(Joliette) Treize ans. C’est le nombre d’années que devra passer derrière les barreaux Alexandre Boudreau-Chartrand avant d’être admissible à la libération conditionnelle. L’homme de 38 ans a battu à mort sa conjointe Andréane Ouellet en 2021, puis a tenté de berner les policiers en leur faisant croire à une surdose ou à un suicide.

Le juge Eric Downs a donc tranché la poire en deux en rejetant les suggestions de la défense (11 ans) et de la Couronne (15 ans), se ralliant plutôt à la recommandation unanime des jurés de fixer à 13 ans la période d’inadmissibilité à la libération conditionnelle du meurtrier.

« Il faut souligner qu’une recommandation unanime des représentants de la collectivité est nécessairement empreinte de sagesse », a souligné lundi le juge Downs, au palais de justice de Joliette. Le magistrat a rappelé que le délinquant écopait d’abord d’une peine d’emprisonnement à vie.

Parmi les facteurs aggravants, le juge retient la « brutalité de la force » utilisée pour tuer Andréane Ouellet, le contexte de « violence verbale et psychologique », la tentative du tueur de cacher son crime et de mettre les policiers sur une fausse piste, ainsi que les traumatismes de la famille de la victime, en premier lieu les cinq enfants du couple.

PHOTO DÉPOSÉE EN PREUVE

Alexandre Boudreau-Chartrand

Le juge relève toutefois comme facteurs atténuants l’« amorce de prise de conscientisation » du délinquant, son absence d’antécédent judiciaire et sa « volonté » d’améliorer son comportement en participant à des formations en prison. Alexandre Boudreau-Chartrand présente aussi un « faible » risque de récidive compte tenu de sa « personnalité et du soutien de ses proches », estime le juge.

Cinq enfants sans mère

En septembre 2021, Alexandre Boudreau-Chartrand était un homme jaloux, qui ne supportait visiblement pas l’adultère et l’alcoolisme de sa conjointe. C’est dans ce contexte qu’il s’est acharné sur Andréane Ouellet pour la tuer dans leur résidence de Saint-Donat. Ses blessures étaient si graves que seuls des impacts répétés et d’une grande violence ont pu les causer.

Ça n’a pas empêché Alexandre Boudreau-Chartrand d’appeler le 911 en faisant croire qu’il venait de découvrir le corps de sa conjointe au bas de l’escalier. Avec insistance, il a répété aux policiers et aux ambulanciers qu’Andréane était probablement morte en « déboulant les escaliers » ou en faisant une « overdose ». Or, elle n’avait pas d’alcool et très peu de médicaments dans son sang au moment de sa mort.

Alexandre Boudreau-Chartrand – qui a porté le verdict en appel – n’a pas témoigné au procès. Le jury a toutefois entendu ses mensonges lors de son appel au 911. Lors des observations sur la peine, il s’est adressé avec une certaine nonchalance au tribunal pour dire qu’il se sentait « vraiment mal ».

« Je n’ai jamais voulu qu’elle meure. Je ne sais pas ce qui est arrivé… Je suis désolé… », a-t-il déclaré.

Les cinq enfants du couple se retrouvent ainsi en pratique orphelins. Heureusement, les parents d’Andréane Ouellet les ont pris sous leur aile. Un lourd fardeau pour des retraités, obligés de mettre leur deuil « sur pause ». Le juge Eric Downs avait souligné la « force, le courage, la résilience et l’immense bonté » de la grand-mère Nathaly Bherer, le mois dernier.

À la dernière audience, la mère d’Andréane Ouellet avait brossé un portrait plus positif de sa fille, rappelant que celle-ci était une étudiante brillante en droit et une amoureuse de théâtre avant de tomber dans les griffes de son bourreau. « Tu avais une empathie hors du commun envers les autres. Aidante, généreuse. Comme une mère Teresa, tu voulais sauver le monde », avait confié sa mère.

Andréane aimait « inconditionnellement » ses cinq enfants, avait insisté la grand-mère. Ils étaient « tout » pour elle. « Malheureusement, ta tâche est devenue bien lourde. Tu t’es laissé prendre dans un filet dont tu n’as pu te défaire. Tu souffrais seule en silence », s’est désolée sa mère.

MValérie Michaud et MCaroline Buist ont représenté le ministère public, alors que Me Élise Pinsonnault et MCatherine Ranalli ont défendu l’accusé.