Le violeur en série Samuel Moderie, qui a piégé plusieurs femmes sur des applications de rencontre pour les droguer, les agresser sexuellement et filmer l’acte alors qu’elles étaient inconscientes, a plaidé coupable jeudi à 24 chefs d’accusation qui pesaient sur lui.

L’homme de 28 ans a admis sa culpabilité pour des actes criminels touchant 13 femmes qu’il a violées, droguées ou filmées à leur insu.

En février dernier, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) avait lancé un appel à la collaboration du public, avec la Sûreté du Québec, la Régie intermunicipale de police Richelieu–Saint-Laurent et le Service de police de Saint-Jérôme, pour retrouver d’éventuelles victimes de l’agresseur.

Plusieurs des femmes qu’il a droguées avec des benzodiazépines (anxiolytiques vendus notamment sous le nom de Xanax ou de Valium) n’avaient aucun souvenir de l’agression. C’est en visionnant des images récupérées dans le téléphone cellulaire et le matériel informatique de Moderie que les enquêteuses ont identifié puis éventuellement contacté certaines de ses victimes.

À ce jour, deux des victimes n’ont toujours pas pu être identifiées, et « M. Moderie n’a pas collaboré à les identifier », a précisé le procureur de la Couronne, Jérôme Laflamme, après l’enregistrement de la reconnaissance de culpabilité.

Portant des vêtements sombres, l’accusé fixait le sol lorsque MLaflamme a longuement décrit ce qu’il a qualifié de « sévices sexuels » infligés à ses victimes inconscientes, dont des gestes douloureux aux organes génitaux et des pratiques sexuelles humiliantes.

Moderie utilisait souvent le même modus operandi : il obtenait des rendez-vous avec des femmes grâce à des applications de rencontre comme Tinder, Badoo et JALF, puis les droguait en dissimulant la substance dans de l’alcool ou de la nourriture.

Il les agressait généralement à leur domicile, en faisant des mises en scène qu’il photographiait et filmait avec son téléphone alors que les femmes étaient inconscientes.

Au moins une des agressions s’est produite alors que l’enfant handicapé d’une des victimes se trouvait dans la maison.

« Déviance sadique »

Moderie n’en était pas à ses premières agressions du genre. Il a été condamné en 2019 à deux ans de prison pour des viols armés et des actes de voyeurisme dont la victime était une femme de son entourage, qu’il avait aussi droguée avec un somnifère et filmée pendant ses agressions.

Son rapport de libération conditionnelle soulignait à l’époque qu’il représentait un « risque de récidive sexuelle au-dessus de la moyenne » et qu’il avait une « déviance sadique des intérêts sexuels », mais la Commission des libérations conditionnelles avait jugé que sa libération « ne représentera[it] pas un risque inacceptable pour la société ».

Sa « surconsommation de pornographie est venue alimenter [ses] fantasmatiques déviantes », a favorisé « une objectification de la femme et détérioré [sa] morale sexuelle », soulignait le rapport.

Certaines des pratiques sexuelles qu’il favorisait pendant ses agressions sont très fréquemment dépeintes sur des sites pornographiques gratuits.

Épinglé pour un vol

Une des victimes de Moderie, qu’il nous est interdit de nommer en raison d’une ordonnance de la cour, affirme qu’il s’est lui-même très maladroitement piégé en lui volant de l’argent. « Alors que j’étais inconsciente, il m’a pris la main, a déverrouillé mon cellulaire, et s’est fait un transfert Interac à partir de mon compte », raconte cette femme.

« Je suis soulagée, mais j’ai surtout hâte de connaître sa peine », a réagi cette femme, après avoir appris sa reconnaissance de culpabilité.

Je lui souhaite une peine à perpétuité. Il ne mérite pas de sortir de prison, mais je sais que je rêve en couleur.

Victime de Samuel Moderie

« C’est un soulagement de savoir qu’il a plaidé coupable, a réagi une autre de ses victimes. J’étais prête à aller témoigner en cour, mais je suis aussi contente de m’en tirer. Un an presque jour pour jour après mon agression, justice a été rendue. »

Les avocats de la Couronne et de la défense entendent demander au juge Pierre Dupras d’ordonner une évaluation psychiatrique de Moderie, qui est détenu depuis son arrestation fin janvier 2023.

« Ce sont des crimes qui ont une gravité objective importante, a signalé MLaflamme. Nous allons certainement demander une peine importante de détention », a-t-il ajouté, sans toutefois s’avancer davantage à ce stade.