le quotidien The Globe and Mail révélait samedi matin que selon plusieurs sources, Michael Spavor cherchait à se faire dédommager par le gouvernement canadien et réclamait plusieurs millions de dollars. Il aurait engagé à cette fin l’avocat torontois John K. Phillips, qui a autrefois représenté Omar Khadr, afin d’engager des discussions privées avec le ministère de la Justice et Affaires mondiales Canada.

PHOTO ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Michael Kovrig

Parlant couramment le coréen, Michael Spavor fait partie du club très sélect des Occidentaux qui ont déjà rencontré le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un et plusieurs de ses ministres de haut rang. Il aurait notamment contribué à organiser la rencontre entre le dictateur et le joueur de basketball Dennis Rodman.

Or, selon les sources du Globe and Mail, son avocat allègue que Michael Spavor a été arrêté par la Chine parce qu’il aurait discuté avec Michael Kovrig du régime nord-coréen. Les informations ainsi glanées auraient ensuite été transmises à l’insu de Michael Spavor au gouvernement canadien et à ses partenaires des Five Eyes.

Pas des agents secrets

C’est qu’à l’époque, Michael Kovrig travaillait en Chine à titre de diplomate au Programme d’établissement de rapports sur la sécurité mondiale du ministère des Affaires étrangères. Ses employés sont chargés de récolter des informations et de produire des rapports sur la situation sécuritaire dans les pays d’importance stratégique pour le Canada.

Considérés comme précieux, ces rapports seraient ensuite transmis aux alliés du Canada dans le domaine de la sécurité. Les employés du programme, comme Michael Kovrig, ne sont toutefois pas considérés comme des agents des services de renseignement et ne sont pas censés gérer, recruter et rémunérer des sources humaines, affirme le Globe and Mail.

La Chine a arrêté les deux hommes en décembre 2018, sur la base d’allégations d’espionnage, après que le Canada eut arrêté la directrice financière de Huawei, Meng Wanzhou, à la demande des autorités américaines.

Les deux hommes sont rentrés au Canada, après plus de 1000 jours de détention, en septembre 2021.

PHOTO FRANK GUNN, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Michael Kovrig (au centre) avec sa femme Vina Nadjibulla (à gauche) et sa sœur Ariana Botha après son arrivée à l’aéroport Pearson de Toronto, le 25 septembre 2021

Accusé d’espionnage

Michael Spavor a été accusé en Chine d’espionnage pour le compte d’une entité étrangère et d’obtention illégale de secrets d’État. Michael Kovrig a quant à lui été accusé d’avoir reçu illégalement des secrets d’État et des renseignements en collaboration avec Michael Spavor.

Lors de sa détention, Michael Spavor aurait notamment été forcé de rester assis sur une chaise durant de longues heures en plus d’être menacé de mort par les autorités chinoises. C’est alors qu’il leur aurait admis avoir transmis des renseignements à Michael Kovrig, toujours selon une source citée par le Globe and Mail.

Joint par le quotidien, un représentant du gouvernement canadien a rejeté les allégations présentées par l’avocat de Michael Spavor voulant que les autorités chinoises aient arrêté les deux hommes parce que Michael Kovrig aurait fait preuve de négligence. Leurs arrestations étaient « complètement arbitraires » et n’étaient pas dues aux « actions de l’un contre l’autre », a affirmé cette source, toujours sous le couvert de l’anonymat, puisqu’elle ne serait pas autorisée à parler du dossier publiquement.

Ni Michael Spavor ni son avocat n’ont répondu aux questions du Globe and Mail. Dans une déclaration écrite, Michael Kovrig a affirmé pour sa part qu’il « était un agent des services étrangers affecté en Chine en qualité de diplomate, travaillant conformément aux lois, règles et règlements régissant les diplomates ».